DANS LE COCHON, TOUT EST BON !

Nous sommes tous Charlie mais surtout, ne le dites pas trop fort.

Quand le bourgmestre de Welkenraedt crie : vive la liberté d’expression, il veut dire : à Paris. Dans sa bonne ville, c’est différent. L’expo consacrée à la censure a été fermée sur son ordre quelques heures après son ouverture. Sans la moindre menace ni l’ombre d’un djihadiste dans les rues. Cela s’appelle le principe de précaution. Et c’est contagieux. Une expo Charlie au Musée Hergé suspendue après la visite du maïeur d’Ottignies-LLN, accompagné du chef de la police, un festival de cinéma (où l’on projetait « Timbuktu » ou le nouveau film de Marjane Satrapie) interrompu à Tournai par la le maïeur et la police fédérale…

Si les autorités communales et policières font maintenant le boulot des fous de Dieu, les islamistes sont bons pour le chômage…

Reste à annuler les prochaines élections – pour éviter le désordre si la majorité n’est pas reconduite-, condamner les bibliothèques (tous les livres ne contiennent-ils pas des passages qui pourraient heurter la susceptibilité de l’une des millions de minorités de la planète ?) et supprimer l’enseignement obligatoire. Pour empêcher les terroristes en herbe de déchiffrer le mode d’emploi des armes vendues en toute légalité par la F.N.

On s’étonne d’ailleurs que la fermeture des écoles ne fasse pas partie de la panoplie des mesures prises par le gouvernement Michel alors que son impact soulagerait les budgets des communautés.

Hélas, le ver du terrorisme n’est-il pas déjà dans la pomme de Welkenraedt ?

 « De tout temps, les hommes se sont heurtés à un ennemi redoutable : la censure » déclare le site de la « bibliothèque insoumise » (sic) de Welkenraedt. Une vraie provocation…

Cela rappelle la décision prise il y a quelques années par le bourgmestre de Marche, qui avait interdit les représentations de « La Terre » … d’Emile Zola ! Trop osé pour ses administrés, trancha le maïeur – aussi ministre de la culture ! Et le brave homme de déclarer benoîtement au micro d’une journaliste, que lui irait voir la pièce, bien sûr. Mais à Bruxelles !

Jusqu’où s’applique le « principe de précaution » ? La prestigieuse maison d’édition britannique Oxford University Press vient de bannir cochons et saucisses de ses livres pour « ne pas froisser juifs et musulmans ». En revanche, les loups, l’ennemi juré des trois petits cochons, ne sont pas visés. Trop tard, il est vrai : les loups sont entrés dans Paris.

Dans la foulée, on devrait effacer tous les autres animaux pour ne pas heurter les bouddhistes et couper les dialogues au cinéma et au théâtre pour respecter ceux qui font vœu de silence.

Pourquoi ne pas supprimer la télévision, Internet et autres réseaux d’images, ce qui ne signerait pas nécessairement le recul de la civilisation ?

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PRO – FÊTES

A quoi ressemble cette fichue querelle autour du prophète, bon Dieu ? Les pour, les contre s’affrontent avec tant de rage et une telle mauvaise foi que je ne m’y retrouve pas. Pour être franc, ce sont surtout ceux qui sont contre que je ne comprends pas. Car moi, je serais plutôt pro-fête. Et je ne vois pas pourquoi ceux qui préfèrent méditer seuls se permettent d’empêcher les autres de faire la nouba.

Que des croyants énervés ne me jettent pas la première pierre – ni le reste du tas. Fête et prophète font parfaitement la paire. C’est ce que révèlent les textes sacrés si on prend la peine de les lire.

L’Islam, comme le judaïsme, célèbrent Aaron, le frère de Moïse et de Myriam. Or, qu’est-ce qui a rendu ce type célèbre ? D’avoir profité de l’absence de son frère, parti chercher les tables de la loi, pour organiser une gigantesque party au cours de laquelle, dit la Bible, « Le peuple s’assit pour manger et pour boire; puis ils se levèrent pour se divertir » et pour fabriquer un veau d’or en fondant tous les bijoux de l’assistance (Exode, 32).

