GAI, GAI, MARIONS-NOUS !

Jadis, la paix civile était – plus ou moins- garantie par les mariages. Le gamin du roi d’Espagne pas encore pubère épousait la fille du roi de France à peine bébé. Celle d’Autriche-Hongrie était promise au futur tsarévitch. Si ça n’a pas empêché la guerre de cent ans, la guerre des roses entre les York et les Lancaster ni la guerre de la marmite le 8 octobre 1784, beaucoup d’autres conflits ont été étouffés dans l’œuf ou plutôt sous la couette.

Depuis un siècle, les alliances matrimoniales, jugées trop ringardes, ont été remplacées par plus moderne, plus sérieux et plus républicain, l’ONU, la communauté internationale, les G5, 6, 7, 9 et les gros yeux des présidents américains. Las ! On est au bout de ce modèle. Les petits voyous n’ont plus peur des grandes puissances. Les Etats-Unis sont embourbés depuis près de vingt ans par quelques milliers de talibans afghans qui vivent comme leurs aïeux au moyen âge mais qui sont équipés d’armes belges. Et le ridicule dictateur coréen ? Il éclate de rire quand Trump lui tape sur la tête avec son Twitter. Quant à Kabila, il a déconnecté internet et le téléphone. De toute façon, il n’y a plus d’électricité dans le pays. Ni dans les prisons ni les morgues.

Alors, si on en revenait à la bonne vieille formule des mariages ? La paix du monde grâce à la paix des ménages !

Commençons par le pire, le Moyen Orient. Voilà un siècle que la terre de la Bible et du Coran se meurt dans un désordre sanglant que rien n’a pu arrêter. Les haines et les intérêts ont définitivement tout brouillé. Seule solution, rebattre les cartes. Imaginez Ivanka, la fille de Trump, convolant avec le fils de l’ayatollah Khamenei. Du jour au lendemain, les fondements de la république islamique seraient chamboulés. Plus fort et plus explosif que l’accord sur le nucléaire ! Cérémonie à Téhéran, cocktail à Tel Aviv et voyage de noces dans les ruines antiques en Syrie.

Pour le bouillant fils du roi d’Arabie saoudite, on suggère un speed dating avec l’élégante épouse du président Assad (le Coran l’autorise) pour rééquilibrer les alliances au Moyen Orient ou les brouiller définitivement.

Autre mariage en vue : Ecmettin Erdogan junior avec la fille de Théo Francken. Une belle fête à l’hôtel de ville de Lubbeek puis dans la mosquée provisoire érigée sur le parking de l’église Sint Martinus. Cadeau dans la corbeille, papa Erdogan offre à tous les réfugiés de Belgique un séjour gratuit en Anatolie en aller simple. De quoi régler définitivement tous les soucis du papa de la mariée. Eviter les rapatriements au Soudan. Et débarrasser la Belgique de ces encombrants voyageurs.

Seul problème : à quoi servirait alors un secrétaire d’état à l’asile et à la migration ?

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QUAND LA COP DEBORDE

 

Avez-vous lu la réponse d’Angela Merkel à Donald Trump? Il s’en frotte encore les yeux. Quoi, une femme, une Allemande, une communiste, traiter ainsi le maître du monde ?

Ah ! Ce n’est pas sous Reagan qu’on aurait assisté à une scène pareille ! Ni sous Staline, soi-dit en passant. Pendant cette bonne vieille guerre froide, chacun restait chez soi. Les Américains critiquaient les Américains, les Français critiquaient les Français et les Russes cassaient des cailloux en Sibérie.

Avec la chute du mur, faut être honnête, tout a commencé à se déglinguer. Pouvaient pas attendre que Trump ait paisiblement achevé son mandat pour le faire tomber, ce sacré mur ? On aurait eu une présidence américaine normale avec des alliés occidentaux obéissants, des terroristes tenus en laisse par Moscou et aucun risque de réchauffement climatique.

Depuis la réunification allemande, c’est le bordel. L’Allemagne est plus riche que les Etats-Unis, où elle exporte toute sa cacaille. Elle n’hésite pas à accueillir des réfugiés, même des Noirs et des Arabes. Et elle n’a aucun complexe d’être dirigée par une femme formée par les cocos.

