L’HOMME QUI VOULUT ETRE ROI

Quand vous pénétrerez dans l’isoloir dimanche, vous serez le roi. Un jour, une heure ou une minute selon le temps que vous passerez derrière le rideau à contempler la feuille de vote ou l’écran. Je sais, vous êtes poli, des dizaines de citoyens font la file qui ne veulent pas s’attarder dans le bureau de vote. Il y a, croient-ils, plus important à faire ce dimanche, le marché, la promenade, le poulet-compote avec la famille, le chien ou les enfants. 

Eh bien, ils ont tort tous ces impatients, pressés d’en finir et qui battent le pavé derrière vous sans enthousiasme, beaucoup par un vague sentiment d’obligation ou simplement pour éviter une amende. Alors, faites leur bien comprendre pourquoi vous vous attardez. Cet instant pendant lequel vous aurez l’impression d’être le roi ne reviendra pas avant cinq ans – si tout va bien car on ne peut exclure qu’en raison d’événements critiques, il se passera beaucoup plus de temps avant que vous ne soyez à nouveau appelés à noircir une case. En démocratie, le sûr n’est jamais certain. 

Donc, vous voilà seul face à des centaines de noms, la plupart inconnus, sous le sigle de partis dont vous n’avez jamais entendu parler. Pourquoi diable ces gens se sont-ils présentés ? Quand on a posé la question à Barack Obama, il a répondu : « J’ai décidé de me présenter à l’élection présidentielle parce que j’ai compris que je ne pourrai jamais être Bruce Springsteen » …

On vous demande de choisir des hommes et des femmes qui vont gérer votre vie sans que vous puissiez vous y opposer pendant des années, sans que vous ne puissiez jamais dire en cours de route : « Attendez ! Il y a erreur ! Vous faites juste le contraire de ce que vous m’avez promis ! » Vous ne pourrez même pas prétendre que votre cher élu a dépassé la date de péremption. 

Ceux que vous avez désignés vont vous prendre une partie de votre pognon, bloquer ou non votre rue ou votre quartier, dans le meilleur des cas verser à certains d’entre vous un peu d’argent, ils prétendront vous imposer ou non votre manière de vous habiller et discuter certaines de vos libertés. Comme l’avouait Jacques Chirac : « On fait les cadeaux avant les élections et on décide des impôts tout de suite après ». 

Donc, avant de remplir une case, songez à Lamartine :  « Ô temps ! suspends ton vol, et vous, heures propices ! Suspendez votre cours/ Laissez-nous savourer les rapides délices/ des plus beaux de nos jours ! » 

« Alors ! Vous dormez ou quoi ? Il y en a je vous jure ! »

D’accord, d’accord, je sors. Mais, quelques instants encore, je vous prie, que je puisse savourer ce moment délicieux où j’ai eu le droit d’être roi. Où j’ai pu croire que le sort de mon pays, de mon continent, dépendait de moi. 

Mais, une fois sorti du bureau, vous vous rendrez compte qu’en fait vous n’avez pas eu plus de pouvoir que le roi…

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VIEUX COUCOUS

   Venu de Madrid et en route pour Lisbonne, le président Zelensky a fait escale à Bruxelles au début de cette semaine. C’est le problème des vols low cost : la compagnie ne choisit pas la ligne la plus directe mais l’escale la moins chère. Petite compensation, l’éminent passager a été autorisé à quitter la cabine pendant quelques heures, le temps de faire un peu de shopping dans le centre de la ville et de serrer la pince d’Alexandre De Croo, qui lui offre comme à chacun de ses voyages son plus charmant sourire – pas grand-chose de plus, sorry mais on est un peu serré pour le moment – et de saluer le roi Philippe qui a suggéré de livrer à l’Ukraine l’ensemble des plantes carnivores des serres de Laeken, une arme que les Russes ne sont pas préparés à affronter. 

Question shopping, le président ukrainien a découvert que la Belgique est la patrie de la seconde main et de la brocante. Après l’envoi des casques des militaires à la retraite ainsi que le brol qui encombre le musée de l’Armée en liquidation et qu’on ne savait où ranger, notre redoutable ministre de la Défense, Ludivine De Donder, a promis voilà des lunes le sacrifice suprême de livrer quelques-uns de nos F-16. Mais seulement lorsque nous aurons reçu nos nouveaux joujoux, des F-35 (commandés il y a six ans). 