Passons sur Moïse, nettement moins gai que son frère. Les dix plaies d’Egypte, l’exode dans le Sinaï, le massacre de différentes tribus. Pour en venir à Abraham, prophète-clé de toutes les religions monothéistes. Sa vie sexuelle est un exemple pour la jeunesse, surtout la jeunesse pieuse. Adepte du ménage à trois, Abraham vit avec sa femme, Sarah, et sa servante Agar, devenue sa maîtresse. Bon, c’est vrai. Entre les deux gamines, il y a parfois une sacrée électricité dans l’air. Mais pas au point d’empêcher notre Abraham de faire la fête et des enfants à l’une et à l’autre. Puis de faire passer Sara pour sa sœur auprès du roi, qui la prend aussitôt pour épouse. Joyeuse époque. Comme celle de David. Deuxième roi d’Israël et prophète de la religion musulmane, en voilà encore un qui n’a pas vraiment vécu comme un moine. Il chante, il danse, il boit. Il séduit les femmes. Toutes plus belles et plus attirantes, dont la célèbre Bethsabée, l’épouse d’un de ses officiers. Qu’il envoie en première ligne, en guise de remerciement, où il se fera abattre. Morale de l’histoire, Dieu n’est pas content du comportement de David, pas du tout. Mais il lui pardonne. Quelques-uns devraient en prendre de la graine, tiens.

Comme quoi, ceux qui affirment de manière péremptoire qu’ils représentent Dieu ou ses prophètes feraient bien, avant d’étudier le mode d’emploi du kalachnikov, d’abord d’apprendre à lire puis se pencher sur les textes sacrés de leur religion, dont manifestement ils n’ont pas appris le premier mot.

« Si Dieu le voulait, tous les hommes de la terre seraient croyants. Est-ce à toi de contraindre les hommes à devenir croyants ? » (Coran, X, 99).

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ADIOS SOCIAL CLUB !

Obama a-t-il rendu service aux Castro ? Pas sûr. Qu’est-ce qui rendait encore Cuba si attirant ? Les illusions de la révolution s’étaient dissipées depuis longtemps. Prisonniers politiques, économie en miette à cause de sa soviétisation (bien plus que par le blocus), corruption, émigration en masse, dictature hispanique de gauche qui n’avait rien à envier à celles de droite. Ce n’est pas ce régime pourri qui séduisait à Cuba mais le fait qu’il soit moisi. La chance de Cuba, c’était de s’être arrêtée dans le temps. Visiter Cuba, c’était un retour dans les Antilles années cinquante, avec ses bâtiments baroques en ruines, ses délirantes voitures à moitié déglinguées sorties tout droit de American Graffiti, ses musiques et ses rythmes d’autrefois, mambo, mambo. Ses chanteurs célèbres étaient des vieillards, ses dirigeants politiques aussi. Les uns avaient été contemporains de Xavier Cugat et les autres avaient dialogué avec le président Kennedy. Se promener dans La Havane, c’était comme un retour dans le forum à Rome, un saut dans Berlin-est époque Honecker, une plongée vintage et nostalgique dans une époque ailleurs disparue.

Si Cuba devient une île des Caraïbes aussi banale que les autres, pourquoi aller encore à Cuba ? A New York, ses cigares ne s’échangeront plus clandestinement au prix de la cocaïne et à La Havane, on roulera en Toyota et en Opel comme à Genk et à Maubeuge.

C’est sûr, le secteur du tourisme de Cuba aura bien du souci à se faire à cause de l’ambition d’Obama d’entrer à peu de frais dans l’Histoire. D’Obama mais surtout du pape François.

D’après ce qu’on lit, l’intervention du premier pape sud américain a été décisive dans la décision de remettre Cuba dans l’histoire moderne. A la mesure du rôle de Jean-Paul II dans l’effondrement du mur de Berlin et de l’ensemble du régime soviétique en Europe.

Petite suggestion : la prochaine fois, le conclave pourrait peut-être choisir un pape islamique, façon de balayer quelques autres régimes abominables qui ravagent la planète.

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PS : Magnifique coïncidence, la récente sortie du très beau film de Laurent Cantet sur un scénario de l’écrivain Leonardo Padura « Retour à Ithaque ». Portrait du désenchantement de la « génération perdue », ces jeunes Cubains des années 60, illusionnés par les slogans de Castro et Guevara, qui sont passés à côté de leur vie.