Que les Allemands de l’Ouest ouvrent des soupes populaires pour leurs voisins de l’Est, les Ossis, d’accord, mais qu’ils en fassent des ministres ou des chanceliers ? C’est franchement Covfefe ! Et c’est un euphémisme.

Ne pouvaient-ils pas attendre que les Ossis apprennent d’abord les rudiments de la démocratie, qui consiste, article 1, à honorer les Etats-Unis qui les a libérés, article 2, à obéir à son président, leader du monde libre ?

Non, ce n’est pas sous Reagan qu’un dirigeant européen aurait ouvrir le bec. Reagan, malgré son onctuosité, aurait prié les députés allemands de changer illico de chancelier. Ou envoyé quelques boys régler la question. La démocratie ne s’use que quand on s’en sert.

Vraiment, il n’a pas de chance, Trump. Ses prédécesseurs n’avaient pas besoin de mettre du sable dans le moteur européen. Les dirigeants de l’Union s’arrangeaient bien entre eux pour démolir l’Europe chaque fois qu’elle semblait se bâtir un peu trop haut. Or, ne voilà-t-il pas que Merkel se pique de remonter un mur européen contre les Etats-Unis (le mur de l’Atlantique tant qu’on y est) ?

Trump est prêt à renoncer à exiger des Mexicains qu’ils se construisent une prison. A condition qu’en échange, ils aillent reconstruire un mur à Berlin. Il est même prêt à aider les cocos  à reprendre le pouvoir à Moscou et surtout dans la moitié de l’Allemagne. Comme à l’époque où le monde était tellement plus facile à comprendre. Et que le soleil, même lui, obéissait aux présidents américains et ne se mettait pas à chauffer les cerveaux des autres dirigeants de la planète.

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CANARD A L’ORAGE

Où bat le pouls de l’opinion publique ? Sur Twitter ? La pensée s’arrête à 150 caractères (souvent de mauvais caractères). Même si cela peut avoir des effets positifs : la passion frénétique de Donald Trump pour cette messagerie annonce que ses mémoires seront brèves, beaucoup plus brèves que les énormes pensums que nous ont laissés la plupart de ses glorieux prédécesseurs.

Sur les réseaux sociaux ? C’est le festival des fausses nouvelles, le rendez-vous des membres du club des complotistes et des malades souffrant du syndrome de la Tourette (un mal qui se caractérise par la production incontrôlée de grossièretés et d’obscénités).

Reste les journaux. Cela fait, paraît-il, vieux jeu de se promener, un journal sous le bras. Pour ne pas passer pour un schnoque, on le lit maintenant en cachette comme jadis les revues pornos.

Pourtant, depuis quelques mois, désolé pour les obsédés de l’écran tactile, les accrocs au web, et à Facebook, c’est le retour en force de cette bonne vieille presse écrite. Vous savez, ces grandes feuilles imprimées qui tachent un peu les doigts et dans lesquelles on emballe les épluchures de pommes de terre et jadis les restes des poissons.

Où a-t-on découvert les Panama Papers ? Dans les journaux (dont votre quotidien favori). Et les coins sombres de l’âme de François Fillon, le père La Vertu qui donnait des leçons de civisme et de morale à ses concurrents ? Dans « Le Canard Enchaîné », une gazette qui, peu ou prou, n’a guère changé depuis la première guerre mondiale !

C’est un journal qui a chamboulé la campagne électorale française. Même en se produisant dans plusieurs villes simultanément en hologrammes genre Disneyland, Mélenchon n’a rien fait pour révéler le vrai visage de Fillon. C’est un petit palmipède qui a flanqué à l’eau le héros du mouvement Sens commun. Ce sont aussi les journaux qui ont rendu compte des péripéties judiciaires de la fifille à Le Pen et du contenu de ses sombres placards.

Il n’est pas difficile de comprendre pourquoi les régimes de Poutine et d’Erdogan ont tout fait pour éliminer les journaux d’opposition et quelques-uns de leurs journalistes. Dans certains pays, le plomb se met dans la tête et pas seulement dans les caractères d’imprimerie. Comme le disait Pierre Nora : « Le vrai journaliste est celui vend la mèche en se brûlant les doigts. »

D’accord, les gazettes ne publient pas que des scoops qui servent la démocratie. Ils racontent aussi des histoires, font parler les stars et nous abreuvent de faits divers croustillants. Mais, avouez que vous aimez ça. Et vous avez raison. Tristan Bernard l’avait résumé en une jolie formule : “Un journal coupé en morceaux n’intéresse aucune femme, alors qu’une femme coupée en morceaux intéresse tous les journaux.”

