BABELAGE ET CLABAUDAGE

A la tribune du congrès de Vooruit, réuni pour approuver l’entrée du parti dans le nouveau gouvernement flamand, Conner Rousseau a critiqué Annick De Ridder, l’une des ministres à peine nommée de son nouveau partenaire, la N-VA, en la traitant de « Margaret Thatcher » (une terrible insulte). Conner Rousseau s’est comme d’habitude excusé en disant qu’il ne savait pas qu’il n’y avait des journalistes dans la salle !  

Ajoutant qu’il va réparer sa bévue en allant boire un verre avec Annick. Pauvre Annick ! Dieu sait ce qui l’attend à la fin de la soirée quand on connait le genre de propos qu’est capable de tenir le sale gamin quand il est pochetronné…

On se souvient qu’après avoir incité la police de sa commune à matraquer les Roms du coin, le parquet l’a obligé de suivre une thérapie pour prendre conscience du poids de ses propos, visiter la Caserne Dossin à Malines et dialoguer avec la communauté rom.

A quoi va-t-on le condamner cette fois ? A visiter la tombe de quelques anciens collabos flamingants sur laquelle se sont penchées quelques excellences de la N-VA ? Façon de mieux comprendre ceux qui dirigeront le gouvernement auquel s’est associé Vooruit ? A visiter quelques hôpitaux britanniques pour se rendre compte dans quel état Madame Thatcher a laissé les services publics ?

Il devait y avoir quelque chose de pernicieux dans l’air cette semaine puisqu’au même moment, voilà que le pape François, souriant et patelin, a brusquement dérapé à propos de l’égalité entre hommes et femmes avant de se lancer dans une diatribe ahurissante contre l’avortement et les médecins qui le pratiquent qualifiés de « tueurs à gage ». Il aurait dû se souvenir que Georges Brassens chantait « Sans le latin, la messe nous emmerde ». Au moins personne n’aurait déchiffré ou compris ses ineffables propos. Certainement pas les familles de ces femmes mortes avant l’adoption de la loi dépénalisant partiellement l’avortement du 3 avril 1990 ou dont la vie a été blessée.

Est-ce pour éviter tout dérapage du pape que les partis de la future majorité ont bloqué le projet de loi prolongeant le délai d’avortement ? Dans ce cas, messieurs-dames, c’est raté ! Dans le genre, François a fait mieux que Conner Rousseau.

Reste à imaginer quels travaux d’intérêt général le parquet va imposer au pape pour ses propos assassins. L’obliger à un chemin de croix sur la tombe de toutes les femmes brisées par un avortement clandestin ? Ou dire une messe en l’honneur du sénateur Roger Lallemand et de la sénatrice Lucienne Herman-Michielsens ? 

PS : sortie ce week-end de la nouvelle enquête de Michel Van Loo, détective privé, « Le Coucou de Malines » (éditions Genèse), un polar qui plonge dans la Belgique de 1957. 

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OU EST DONC PASSEE LA 7EME COMPAGNIE ?

 Vous dénoncez Israël ? Vous voilà accusé de vouloir la disparition de l’état hébreu, d’être antisioniste sinon antisémite. Vous dénoncez le Hamas et le Hezbollah ? Vous humiliez les martyrs de la cause palestinienne. Ne seriez-vous pas un agent sioniste ? Avec la guerre d’Ukraine, c’est tellement plus reposant : il y a un mauvais et une victime. 

Mais au Proche-Orient, Dieu s’est amusé à mélanger tous les pots de peinture. Impossible de savoir qui a commencé : les Juifs ? Ils se sont établis dans le pays de Canaan il y a plus d’une trentaine de siècles, fuyant l’esclavage en Egypte et le massacre des enfants hébraïques mâles, sous la conduite de Moïse – lequel est prophète révéré tant par les juifs et les chrétiens que par les musulmans. En voilà un qui serait bien utile pour le moment. Hélas, il est aux abonnés absents. 