Et, à lire, Sanctuary V de Bud Schulberg, qui raconte les premiers mois du régime Castro, et déjà ses premières fissures qui entraîneront le peuple à se soumettre au gran Chingon, la raison du plus fort. Ce superbe roman, paru aux Etats-Unis en 1969, n’a été traduit en France qu’en 2005. Eternel aveuglement des intellectuels français.

MARCHE OU GREVE

Pourquoi seul le chroniqueur du « Soir » ne peut-il faire grève ? Les cheminots, les travailleurs de Delhaize, les profs, les dockers, les coiffeuses, même les sportifs, les juges et les avocats, et parfois même les chauffeurs des TEC, tout le monde a le droit de se croiser les bras une fois par semaine ou presque, et de transformer l’entrée des bureaux, des zonings et des magasins en BQ géants devant de joyeux braséros. Tout le monde sauf les chroniqueurs du « Soir » ? D’accord, je n’aime pas les BQ, les chipolatas carbonisées d’un côté et crues de l’autre mais je suis prêt à n’avaler que des pommes de terre en vidant une petite mousse – les grévistes savent pourquoi. Mais non, impossible. Faire la grève pour moi signifierait me mettre devant la porte de mon propre bureau avec un grand panneau « Bas la plume, chroniqueurs ! » pour m’empêcher moi-même d’entrer. La schizophrénie a ses limites.

Quelqu‘un me fait remarquer que je ne suis pas le seul à travailler les jours de farniente : les ministres non plus n’arrêtent jamais. Une grève des ministres ? Ce serait le chaos, disent-ils. Si Jambon faisait la grève de la faim chaque fois que tante Laurette lui rentre dans le lard, il ne lui resterait que la peau sur les os. Et Charles Michel ? Obligé de courir avec des seaux d’eau à chaque jet de flèche incendiaire, matin, midi et soir, sous peine de se retrouver avec quinze petits tas de cendres en guise de ministres.

Alors, ministre et chroniqueur, même combat ? Il y a des points communs, je le reconnais : mieux vaut être bilingue, prendre le public à témoin, avoir la dent dure mais éviter d’être blessants. Il y a tout de même quelques différences : à ma connaissance, aucun chroniqueur n’est payé par le contribuable, ni n’a droit à une voiture avec chauffeur. Aucun surtout n’a jamais vu sa chronique publiée dans Le Moniteur belge.

Mais, à bien y réfléchir, une grève des ministres, serait-ce vraiment un désastre ? Le monde politique n’a jamais été aussi populaire que pendant les 541 jours où il a laissé la Belgique tranquille, je veux dire sans gouvernement. Pas de guerre picrocholine entre gauche et droite, entre Flamands et francophones, entre Clochemerle et Merlecloche, même pas de guerre du tout. Bien sûr, sans exécutif, le pays n’aurait pas d’impôt sur le capital mais il n’y en a pas. Ni de musée d’art moderne. Mais est-ce plus malin  d’en avoir trois ? On éviterait le saut d’index mais, tenant compte du taux d’inflation et surtout de la manipulation du « panier de la ménagère » par le précédent gouvernement, qui s’en apercevrait ? Le principal avantage d’un arrêt de travail des ministres, c’est qu’ils seraient seuls en grève. Contre qui protester si les chefs restent dans les bras de Morphée ?

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ADIEU, PERE FOUETTARD !

Profitez-en ! Cette année est sans doute la dernière occasion de faire la fête au père Fouettard.

Avec le règne du politiquement correct, son sort paraît définitivement scellé. Barbouillé de cirage, son fouet à la main, le père Fouettard est passé de mode autant que Guignol, les vidéos-clubs ou les socialistes français.