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BABY NEIL

Violentes manifestations sur le campus de Berkeley (Californie) pour empêcher un proche de Trump de prendre la parole à la tribune de la célèbre université. Les forces de l’ordre ont dû intervenir et déployer les grands moyens.

1967 ? Non, 2017 ! Comme pour fêter le jubilé des démonstrations contre le président Lyndon Johnson. A l’époque, la révolte d’une partie des Américains n’a pas empêché l’élection à la fin de cette année-là de Richard Nixon mais le mouvement finira par porter ses fruits. Nixon sera emporté avant la fin de son mandat. Non sans avoir dû boire auparavant le vin jusqu’à la lie en négociant, la mort dans l’âme, la fin de l’engagement raté des Etats-Unis au Vietnam.

Coïncidence, c’est justement en cette même année 1967 qu’est né Neil Gorsuch.

L’homme que Donald Trump  vient de nommer au siège vacant de la Cour suprême pour faire basculer la Cour dans le camp des partisans des thèses juridiques et éthiques les plus réactionnaires. Favorable à la peine de mort, opposé à la limitation des armes, à l’avortement et même à la contraception, Neil Gorsuch se flatte d’être un excellent pêcheur mais c’est le genre qui ne remet jamais ses prises à l’eau. Jamais.

On ne sait comment vivaient ses parents quand est né Baby Neil. Portaient-ils les cheveux longs ? Des colliers de fleurs ? Ont-ils défilé contre la guerre du Vietnam ? Manifesté pour le droit à l’avortement que la Cour suprême allait légaliser en 1973 ? A-t-il grandi, bercé par les odeurs de fumette ?

En tout cas, sa mère a été la première responsable de l’Agence de protection de l’environnement, une agence que Trump songe à supprimer. Au passage, on se dit qu’on aurait tort de comparer Trump à Reagan. Car c’est lui qui a nommé la maman de Neil. Il est vrai que Reagan a conservé quelques réflexes de son passé démocrate et peut-être de ses rôles dans les films très « libéraux » de son réalisateur fétiche, Allan Dwan.

On ne manquera donc pas de penser que, devenu grand garçon, Neil G. a voulu couper le cordon ombilical et effacer l’esprit de ses années de jeunesse. Retour vers le futur…

Entretemps, devenu un éminent juriste, il s’est attaché à défendre ce qu’on appelle une « lecture originelle » de la Constitution américaine. Selon lui, le texte fondateur ne peut se lire  que tel que les pères fondateurs l’ont établi en 1787 sans être interprété ou adapté à l’évolution de la société (or, c’est ce qui avait permis à la Cour de légaliser l’avortement). Ca promet !

L’ancien président Obama a des cheveux gris à se faire. Si son sort et ses droits sont revus à la lumière des règles de vie de la fin du dix-huitième siècle, il n’est pas certain qu’il puisse longtemps jouir de la jolie propriété où il s’est retiré à Washington à moins d’y travailler comme cireur de chaussures.

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LA VIE EST UN ROMAN

Commençons par un jeu. Qui a dit : « Si c’était vrai, cela ne pourrait pas être faux. Et, en admettant que ce fût vrai, cela ne serait pas faux. Mais, comme ce n’est pas vrai, c’est faux » ?

Est-ce Paul Furlan devant sa collection de casseroles ? Stephane Moreau au sujet de ses juteuses rémunérations dans Publifin et officines annexes ? Ou Benoît Hamon à propos de ses contorsions sur l’égalité entre hommes et femmes ou le port du voile dans la région dont il est député ?

La réponse est : Lewis Carroll dans « Alice au Pays des Merveilles » (publié en 1865). Un livre si riche qu’il peut aussi se lire comme un pamphlet sur l’art de discourir de nos politiciens, leur soif du pouvoir, leur folie et leur arrogance. Quand la Reine s’écrie à tout bout de champ : « Qu’on lui coupe la tête ! » le lecteur d’aujourd’hui ne pensera-t-il aussitôt à Trump, Erdogan ou Poutine ?