Ou les Arabes sont-ils de droit sur le territoire, eux qui se sont emparés du pays, ont chassé les Byzantins et pris Jérusalem au VIIème siècle de notre ère ? Peut-être les Anglais qui ont monté les uns contre les autres, selon leur bonne habitude lorsqu’ils géraient la Palestine ? Ou alors l’ONU en votant la partition de la Palestine en deux états en 1947 ? Ou les états arabes qui ont essayé d’empêcher cette partition en lançant une guerre contre l’état nouveau-né d’Israël ? Arrêtons là cette chronologie. 

   A quoi ressemble la terre où coulait le lait et le miel et qui croule aujourd’hui sous l’acier et le feu ? A une région où toutes les populations souffrent sans que personne ne lève le petit doigt pour proposer la moindre solution diplomatique. 

Pourtant, s’agissant du sud Liban, il s’y trouve dix mille casques bleus, nourris et logés, que tout le monde semble avoir oubliés. Et dont l’entretien coûte aux Nations Unies (donc aux pays riches, donc à nous) plus de cinq cents millions de dollars par an. Des soldats indonésiens, ghanéens, népalais surtout mais aussi cinq cents Français. Déployés pour assurer le respect de la frontière entre le Liban et Israël (ah ! ah ! ah !)

Comment ont réagi les casques bleus quand le Hezbollah s’est mis à canonner le nord d’Israël depuis le 8 octobre, chassant plusieurs dizaines de milliers d’Israéliens de leurs foyers ? Puis quand les Israéliens se sont mis à répliquer chassant autant d’habitants du sud Liban vers le nord du pays ? Où donc est passée la septième compagnie ? 

Ils font aussi bien que leurs collègues au Rwanda quand a commencé le génocide ou dans l’est du Congo, à Srebrenica ou dans tant d’autres territoires en conflit où ils ne servent apparemment qu’à nourrir leurs familles restées au pays en évitant surtout de se faire remarquer. C’est humain, ils risqueraient d’être blessés et ça, ce n’est pas le destin d’un casque bleu. 

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LES BRUITS FROISSES DE L’AUTOMNE

  Et voilà l’automne ! Je vous entends grogner ça fait un an que c’est l’automne, le soleil c’est pour les autres et ce genre de fadaises. Cessez de vous plaindre. Voyez les gens du sud se réfugier chez nous vu que c’est notre pollution qui a transformé leur vie quotidienne en barbecue. Que d’eau ! Que d’eau ! s’écrient-ils ébahis en débarquant dans nos contrées, éblouis par le froid et le ciel gris, avant de se noyer dans les typhons, les tornades et les inondations de l’été.

  « Wir schaffen das ! » s’était écrié Angela Merkel en 2015, ouvrant les portes de l’Allemagne aux réfugiés syriens, irakiens, afghans qui voulaient échapper à la mort. Si les désordres climatiques s’accentuent, on espère que les dirigeants de ces pays voudront nous accueillir aussi généreusement… 

 Il est de bon ton de célébrer le printemps pour mieux enfoncer l’automne. Mais le printemps est-ce tellement mieux ? On exalte l’éveil du printemps en oubliant que la pièce de Wedekind qui porte ce titre (écrite en 1891) est d’une cruelle ironie. Elle dénonce l’étouffement de la jeunesse et de la sexualité dans l’Allemagne impériale. 

 Et le printemps arabe ? Autre cruelle ironie. Que reste-t-il du mouvement qui a soulevé les citoyens du monde arabe de l’Afrique du Nord au Proche Orient il y a une dizaine d’années ? Des aspirations à la démocratie, à la liberté des Tunisiens, Syriens, Yéménites, Algériens, Egyptiens ? Ce printemps a engendré ou renforcé des dictatures sanglantes qui n’ont rien à envier aux plus cruels régimes du vingtième siècle. Auxquels s’ajoutent le développement dans la région des pires mouvements terroristes qui écrasent d’abord les citoyens des pays dont ils se sont emparés et les mettent en pièces comme ce triste Liban dont il ne reste rien. 