Peut-être qu’un archéologue, dans deux ou trois siècles, tombera sur une figurine miraculeusement préservée du côté sombre de Saint Nicolas. Il se grattera la tête en se demandant pourquoi ce personnage a brusquement disparu à la veille de 2015 avant de conclure que notre époque est décidément incompréhensible. Il est interdit de fumer dans les films ou les BD (bientôt on retouchera les images d’Humphrey Bogart comme on l’a fait de celles de Malraux sur les timbres français et de Jacques Tati, privé de sa pipe sur les affiches du métro). On doit veiller à ne pas glisser Tintin au Congo dans les cadeaux destinés aux enfants des amis. Eviter de faire doubler les élèves pour ne pas les traumatiser à vie. Et ne jamais évoquer le tour de taille de madame De Block, ce qui est de mauvais goût. Voilà quelques règles de base du savoir-vivre d’aujourd’hui. En revanche, n’hésitez pas à célébrer les plaisanteries antisémites de Dieudonné. Ce type est si audacieux, ma chère ! Et surtout, vous pouvez rire sans honte puisqu’il est Noir…

Contrairement à la légende, ce n’est pas la couleur de peau, ni même le sexe qui font un bon Zwarte Piet. Regardez Laurette Onkelinx, se déchaînant contre le duo Jambon-Francken, qui avaient eu l’idée stupide d’apporter des spéculoos et des chocolats à un de leurs anciens collègue, qui avait fait copain-copain avec les nazis. Elle leur a flanqué une fessée bien méritée. Et Bart De Wever, qui a prudemment dédaigné le casting gouvernemental ? Encore un parfait père Fouettard, bien décidé à punir socialistes autant que libéraux et chrétiens avant de réapparaître aux prochaines élections dans le rôle du bon Saint Nicolas.

Malgré le risque de disparition du père Fouettard, son compagnon, le bon saint, n’a pourtant plus la cote. Ceux qui ont joué dans son club, Obama ou Hollande, sont au plus bas dans l’opinion publique. Alors que les Poutine et les Assad mènent le monde à la baguette. Etonnant paradoxe : c’est au moment où le père Fouettard est en vedette qu’on veut l’effacer de l’imaginaire collectif.

Une idée d’avance vouée à l’échec. Quel que soit le grimage, en politique, c’est toujours le plus affreux qui finit par l’emporter. Comme le disait judicieusement Alfred Hitchcock : un film n’est réussi que si le méchant est réussi. Ces derniers temps, il faut avouer qu’on est servi.

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DES PETITS TROUS, TOUJOURS DES PETITS TROUS…

Paraît qu’ils veulent faire un grand trou aux Marolles pour y mettre les bagnoles qui passent par là. Désolé, on vend de tout au Vieux Marché, de faux Magritte, des vrais trombones à coulisses, de fausses Licorne à moins qu’elles ne soient vraies. Mais, des bagnoles, non. Et on a besoin de paix pour boire sa pintje tranquillement sur la place du Jeu de Balles avant de repartir à la chasse aux trésors. Sans engins de destruction massive. Alors, smeirlap, pas touche au Vieux Marché, asteblieve ! Puute van de koech ! Et tes mains chez toi !

Non mais… Qu’est-ce qui leur prend aux édiles de ravager Bruxelles toutes les quelques années ? Et cela dure depuis cent ans. Cent ans de destructions, toujours pour un mieux, hein ? Sauf que, quand les travaux pharaoniques sont finis, ceux qui les ont subis ne sont plus là pour en profiter. Faillis, déplacés, morts. Et la génération suivante des habitants non plus. Parce que la génération suivante des politiques s’est mise à son tour en tête de nettoyer ce que ses prédécesseurs avaient bêtement laissé debout…

De la démolition du centre populaire entre l’actuelle gare Centrale et la gare du Midi par la construction de la Jonction à l’éradication du merveilleux Mont des Arts. Et à la re-destruction du centre populaire des environs de la gare du Nord pour le remplacer par un quartier qui sera comme New York, si, si, on vous le garantit, le Manhattantje. Ah ! Les beaux discours sur l’urbanisme de demain agitant l’image lyrico-pompeuse d’un Brussels on Hudson de ces politiciens faussement modernes, Van den Boeynants, Cudell et de leurs amis entrepreneurs-spéculateurs ! Résultat, trente ans de friches entre le canal et la place Rogier (à nouveau en plein travaux), l’allure de Dresde après le bombardement et, finalement, une série de tours immondes, énergivores, inhumaines et déjà obsolètes.