Et lorsque la Duchesse dit avec un grognement rauque : « Si chacun s’occupait de ses affaires, le monde n’en irait que mieux », ne songe-t-on pas automatiquement une fois de plus à Donald Trump mais aussi à Marine Le Pen ou aux rodomontades de notre secrétaire d’état Théo Francken ?

Il ne faut pas croire que les artistes sont des devins, des émules de madame Soleil. Ils lisent  beaucoup mais rarement dans le marc de café. Ce sont les politiciens qui, à court d’idées cherchent désespérément dans les bouquins, les B.D. et les scénarios quoi dire de neuf à leurs pauvres électeurs. Et qui s’efforcent de ressembler de plus en plus à des personnages de roman ou de films.

Regardez Trump à nouveau. Dans son discours d’investiture, il n’a pas n’hésité à glisser des phrases directement puisées dans les dialogues du film « Batman » de Christopher Nolan.  C’est la harangue de Bane, le méchant du film, qu’il plagie, lorsqu’il s’engage à  transférer le pouvoir de Washington « pour le donner, à vous, le Peuple ! »
On comprend que les ventes de l’angoissant roman de George Orwell « 1984 », qui avaient déjà été boostées par les révélations de Snowden sur l’existence des systèmes mondiaux d’espionnage, aient explosé depuis l’élection du quarante-cinquième président. Il existe en effet une correspondance troublante entre les déclarations de sa conseillère, Kellyanne Conway qui défend l’idée qu’il existe des « faits alternatifs », une autre vérité que la vérité, et G. Orwell lorsqu’un de ses personnages s’écrie : « Le Parti vous dit de rejeter le témoignage de vos yeux et de vos oreilles. C’est son commandement ultime, et le plus essentiel.”

Peut-on suggérer que la légende sous les photos officielles du nouveau patron de la Maison Blanche soit « Ceci n’est pas un président » ? Ce serait un excellent apport de l’art belge à la nouvelle politique américaine.

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L’ ÂGE DE GLACE

On nous parlait tant du réchauffement climatique qu’on avait failli par y croire. Mais Trump et Poutine viennent de nous prouver qu’on avait tort d’écouter les Cassandre. On ne vogue pas vers les douces chaleurs tropicales; on replonge dans l’âge glaciaire. Alep, c’est l’âge des cavernes, avant que les hommes ne se mettent à couvrir les grottes de dessins, premières marques de la civilisation. La Syrie, c’est le mammifère avant Lascaux. Avant le développement du cerveau.

Seule consolation : si les glaces reviennent, on va échapper à la guerre froide. Russes et Américains sont d’accord pour se faire des tongkus à la mode soviétique de jadis. A cette époque, les chefs des deux grandes puissances avaient installé un téléphone rouge entre leurs capitales pour éviter tout malentendu.

« Allo ? Excusez-moi, tovaritch, je préfère vous avertir. Un pilote militaire américain devenu fou va jeter une bombe nucléaire sur Moscou et je ne suis pas capable de l’arrêter.

– Merci de m’avoir appelé, camarade Président. Mais j’ai vu le film « Docteur Folamour » et je sais que vous aimez plaisan… Oh ! Mon Dieu ! »

Cette fois, Trump a fait mieux. Il a nommé à ses côtés, à la tête des Affaires étrangères, Rex Tillerson, un représentant personnel du président russe qui pourra lui dire, chaque fois qu’il aura une décision à prendre, si elle convient ou non au président Vlad. Mieux vaut prendre les devants que d’essuyer les dégâts après coup dans une désagréable conversation téléphonique qui vous donne mal à l’estomac et vous gâche votre soirée au coin du feu.

« Dites-moi, mon cher Rex, que pensez-vous de ça : les Estoniens me supplient d’envoyer une des petites brigades de l’OTAN vagabonder sur les plages de la Baltique, du côté de Tallinn ?

– Vlad ne sera pas content, président. Pas content du tout. Si nos soldats ont des fourmis dans les jambes et rêvent du bord de mer, pourquoi ne pas leur proposer un séjour dans une île du Pacifique ? Il y fait beaucoup plus chaud.

– Justement, Rex. Avec la montée des océans, ne risquent-ils pas d’avoir bientôt de l’eau jusqu’aux épaules ?