 Ce bond en arrière de l’humanité a évidemment englouti les femmes. Le bâillonnement des femmes n’a jamais pesé depuis le début de l’époque moderne. Là-bas, la moitié de l’humanité est condamnée à rester enfermée sous cloche et sous voile, bouche cousue et volets clos. Est-ce le réchauffement climatique qui explique que, selon les dirigeants frappadingues de ces états, un mâle se jette immédiatement sur une femelle qui ose traverser la rue sans voile si elle n’est pas couverte jusqu’au bout des orteils ?  

# Me Too a bonne mine à Téhéran ou Kaboul. Où il est interdit aux mères de chanter une berceuse à leurs enfants. Et pas un seul de leurs fils ne crie pour qu’on libère sa maman de toutes ses chaînes ?  

 Oublions le printemps et célébrons plutôt l’automne. Avec Lichtenberg qui écrivait qu’à l’automne, l’homme raconte à la terre les feuilles qu’elle a  prêtées à l’été.

Et avec le délicieux poète Charles Cros : l’automne fait les bruits froissés de nos tumultueux baisers.

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LE GANG DES VIEUX FOURNEAUX

     Bien décidé à donner une fois encore un coup de mains à son vieux pote Donald Trump, Vladimir Poutine a lancé un important programme destiné à empêcher le vieillissement des cellules. Sa vice première ministre a vanté le développement de « technologies qui préviennent le vieillissement cellulaire, les neurotechnologies et d’autres innovations visant à assurer la longévité« . 

De quoi inspirer plusieurs albums supplémentaires à Lupano et Cauuet, les sarcastiques auteurs des « Vieux Fourneaux » (éd. Dargaud). 

Les recherches des scientifiques russes présentent de nombreux avantages. Elles vont permettre à une poignée de vieux survivants de la bataille de Stalingrad de reprendre les armes cette fois contre l’Ukraine. Rien ne vaut un vieux Bolchevique pour monter à l’assaut des ennemis du régime, de la Russie et du petit père des peuples. Pour combler le découragement des jeunes recrues qui se demandent pourquoi ils doivent abîmer leur jeunesse à conquérir quelques kilomètres carrés de trous perdus dans le Donbass. Un vieux Bolchevique ne se pose pas ce genre de questions ni aucune autre. 

Cette politique permettra à Vlad de mettre en garde son entourage et ses quelques opposants survivants qu’il vaut mieux oublier l’âge du capitaine. Il est parti pour régner encore un siècle ou deux. Les candidats à sa succession feraient mieux de changer de métier ou de pays. 

Vous me demanderez pourquoi le président russe, dont l’économie est au bord de l’implosion à cause des conséquences de sa guerre insensée et du coût terrible de la fabrication accélérée d’armes sophistiquées, est prêt à investir ce qui lui reste au fond des poches dans des labos scientifiques et les promesses de quelques savants fous. C’est qu’il parie que la science va lui permettre de gagner sa guerre et imposer la primauté de l’empire russe. Grâce à l’aide de Trump. Dont il obtiendra tout ce qu’il désire. 

En échange de quelques piqures du produit miracle et de l’assurance que plus personne n’osera évoquer son âge, le futur président américain sera prêt à arrêter l’aide aux ennemis de la Russie, à laisser les Européens se débrouiller sans le parapluie atlantique et à approuver toutes les politiques que son camarade de Moscou lui soufflera à l’oreille. Le prix n’est pas trop fort puisque Trump recevra la garantie qu’il présidera les Etats-Unis en conservant un cerveau pas plus dérangé qu’il ne l’est actuellement. Et surtout que ces remèdes miracles lui assureront une vie sexuelle débridée pour un temps illimité. 

Kamala Harris paraît pouvoir prendre l’ascendant sur son balbutiant adversaire. Mais c’est sans connaître l’arme secrète terrible qui risque de perturber les dernières semaines de campagne. Dire que Poutine a dit récemment qu’il aimait son rire. Quel faux derche !