Pendant ce temps, la construction d’un viaduc ravageait tout sur son passage entre Rogier et la Basilique, puis rebelote quelques années plus tard avec la destruction de cette passerelle rouillée et rebelote encore avec un nouveau trou pour y glisser ce qu’on appelait fièrement le plus long tunnel de ville. Avec toutes ces « installations », pas besoin de chercher un musée d’art contemporain à Bruxelles, il est dans la rue…

Passons sur la destruction de toutes ces vieilles choses, telle la Maison du Peuple de Horta, magnifique cathédrale laïque, que le parti socialiste a fait raser pour laisser bâtir à la place une tour trapue qui abritait le ministre de la culture ! C’était évidemment l’époque où la mode était à la culture Ceausescu…

Si vous percevez dans ce billet de la rage pour ne pas dire de la bave aux lèvres, vous ne vous trompez pas ! Le ketje de Bruxelles aime sa ville comme la fritte aime la mayonnaise.

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SANS SANGLOTS LONGS

Ne me regardez pas comme ça quand je vous dis que j’aime l’automne plus que tout, que c’est ma saison préférée. Chacun ses goûts, ses raisons. La N-VA préfère l’hiver : la glace fige chacun chez soi. Les socialistes, le printemps. Avec la sève qui monte, les jeunes descendent volontiers dans la rue. Tandis que les écolos attendent impatiemment l’été, où les activités polluantes tournent au ralenti – et la politique aussi.

De temps en temps, il est sain de remettre en cause ses certitudes. Un peu d’oxygène, que diable, si l’on veut changer le monde ! C’est l’occasion puisque son vent purificateur fait de l’automne la plus belle saison. « Vive la brise, enfin, d’automne/ Après tous ces simouns d’enfer/ la bonne brise qui nous donne/
Ce sain premier frisson d’hiver ! » (Verlaine) 

Que les écolos oublient l’août en se rappelant que l’automne, c’est la saison des « fruits tombant sans qu’on les cueille » (Apollinaire). Pour convaincre les socialistes de choisir novembre au lieu de mai, on citera Aragon : « Automne automne long automne/Comme le cri du vitrier/De rue en rue et je chantonne. »

Pas mal, non ?, pour pousser les camarades à arpenter les pavés en décembre.

Et aux autres, toujours réticents dès les premiers frimas, grognons devant la nuit qui tombe avant même que le soleil ne soit levé, on leur murmurera du Charles Cros : « Que me fait le soir triste et rouge/
Quand sa lèvre boudeuse bouge ? »

Et les libéraux ? Seule ombre au tableau, l’automne n’est pas le mois des libéraux. Le ciel est rouge. Un coup des socialistes. Les feuilles sont jaunes et noires, encore du grain à moudre pour les nationalistes flamands. Au début du mois, les monstres étaient à la fête, ce qui rappelait que le Vlaams Belang bouge toujours. Mais, pas une touche de bleu. Pourtant, les libéraux auraient tort de se plaindre. Ils devraient profiter des derniers moments qui précèdent l’hiver. Ils croient avoir connu le pire ? Hélas ! Qu’ils relisent Baudelaire : « Tout l’hiver va rentrer dans mon être : colère,/
Haine, frissons, horreur, labeur dur et forcé,/
Et, comme le soleil dans son enfer polaire,/
Mon coeur ne sera plus qu’un bloc rouge et glacé. »

Accroche-toi, Charles Michel, ou tu regretteras toi aussi l’automne !

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PS : histoire de briller en société, l’automne a aussi inspiré quelques beaux romans. Dont le superbe recueil de trois longues nouvelles de Jim Harrison « Légendes d’automne », drôles, poignantes. « L’automne du Patriarche », de Gabriel Garcia Marquez à offrir pour Saint Nicolas à tous ceux (et toutes celles) qui s’accrochent au pouvoir, « Crépuscule d’automne » de J. Cortazar, son ouvrage-somme, sans oublier « L’automne à Pékin », le plus poétique (et magnifique) des romans de Boris Vian.

RAGE TAXATOIRE

Un gouvernement de droite qui envisage un impôt sur le capital, est-ce vraiment le monde à l’envers ? Ou tout simplement, une fois de plus, une mauvaise traduction du néerlandais ? Il fallait lire un impôt sur LA capitale. Cette ville pleine de chômeurs, d’étrangers et de fainéants. Une taxe réservée aux Bruxellois, voilà qui est nettement plus conforme à la politique du gouvernement libéral-N-VA. Ouf ! Après un moment de stupeur et les excuses du ministre (un rite devenu quasi quotidien) pour cette mauvaise interprétation linguistique de son projet, le calme est revenu dans les chaumières quatre façades de Brasschaat et de Courtrai. Ainsi qu’à Gerpinnes, où Albert Frère commençait à s’inquiéter que son bel avion, détaxé par le Luxembourg, soit cloué au sol par une taxe sur le patrimoine en Belgique. Pourquoi pas sur les plus-values du capital tant qu’on y est ?