–  Mais, avec votre arrivée à la Maison blanche, monsieur le Président, la planète a arrêté de se réchauffer.

– Bon sang ! C’est vrai ! Où avais-je la tête ? »

Le bon Rex n’aura d’ailleurs pas d’autre activité que d’assurer la liaison entre Moscou et Washington. Dans un souci de simplification qui rend la politique beaucoup plus compréhensible aux Américains moyens, le président élu a décidé de se partager les tâches avec son homologue russe. A lui la politique intérieure. A Poutine, la politique extérieure. S’il n’y a plus qu’un seul maître du monde, comment pourrait-il encore y avoir des conflits ? Alléluia !

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KIRK FOR EVER

Happy Birthday, Kirk ! Né de parents immigrés, qui ne parlaient pas un mot d’anglais à leur arrivée aux Etats-Unis, Kirk Douglas restera pour l’éternité le modèle de l’Américain idéal, prêt à se battre seul contre tous pour la liberté, la démocratie, la tolérance, la culture. Il a lui-même produit plusieurs des meilleurs films dans lesquels il incarne ce genre de personnage, prêt à tout pour défendre ses valeurs, Spartacus, Les Sentiers de la Gloire, Règlement de comptes à OK Corral.

Pour l’éternité ? Pas sûr. Kirk qui ? me demandait une jeune avocate quand j’évoquais les Sentiers de la Gloire. Et de quels Sentiers parles-tu ?

Pendant la campagne électorale, Kirk Douglas, qui s’est battu contre Trump a raconté qu’il se rappelait des réactions de beaucoup de gens à l’arrivée d’Hitler au pouvoir (il avait seize ans). « Pendant près d’une décennie, on s’était moqué de lui. On le considérait comme un bouffon dont le nationalisme haineux n’emporterait jamais l’adhésion d’un peuple instruit et civilisé. » Or, voilà qu’en entendant un discours prononcé par Trump dans l’Arizona, ses mots lui ont fait « froid dans le dos, à lui, et à sa femme, Anne, qui a grandi en Allemagne, des mots qui semblaient tout droit sortis de 1933 ».

« Un peuple instruit et civilisé ». Retenez ces mots. Il y a quelques jours, un professeur de sciences politiques de l’ULB m’a avoué qu’une partie de ses étudiants n’a jamais entendu parler de Mussolini et certains même de Hitler. Heureusement que cette chère Pisa a interrogé les ados de quinze ans plutôt que des étudiants universitaires, sinon quelle serait la place de la Belgique dans son classement ?

Emmanuel Macron a dangereusement surestimé les électeurs français en s’écriant : « cette primaire, c’est OK Corral ! » A part les vieux abonnés du Ciné-club de Minuit, qui l’aura compris ? J’exagère ? Reprenez une tranche du rapport Pisa. L’état des connaissances de nos jeunes est dur à digérer même pour la sémillante ministre par Marie-Martine « Belles Crolles » Schyns qui croit fermement en l’avenir de l’humanité en générale et des jeunes pousses wallonnes de quinze ans en particulier.    

Mais, la matière grise semble dans nos régions suivre la pente dangereuse de nos matières premières : la veine s’épuise. Savoir qui est Kirk Douglas ne sert à rien. Pas plus que d’avoir une idée sur la Blitz-carrière du Führer. Pour la plupart d’entre nous, les maths ne servent pas non plus à grand-chose. Ni la théorie des quanta ou le tableau de Mendeleïev. Pas plus que ceux de Picasso ou de Hopper. Sauf que c’est avec tous ces savoirs et ces émotions inutiles qu’on fabrique « un peuple instruit et civilisé ». Un être humain, c’est beaucoup d’eau, une goutte de vin et plein de choses inutiles. Sans ces choses inutiles, il devient un robot.

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LES GAIETES DE L’ESCADRON

C’est la fiesta chez Jupiler. Surtout qu’on y faisait grise mine depuis la suppression des 24 h. vélo de Louvain-la-Neuve et la version anémique du baptême à l’U.L.B. On sentait vaciller l’entreprise favorite des supporters de football et des électeurs perdus de Michel Daerden, peut-être même sur le point d’être mise en bière. Mais l’horizon éthylique vient miraculeusement de se dégager grâce au projet de rétablissement du service militaire obligatoire, plébiscité par quatre jeunes Belges sur dix, d’après un sondage de la RTBF. Les jeunes veulent, parait-il, à nouveau goûter aux bienfaits de la culture (du houblon).