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YACK ! YACK ! YACK !

  Le voyage officiel de Vladimir Poutine en Mongolie confirme une évidence que beaucoup de juristes feignent d’ignorer : le droit international est comme le droit de la guerre un oxymore, aussi utile pour régler une situation illégale qu’un marchand de frites qui voit passer un délinquant devant son kiosque. Encore que dans ce dernier cas, le marchand peut lui balancer de l’huile bouillante au passage, ce que le président mongol n’avait manifestement pas sous la main. Ce qui prouve qu’un mandat d’arrêt délivré par le Cour pénale internationale est aussi efficace que d’accrocher une plaque « chien méchant » à l’entrée de l’Hippodrome de Boitsfort (dans lequel nos nombreux amis canins gambadent librement entre joggers et cyclistes). 

On sent que Poutine commence à étouffer au Kremlin. Cela fait trop longtemps qu’il tourne en rond dans son palais. Et qu’il a soif de voir du pays.    

Rassuré par son séjour à Oulan-Bator, après un petit tour à dos de yack, en ricanant, le président russe pourra donc passer un de ces prochains week-ends à Budapest sans se faire trop de mouron. Depuis longtemps, la Perle du Danube a pour lui les yeux de Chimène. Avant de songer à réaliser son rêve de toujours, une visite à Bruxelles. 

Pas de danger de mettre les pieds dans notre capitale ? Soyez rassurés, monsieur le président. Vous ne risquez pas d’être arrêté au pied de l’Atomium. 

Faute de ministre de l’Intérieur en exercice et de ministre des Affaires étrangères (laquelle a quitté son ministère – en tram – pour siéger à la commission européenne), qui aurait le pouvoir d’exhiber un document venant de Hollande vous désignant comme l’ennemi public n°1 ? Dieu seul sait où est passé ce fichu papelard. Pour autant qu’on ait deviné qui avait le pouvoir de signer le recommandé venant de La Haye. L’aurait-on par erreur envoyé à un des gouvernements régionaux, peut-être communautaires, faute d’interlocuteurs en fonction au fédéral ? Allez savoir. 

Et Bart De Wever ? C’est la deuxième fois en quelques jours qu’on lui a promis-juré qu’il serait premier ministre. En attendant, il n’est encore personne tant qu’il n’a pas convaincu ses joyeux partenaires qu’il est l’homme providentiel et prêté serment devant le Roi des Belges en concluant que « l’union fait la force » – « eendracht maakt macht ».

Pour un city-trip aux Etats-Unis, Poutine voudra bien patienter jusqu’en janvier, après l’entrée en fonction de Donald Trump. Quoique, en attendant, il pourrait débarquer impunément à New-York pour se rendre à la tribune de l’ONU comme Fidel Castro en septembre 1960 sans que les autorités américaines ne lèvent le petit doigt.   

Néanmoins, je serais Poutine, je me souviendrais d’un proverbe mongol : « la porte fermée, on est empereur dans son royaume ».

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LE COUCOU DE MALINES

Il arrive en octobre 2024 !

 »  1957. La querelle linguistique entre Flamands et francophones gronde, alimentée par une campagne pour la réhabilitation des inciviques flamands condamnés à la Libération. 

 Chargé de la filature d’une jeune femme qui vit à Malines, Gertrude, le détective Michel Van Loo, accompagné par son amie Anne, la découvre poignardée dans le hall de sa maison. 

 Une mort apparemment sans mobile. Gertrude est une femme sans ennemis ni famille. Et dont le mari, Théo, a disparu dans les camps à la fin de la guerre. 

 Van Loo découvre qu’enquêter en Flandre est difficile pour un francophone de Bruxelles. Mais il s’entête. Et part à la recherche de son commanditaire, un certain Diego Bloemkool. Est-ce lui qui a fait éliminer Gertrude ? L’homme a mille visages et plusieurs vies, producteur de cinéma, patron d’une agence de bodyguard, mais pas d’adresse. Il fricote aussi avec un personnage, également inquiétant, grand amateur des peintres flamands du début du siècle.  