Depuis que les traducteurs ont corrigé leur erreur, Albert Frère comme Marc Coucke sont à nouveau d’accord avec le gouvernement Michel. Et ils soutiennent l’effort des autorités belges à repérer et sanctionner les fraudes. Avec une idée derrière la tête : l’argent ainsi épargné ou récupéré par l’état, c’est autant de fric en moins qu’il ira chercher dans leur poche.

Pour les distraits, Mr Coucke, c’est ce joyeux supporter du K.V. Oostende qui, histoire de se faire un peu de monnaie pour se payer des hot-dogs les dimanches de match, a refilé son entreprise pharmaceutique aux Américains. Près de deux milliards de dollars, aussi légalement exonérés d’impôt belge que si l’opération avait été blanchie par nos voisins grand-ducaux.

Apparemment, les journalistes d’investigation, toujours prêts à fourrer leur nez dans les paradis fiscaux des autres, n’ont pas encore repéré qu’il y en avait un juste sous leur nez.

Rien d’étonnant donc que le club des supporters de notre système fiscal-modèle se soit réjoui cette semaine de l’initiative du secrétaire d’état VLD Bart Tommelein. Pour débusquer les chômeurs co-habitants pirates, ce sous-ministre a eu l’idée d’assurer une surveillance systématique de leur consommation de gaz, d’eau et d’électricité.

Son observation est pertinente : lorsqu’un chômeur prend un bain, c’est autant d’heures qu’il ne passe pas à chercher un emploi. Et à quoi bon une douche s’ils ne travaillent pas ? La consommation d’eau est donc un excellent instrument pour repérer les profiteurs du système et les exclure des allocations.

Restera alors, une fois qu’ils seront devenus S.D.F., à créer un impôt sur la circulation des mendiants, une taxe autrement plus facile à recouvrer que celle sur les grandes fortunes dont on ne sait jamais où elles se cachent. Et drôlement plus populaire chez les électeurs de l’actuel gouvernement.

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AND THE WINNER IS …

La saison des prix littéraires coïncide curieusement avec la chute des feuilles. Façon de souligner la disparition de la lecture ? Allons ! Malgré Twitter et Facebook, pas encore en course pour les récompenses, le livre garde la cote.

A preuve, les awards décernés cette semaine.

Le prix « Trois Chambres à Manhattan» au président Obama. Il avait déjà perdu les deux premières. Voilà qu’il vient de perdre cette semaine la dernière, celle que son parti contrôlait encore.

Le prix « Au-dessous du Volcan » à Charles Michel qui ne sait plus trop que faire pour échapper à l’éruption sociale. Si la lave finit par l’emporter, restera peut-être de son gouvernement bizarre un Pompéi que visiteront les prochaines générations.

Le prix « Les Mains sales » à Théo Francken dont les mauvaises fréquentations peuvent avoir des conséquences sur sa santé (et la nôtre).

Le prix « Au cœur des ténèbres » à Bart De Wever dont les intentions cachées sont de moins en moins lisibles mais de plus en plus inquiétantes.

Le prix « Cent ans de solitude » à François Hollande, déjà lauréat du prix « La Saison des Pluies » l’année passée.

Le prix « Dix petits nègres » à Matteo Renzi qui aura réussi à éliminer un à un tous les acteurs de la politique italienne des vingt dernières années. On l’incitera cependant à ne pas céder à l’euphorie en lui rappelant qu’à la fin du roman, l’assassin meurt aussi…

Le prix « Les âmes mortes » à Didier Reynders et à Elke Sleurs, un prix réservé aux fossoyeurs chargés de la tâche redoutable de mettre en terre la culture et la science belges, tout ce qui restait de l’âme de notre pays. Vu le nombre de cadavres qui attendent à la morgue, certains ont proposé de scinder ce prix et de le rebaptiser « De Sang Froid ».