C’est sans doute la raison pour laquelle le groupe annonce dans ses objectifs pour la prochaine décennie qu’il souhaite « augmenter les connaissances en matière d’alcool » de la population. Tous ceux qui ont connu jadis les gaietés de l’escadron savent en effet que l’activité principale des miliciens, dans une égalité sociale que personne n’a jamais réussi à reconstituer depuis, consistait à se noircir matin, midi et soir. Le temps est long en attendant l’ennemi qui me fera héros.

Qu’il est doux le son du clairon, le bruit des bottes qui marchent au pas, qu’il est rassurant d’obéir à des ordres sans les comprendre ni les discuter. Tellement moins angoissant qu’étudier ou passer des examens.

La génération des 18-34 ans en a assez des révolutions rêvées par leurs parents et grands-parents, de la remise en question des valeurs qui ont fabriqué la société occidentale et des bricolages politiques qui l’ont déglinguée. De contempler ce joli début de siècle, rythmé par des guerres atroces, des réfugiés par millions, terrorisme, chômage, et tout ça.

Les jeunes ne sont pas les seuls à chercher le bonheur dans un retour vers le futur plutôt que d’imaginer et de construire une société nouvelle. Et d’imaginer que tout ira mieux en retrouvant les fondamentaux vintage que leurs aînés ont balayés : église, armée, suprématie de l’homme blanc propre sur lui.

En Russie, le poids de plus en plus fort de l’église orthodoxe ramène le pays aux douces années de l’époque bénie des tsars. Aux Etats-Unis, des électeurs déboussolés se réjouissent que Trump va leur « rendre » une Amérique blanchie. En France, François Fillon, jadis compagnon des gaullistes de gauche, sentant l’air du temps, a opportunément arraché quelques pages du programme du FN, rappelé ses réserves sur l’avortement, promis de mettre les fonctionnaires à la porte. S’il est élu, il s’engage à nommer Michel Debré premier ministre et Antoine Pinay à l’économie. Avec les progrès de la science et de la photocopieuse 3-D, tout est désormais possible. Même une plongée rafraichissante dans Jurassic Park.

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L’ AN 01

En ce vingt janvier 2018, la Maison blanche brûle de mille feux. On fête aujourd’hui la première année de l’accession au pouvoir du président Trump.

Dans le boudoir, où son serviteur noir l’aide à s’habiller, le milliardaire s’impatiente.

– Passe-moi mon pantalon un peu plus vite que ça, enfoiré de Barack ou je t’envoie sur le chantier du mur des Mexicains fissa !

– Je ne m’appelle pas Barack, m’sieur le président. Mon nom est William.

– William ? Ca tombe bien. Tu sais ce qu’il a dit ton glorieux ancêtre britannique ? « Être ou ne pas être ». Ou bien, tu veux rester ministre de l’intérieur ou tu préfères rejoindre tes copains chicanos. Mon nœud papillon, maintenant. Non, le rouge.

– Quand vous m’avez nommé au gouvernement, vous ne m’aviez pas précisé que je devais vous aider à vous habiller.

– A quoi tu crois que ça sert le ministre de l’Intérieur, Barack ? Pour gérer le pays, on a les flics. Le ministre de la Santé s’occupe de botoxer ma femme. Et le ministre des affaires étrangères d’empêcher les étrangers de s’approcher de moi.

– Mais qui s’occupe alors des rapports avec les autres états ?

– Quels rapports ? Je n’ai de rapports qu’avec des femmes blanches américaines.

– Et le reste du monde, alors ?