Cette enquête qui se déroule au milieu des convulsions politiques qui secouent la Flandre à la fin des années cinquante a aussi une odeur de peinture… « 

DECOUVRIR LE CHAPITRE 1 DU COUCOU DE MALINES

DENEUVE, AU SECOURS !

  Voilà le président Macron au pied du mur, contraint de chercher en quelques heures une solution à l’épouvantable casse-tête qu’il a provoqué. Repérer l’échelle de secours qui lui permettra d’échapper à la porte de sortie. 

 Dès dimanche soir, il sera confronté au dilemme le plus funeste depuis son entrée à l’Elysée, la nomination d’un gouvernement capable d’obtenir la confiance de la nouvelle assemblée parlementaire. 

Un facho à Matignon ? Non, plutôt s’exiler sur les bords de la mer Noire. Mélenchon ? Ciotti ? Plutôt choisir le Guignol du théâtre du parc du Luxembourg ! Dans ses propres troupes, il ne reste rien ni personne qui puisse recueillir les suffrages de l’assemblée.  

Toujours attiré par les idées astucieuses, Emmanuel Macron s’est écrié « Bon sang ! Mais c’est bien sûr » quand son gourou préféré lui a suggéré un subterfuge pour échapper à l’épouvantable classe politique française que les électeurs lui ont façonnée. Tourne-toi vers la culture, ô Jupiter, lui a-t-il soufflé. C’est ce que la France a de plus beau. Et c’est un remède sans égal à la politique. Une fois de plus, c’est la culture qui sauvera la France du K.O. et lui redonnera une âme.

Pensez donc. Avec Catherine Deneuve au ministère des Pensions, la nouvelle réforme qui fixera l’âge de la retraite à quatre-vingts ans passera comme une lettre à la poste. Sofia Aram en porte-parole fermera le bec de tous les imbéciles. On peut aussi songer à Brigitte Macron à l’éducation quand on voit ce qu’elle a fait de son Emmanuel. 

N’oublions pas l’aide de quelques brillantes bi-nationales, Virginie Effira ou Charline Vanhoenacker, pour faire taire les remugles maussades contre les étrangers. A moins de faire venir de Belgique un homme de gauche pour rassurer les xénophobes les plus agités, Conner Rousseau.

On devra se passer évidemment de quelques absents qui auraient pris une belle place dans le tableau, Victor Hugo ou Albert Camus. On regrettera aussi que le président Macron ait fait entrer Joséphine Baker au Panthéon. Elle aurait fait une première ministre éblouissante. Pourquoi pas désigner alors Kamel Daoud qui connait bien les pays au bord de la guerre civile et qui a réécrit « L’étranger » façon vingt et unième siècle ?  

Complétons le panel avec Adriana Karembeu aux sports, Carla Bruni aux affaires étrangères, assistée de la rédaction de Charlie-Hebdo tout spécialement chargée des relations avec le monde musulman. 

Avec pareille équipe, on est assuré de voir la France repartir comme en 40 (heu non, plutôt en 44…)

En proposant pareil remaniement, nul doute que le président Macron pourra proclamer fièrement Fluctuat nec mergitur (« Il est battu par les flots mais ne sombre pas ») – la devise de la ville de Paris…   

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LES LOUPS SONT ENTRES DANS PARIS

« Cessez de rire, charmante Elvire, cent loups sont entrés dans Paris » chantait Serge Reggiani. 

Après les Pays-Bas, qu’on croyait pays de la modération et même de l’audace politique et la Flandre, modèle de réussite économique et de culture, voilà la France prise d’assaut par une horde de personnages qui se flattent de laver plus blanc, menés par deux Le Pen pour le prix d’une (anticipant la saison des soldes), garanties blondes de la tête aux pieds et qui ont pris comme figure de proue une espèce de robot, rasé de près, fabriqué sur le modèle gendre idéal, blanc, bleu mais pas belge. Ledit personnage, Jordan Bardella, a réussi à la fois à se vanter de ses ancêtres immigrés italiens et à prôner la haine et le rejet des étrangers. 