Le prix « Autant en emporte le vent » à l’ensemble de la classe politique pour appliquer après chaque élection les mesures qu’elle combattait avant.

Le prix « Vingt ans après » à Nicolas Sarkozy pour l’encourager à se re-re-représenter en 2027 après ses échecs de 2012, 2017 et 2022. Sa vengeance assouvie, il aura droit au prix « Le comte de Monte-Cristo ».

Le prix «Hurlevent » à Laurette Onkelinkx pour saluer son bel organe. Mais avec l’automne, qu’elle se méfie des coups de froid…

Le prix « Pour qui sonne le glas » à Angela Merkel, si fière de la puissance allemande, et dont l’économie paye cette fois les mesures d’étranglement qu’elle a imposées à ses partenaires européens.

Le prix « A la recherche du temps perdu » à Jean-Claude Juncker qui en aura bien besoin pour sauver ce qu’il reste du projet européen. Mais sa Madeleine a peut-être déjà atteint la date de péremption.

Le prix « Crime et châtiment » à Vladimir Poutine. Cette année, il n’a reçu que la moitié du prix. La seconde partie attendra l’an prochain, si tout va bien. Sinon, on le rebaptisera le prix « Crime et Crime ».

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D’ACCORD?

« Accord », quel beau mot, qui évoque la musique (censée adoucir les mœurs), le cinéma de Woody Allen (« Accords et désaccords », un de ses plus beaux films). En droit, l’arrangement entre des personnes en conflit, la paix. L’accord, c’est l’une des pièces maîtresses de la civilisation, de la vie en société, le rempart contre la barbarie.

Mais tout évolue, décidément. Même le sens du mot « accord ».

Maintenant, « accord » signifie : c’est comme ça et pas autrement. Et surtout on ne discute pas. Quand le père dit à son gosse : « Tu fermes la télé et tu fais tes devoirs, d’accord ? », cela n’est pas : devoirs ou télé, discutons-en. Mais : tu l’éteins cette fichue télé ou tu préfères une torgnole ?

En politique, les choses se passent un peu comme en famille.

« Tu la votes cette foutue loi, d’accord ? » dit le président de parti à un de ses parlementaires réticents. Cela signifie : c’est mon opinion et tu la partages, d’accord ?

Dès son entrée en fonction, le gouvernement Michel-De Wever applique cette nouvelle acception du mot « accord », pour prouver sans doute son extrême modernité – et faireb oublier la nostalgie vintage de deux de ses membres.

Ainsi des institutions culturelles et scientifiques fédérales.

D’un coup de plume, quelque part au milieu d’une nuit de négociations, l’un des Suédois a dû glisser : Ma femme me traîne toujours à l’opéra, moi qui déteste ça. D’abord, à l’entracte, il y a tant de monde qu’il n’y a jamais moyen d’atteindre le bar ! Et on leur donne du pognon ? a demandé un autre. Quelqu’un est intervenu. Attendez, c’est l’un des opéras les plus prestigieux du monde. On va pas discuter de la Castafiore jusqu’au petit matin, a conclu le chef négociateur. Plus de money pour la Monnaie, d’accord ?

C’est comme le Musée d’histoire naturelle, a enchaîné une Suédoise. Quelle galère ! Mes enfants m’ont cassé les pieds. Ils voulaient voir les dinosaures. Aucun intérêt, il n’y a rien que des os. Est-ce que c’est vraiment un spectacle pour les enfants ? Supprimons les doubles emplois ! Tout de même, est intervenu un type au bout de la table. Nos chercheurs sont parmi les plus… On supprime ce bête musée, d’accord ? a coupé le chef négociateur.

Et la Bibliothèque royale ? A quoi bon entasser tant de papiers à l’heure d’internet ? Quand Google aura numérisé tous les livres, son fonds ne vaudra plus un clou. Autant s’en débarrasser avant. C’est notre mémoire ! s’est écrié un vieux birbe. On a drôlement avancé cette nuit, a conclu le chef négo. On a supprimé la culture et la science. Avec ménagement, a murmuré son conseiller. Ces artistes ont des copains journalistes. Bon. 30 % de moins sur leur budget, d’accord ? Et les Suédois sont passés au point suivant.

Quand j’entends le mot culture, je sors mon revolver, d’accord ?

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