Pourquoi ne pas livrer immédiatement ces nouveaux appareils à l’Ukraine ? Ah non ! Nos jets flambant neufs doivent protéger notre sol national. Tiens ? Je croyais naïvement que c’était justement l’Ukraine qui assurait la défense de l’Europe contre notre principal ennemi. Et à quel prix ! Contre qui allons-nous alors lancer nos avions flambant neufs ? Contre le Vlaams Belang, la seule force qui menace notre territoire ?  

Contentons-nous donc des F-16 a soupiré Zelensky. Je peux les emporter là, tout de suite ? Justement on m’attend à Zaventem. 

Désolé, a tranché Ludivine. Bien sûr, ils sont à vous. Mais il faut d’abord qu’on les retrouve et qu’on les reconstitue. On ne sait plus très bien où on les a fourrés. Depuis le temps, vous pensez. Et puis, il faut remettre les pièces en place.  Mais, ne vous en faites pas, on est des grands spécialistes du puzzle dans notre pays.

Quand ? A qui vous offre un cadeau, on ne se montre pas aussi insistant, M. Zelensky. Un peu de savoir-vivre, je vous prie. Voyons l’agenda. On a besoin de quelques appareils pour le défilé du 21 juillet, puis pour les fêtes du passage à l’an neuf, puis pour saluer la constitution du nouveau gouvernement, ce qui soi dit au passage peut prendre du temps, beaucoup de temps. Mais après, s’il reste encore quelqu’un de vivant dans votre coin, ce qui reste des F 16 est à vous. Pour le kérosène, le plus proche fournisseur, ça tombe bien, ce sont vos voisins, les Russes. On dit merci qui ?   

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IRAN LES ARMES

Tous les Iraniens ne sont pas raïssistes, loin de là. Les funérailles spectaculaires du président martyr Ebrahim Raïssi ne trompent personne même pas les pleureuses déployées le long du cortège qui auront trouvé là une occasion de se faire une petite dringuelle. 

Faute de sondage, on ne sait combien de partisans compte vraiment le régime, entre ceux qui en vivent, ceux qui en profitent ou simplement ceux qui ont peur. Mais on se dit que s’il y avait demain des élections libres (ah ! ah ! ah !) il ne resterait plus un seul membre de la nomenklatura qui dirige aujourd’hui l’empire perse. Députés, ministres, président, guide suprême de la révolution islamique, tous balayés.

Hélas, dans tout le Proche Orient, il n’y a qu’un seul état où se déroulent des élections vraiment libres, Israël, facile à sataniser. Il est vrai qu’on ne peut que se lamenter sur le choix de ses électeurs, mais ils vivent dans la peur de leurs voisins et d’au moins deux groupes terroristes effrayants. Avons-nous d’ailleurs des leçons politiques à leur donner alors que sous peu le premier parti de notre pays sera une formation d’extrême droite ?

   Nul doute que les cyniques qui dirigent l’Iran sont conscients de l’état de leur opinion publique. Et qu’ils doivent tenter cyniquement de l’aveugler par des mesures soi-disant d’apaisement, des emplâtres sur une jambe de bois susceptibles de calmer les braves gens pendant un moment, le temps de terminer la mise au point de la bombe atomique. C’est ce qu’ils ont tenté de faire en désignant à la présidence l’une ou l’autre figure étiquetée « modérée » pour l’occasion, comme Mohammad Khatami au tournant du siècle ou, plus récemment, Hassan Rohani, chantre de l’accord nucléaire avec les Occidentaux. 

Vu la manière dont le régime traite les femmes, allant jusqu’à les tuer si un cheveu dépasse du foulard, le coup le plus spectaculaire serait de nommer une femme. Ce qu’avait fait le président tunisien Saïed en bombardant une scientifique, Najla Bouden, première ministre en 2021. Un coup qui pourrait servir d’exemple et qui devrait rassurer les dirigeants iraniens, leur montrer qu’ils n’ont rien à craindre d’une représentante de l’autre sexe qu’il est d’ailleurs facile de renvoyer à son voile (Madame Bouden a été remerciée au bout d’un an et demi). De toute façon, le règne du président Raïssi l’a montré, comme avant ceux de Rohani ou de Khatami : le président n’a pas plus voix au chapitre dans ce régime qu’un roi en Europe. Raïssi avait beaucoup plus de pouvoirs quand il jouait au boucher de Téhéran. 