– C’est la première réussite de mon magnifique bilan. Depuis que les Etats-Unis ont ramené nos boys au pays, la Russie et la Chine s’épuisent à dépenser des milliards de dollars pour essayer de gérer la planète. Poutine a beau avoir annexé le reste de l’Europe, c’est le bordel partout avec les petits chefs locaux qu’ils ont nommés. En Wallonie, le président Hedebouw se fait remonter les bretelles par les terroristes du Front Paul Magnette. En France, où cet enfoiré de Popov a parachuté une femme (une femme !), Marine Le Pen, ils sont au bord de la guerre civile. En Allemagne qu’ils ont cru malin de rediviser, ils sont obligés de reconstruire un mur. Je leur fournirai de la main d’œuvre quand elle aura terminé de bâtir le mien. Et qui vend des armes à tout ce beau monde ? J’avais promis que l’industrie américaine allait s’emballer. Encore une promesse tenue !

– Même aux Etats-Unis, vous avez fait bien des mécontents, m’sieur le président. Vous vous en rendez compte ? Vous devriez être plus prudent si vous voulez décrocher un second mandat.

– Tu mets mes chaussettes à l’envers, bougre de Barack ! Justement, depuis que le Congrès a aboli le droit des votes des abrutis, ma moumoute n’a pas de cheveux gris à se faire !

– Priver de vote les femmes, les Noirs, les homosexuels et les Hispaniques, c’est ça que vous appelez les… ?

– Tais-toi et passe-moi mon gilet pare-balles, mon riot gun et ma kalachnikov, sinon, je n’ose même pas aller aux toilettes.

– Heureusement que le seul amendement que vous n’avez pas annulé, c’est celui qui garantit à chacun le port d’armes…

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ZOMBIES. LE RETOUR

Ce sont les esclaves qui ont apporté jadis dans les Caraïbes le culte des morts vivants, ces êtres maléfiques et terrifiants qui s’en prennent avec violence aux humains. Mais il ne faut pas croire que les zombies ne hantent que l’île d’Haïti. Une partie d’entre eux sont restés dans la brousse où ils continuent d’errer, de faire peur et de persécuter les êtres vivants qui ont le malheur de tomber sous leur coupe. Dans l’ouest du Congo, on les appelle les  Mvumbi et les Nsumbi. Dans la province du Bandundu, le peuple Kongo les désigne en tremblant sous le nom de Nzambi ou de Nzumbi.

Jusqu’ici, on ne les apercevait que dans les campagnes, la nuit, où ils s’en prenaient aux audacieux qui osaient défier la lune et le sommeil. Voilà qu’ils gagnent les villes. Leur équipée spectaculaire et sanglante sur Kinshasa a provoqué d’épouvantables massacres. Se faisant passer pour des membres des troupes présidentielles ou se déguisant en militaires, ils se sont jetés sauvagement sur les manifestants, des civils, des citoyens, qui défilaient sans armes pour faire respecter la loi et la constitution congolaise.

Personne ne peut penser que les troupes régulières d’un président qui se prétend démocratiquement élu se soient comportés avec une telle barbarie. Seuls des Mvumbi et des Nzumbi sont capables de telles atrocités. Ou alors, il faut croire que le président Kabila, victime d’un terrible sorcier, s’est transformé lui-même en zombie, ce que son comportement suggère de plus en plus régulièrement.

De qui alors Kabila jr est-il la réincarnation ? On n’a que l’embarras du choix. L’histoire congolaise n’est faite que de violences. Celle d’une partie des colonisateurs belges dès qu’ils se sont emparés de cette terre merveilleuse. Mais, dès l’indépendance et depuis, un certain nombre de personnages se sont empressé de jouer eux aussi aux monstres, de tuer sans états d’âme pour le profit, le pouvoir ou même pour le plaisir. Allez comprendre la psychologie d’un mort-vivant….

Mobutu a été gagné par la fièvre zombie dès qu’il est monté sur le trône. Le pouvoir est une maladie mortelle et contagieuse. Ses successeurs l’ont prouvé. Ainsi que les barbares qui ravagent l’est du Congo ou les génocidaires hutus installés au Congo.

Ne nous voilons pas la face, à l’heure de la mondialisation, les morts-vivants traversent les continents aussi facilement que les fonds de pension, les multinationales et l’ex-commissaire européenne Neelie Kroes. Ils sont partout, au Moyen Orient, derrière les attentats terroristes chez nous,  excitant les fous de la gâchette aux USA.

Méfions-nous de Trump et de Sarkozy. Avant de leur donner le code de l’arme atomique, exigeons qu’une commission médicale les examine pour vérifier s’ils ne sont pas déjà des morts-vivants comme le murmurent certains initiés.

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