Jamais les citoyens n’ont eu accès à autant de moyens d’information, jamais on n’a aussi bien réussi qu’aujourd’hui à leur vendre des vessies pour des lanternes. Les mensonges sur les méfaits de l’Union européenne et les fausses promesses sur le retour de la grandeur de l’empire ont mené au Brexit dont les Anglais constatent les conséquences catastrophiques. Cette expérience désastreuse n’a manifestement pas servi de signal d’alarme aux autres citoyens européens, qui se précipitent avec le même aveuglement de moutons vers les prometteurs de ces beaux jours où on ne verra plus que des blondes dans les rues.  

« Les hommes avaient perdu le goût de vivre et se foutaient de tout » chantait encore Reggiani. 

Rassemblant les nostalgiques des Pieds nickelés, des Branquignols et des bras cassés, en donnant aux franchouillards l’illusion de retrouver un pays de cocagne aussi imaginaire que le Royaume-Uni version Boris Johnson et Nigel Farage, quelque part entre le domaine rêvé d’Harry Potter et les caricatures de Punch. 

Les loups pointent le museau chez nous tandis qu’un gigantesque ours remue la queue de façon de plus en plus agressive à l’est. Décidément, le zoo européen prend des allures de jungle. Un panneau à l’entrée interdit pourtant de nourrir les animaux sauvages. 

Si, par malheur, la folle loterie déclenchée par le président Macron tournait à la foire aux boudins, notre futur Premier va devoir gérer un sacré casse-tête : que faire des milliers des Français qui vont demander l’asile politique en Belgique ? On voit déjà le Vlaams Belang se lécher les babines. Des étrangers ? Et qui parlent français ? Amaï ! A moins de les enfermer en Wallonie et de proclamer l’indépendance de la région, pour en faire une France bis comme Taïwan par rapport à la Chine communiste…

PS : la réintroduction (imaginaire) des loups en Ecosse est le thème d’un sublime roman de Charlotte Mac Conaghy « Je pleure encore la beauté du monde » récemment paru aux éditions Gaïa.

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TOP JOB

Et de se battre comme des jeunes chiots pour décrocher un « top job » … 

Pour parader à la tête du carrousel européen, c’est à qui décrochera la floche. Ursula von der Leyen est prête à enterrer le pacte vert et à s’associer à la redoutable diablesse de Meloni (la descendante du parti de Mussolini) pour sauver son beau fauteuil de présidente, avec la même absence de scrupules que le minable Eric Ciotti en France pour garder son siège en donnant le baiser de la mort aux descendants du parti de Jean-Marie Le Pen. Mais que donner en échange ? Pour vendre son âme, il faut en avoir une…

On nous avait répété qu’après la chute du Mur de Berlin, les idéologies étaient mortes. Mais à ce point… Macron avait habilement joué sur ce registre en 2017 en prétendant qu’il n’y avait plus ni droite ni gauche – mais seulement lui. Sept ans plus tard, on se rend compte des dégâts. 

Les citoyens ont envie et besoin d’un souffle et pas seulement de réformes socio-économiques. Ce qui est une des explications du succès des partis qui agitent des programmes irréalisables et catastrophiques pour leur pays mais qui donnent aux électeurs l’impression que leur monde va changer : expulsion des immigrés, haine des autres, c’est la rengaine la plus facile à susurrer pour se faire élire, Vlaams Belang, Front national, PVV, AfD, Fidesz, Fratelli d’Italia. Que la recette est simple, saperlipopette !   

Ce n’est donc pas pour mettre en œuvre des idées nouvelles que l’on s’arrache les top jobs dans la capitale de l’Europe. Dire qu’il y a même des candidats qui se disputent âprement pour succéder à Charles Michel ! Or, à part l’impressionnante mention sur leur carte de visite de « président » à quoi a donc servi le job de notre ex-Premier ? A tenir l’agenda des réunions des chefs d’état (vous êtes libre vendredi prochain ? Ah ! Mais le président lituanien est au baptême de son fils et le premier ministre allemand en visite en Corée. Jeudi alors ? Non, Macron fait une conférence de presse). Et à voyager interminablement tout au long de la planète pour figurer sur la photo qui sera oubliée deux jours plus tard. Que retiendra-t-on de la présidence de ce pauvre Michel, sinon le sofagate ? 

Ursula von der Leyen avait bien commencé, bien mieux que ses deux piètres prédécesseurs, mais que de renoncements à la fin pour se faire réélire… Ne parlons pas de Josep Borrell, le « haut représentant pour les affaires étrangères » qui n’a pas contribué à régler une seule des crises de son quinquennat, même la réunification de Chypre, pourtant état européen toujours déchiré par l’occupation turque. 

Top Gun sert à former des pilotes, ce qui devient utile par les temps qui courent. Mais décrocher des top jobs, à quoi ça sert s’ils ne permettent pas de sauver la planète, même pas la vie d’un seul homme ?

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VITESS’KE

  Aussitôt connue la défaite de son parti aux élections européennes, le président Macron a dissous l’Assemblée nationale et convoqué fissa des élections législatives dès la fin du mois pour remeubler le Palais-Bourbon de frais. De l’air ! De l’air ! Sauf que le frais peut s’avérer glaçant si les électeurs remettent le couvert et reproduisent le menu écœurant de dimanche dernier. Peu importe, pense le président français qui parie que rapidité et réactivité peuvent tenir lieu de programme pour sauver les meubles brinquebalants de sa majorité déjà relative. De toute façon, qui dissèque les promesses politiques ? On s’informe sur les réseaux sociaux où tout est blanc ou noir et où les engagements politiques doivent avoir moins de deux cent cinquante caractères pour être lus. 

  Vite, vite ! clament aussi les vainqueurs des élections belges. Un Bouchez survolté et un De Wever qui essaye de balayer tout ce qui peut faire obstacle à ses ambitions de diriger le pays se sont lancés dans la formation d’un gouvernement avec moteur turbo. 

On a suffisamment déploré la lenteur des précédentes négociations pour leur reprocher de constituer une équipe avant la Saint Glin-Glin. Mais, si on prend le temps de réfléchir, on se demande quel programme peut réunir le libéral belgicain unitariste et le séparatiste flamingant. Et si c’était justement l’absence de programme qui les rapprochait ? 

Une photo des deux champions dans leur beau costume sur Instagram, un faux dialogue complice sur Tik Tok, quelques jolies formules frappées au coin du bon sens, le tour est joué et les citoyens embobinés. Ils n’en demandent d’ailleurs pas plus. Ils ont compris depuis longtemps que les promesses n’engagent que ceux qui y ont cru. 

Un gouvernement d’abord et un programme le plus tard possible – juste avant la prochaine échéance électorale par exemple, voilà qui devrait satisfaire le bon peuple. Car à quoi bon négocier une interminable feuille de route comme à la formation de la Vivaldi, si c’est pour la laisser au placard ? Nos vainqueurs ont bien compris qu’à notre époque, le citoyen veut qu’on aille le plus vite possible. Dans quelle direction ? Peu importe. Pourvu qu’on y coure. N’est-on pas à la veille des jeux olympiques ?

On comprend qu’avec cet état d’esprit, les plaies majeures qui déchire l’Europe ne sont plus à l’ordre du jour. Le pire du réchauffement climatique n’arrivera que dans cinquante ans. Au dernier moment, il se trouvera bien un politicien qui promettra de le régler à tout berzingue et des citoyens prêts à le croire sur paroles. Quant à la guerre d’Ukraine, elle commence à casser les pieds. Si les Ukrainiens continuent de traîner les pieds sans parvenir à repousser les Russes, c’est sûr qu’ils vont perdre le soutien d’une partie de notre opinion publique. On ne plébiscite que ceux qui agite « vitess’ke » comme slogan.  

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