Comme le dit un proverbe iranien ancien : « Le mensonge qui fait du bien vaut mieux que la vérité qui fait du mal ». Un conseil qui n’est pas seulement appliqué par les dirigeants iraniens, comme on le verra en Europe au début du mois prochain…

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LE SOLEIL A RENDEZ-VOUS AVEC LA LUNE

        Il est pas content le soleil. Pas content du tout. Il somnolait devant un bon feu tandis que ses neuf planètes tournaient tranquillos depuis plus de quatre milliards d’années. Ravi qu’il ne se passe pas grand-chose sur l’aînée, Jupiter, ni sur Saturne même si son anneau lui donnait de temps en temps le tournis. Pluton, c’était le froid absolu mais c’était loin de son foyer. Loin des yeux, loin du cœur. Celle qui l’a embêté un moment, c’est Mars, avec ses milliards de petits hommes verts qui sortaient on ne sait où, parlaient fort et n’arrêtaient pas de creuser des canaux à coup d’explosifs nuit et jour. Cette activité lui donnait tant d’insomnies qu’il a d’un coup aspiré son atmosphère. Un bon vent solaire, soutenu par une tempête du tonnerre de Dieu (comme nous l’a appris la sonde Maven de la NASA) et hop ! Fini les petits hommes verts !  

Restait la Terre, sa petite préférée. Devenu avec l’âge plus bienveillant, il a laissé d’autres petits hommes de toutes les couleurs s’agiter à leur tour. Ils se battaient sans cesse mais pas de quoi troubler son sommeil jusqu’il y a quelques siècles quand ils se sont mis à creuser eux aussi des canaux et à se taper sur la gueule avec de la mitraille. Mais ils s’étaient plus ou moins calmés ces dernières années. Il y avait bien une bombe ici, un attentat là, des coups d’état un peu sanglants mais tout ça ne durait pas. 

Or, voilà que les Russes s’obstinent depuis plus de deux ans à dévaster l’Ukraine à coups de roquettes et qu’au Proche Orient, l’armée israélienne bombarde Gaza après que le Hamas a dévasté le sud d’Israël. Pendant ce temps, le leader coréen bien-aimé-respecté envoie des jouets de plus en plus menaçants dans la flotte et que Poutine menace de s’offrir un délire atomique. 

Hé bien, non ! D’abord accommodant, le soleil a décidé de montrer les dents voyant que la situation devenait pire chaque semaine et que certains étaient prêts à faire sauter toute la planète.  

Notre bonne vieille étoile vient donc de faire lever une de ces tempêtes à décoiffer la Lune, niveau 5 disent les spécialistes (le niveau le plus élevé) et, si ça ne suffit pas, elle promet d’en remettre une couche de quoi mettre en l’air les installations électriques et faire taire internet pendant plusieurs mois. Compris ? Ils auront l’air malins tous ces petits agités quand leurs armes sophistiquées, drones, avions, canons dirigés par ordinateurs seront réduits à l’état de pistolets à eau. 

On ne perd d’ailleurs rien pour attendre. Dans quelque temps, prédisent les savants, notre cher astre solaire périra à son tour – car il est mortel comme vous et moi. Ce jour-là, paraît-il, les planètes quitteront leur axe pour aller errer dans la galaxie. Et on se dira enfin que notre agitation était bien dérisoire… 

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L’EUROPE, QUEL LEURRE ! 

 Dans un siècle, lorsque les touristes visiteront le musée de l’Europe, quels trésors verront-ils exposés ? Guidés par la voix de Charles Michel, reconstituée par IA, les visiteurs l’entendront expliquer pourquoi la première vitrine présente un bête fauteuil et un banal sofa. 

« Le souvenir d’une visite chez le grand chef turc. J’ai laissé le sofa à Madame van der Leyen qui était un peu fatiguée et souhaitait piquer un roupillon pendant que j’écoutais le président turc de l’époque, M. Erdogan, me raconter des salades. De toute façon, ça n’avait pas d’importance. L’Europe n’avait rien à dire en matière de politique étrangère. » 

Dans la seconde vitrine, sont pendues les photos d’un certain nombre de députés qui ont émargé au budget d’états lointains, Qatar, Maroc, Chine, Russie. Que d’argent dépensé en vain par des potentats qui s’imaginaient que leurs pauvres faisans avaient le pouvoir de vendre leur soupe à leurs collègues.   

  Dans la troisième vitrine, encore des fauteuils, 705 pour être précis, en modèle réduit. C’est le nombre de parlementaires qui siégeaient tantôt à Strasbourg, tantôt à Bruxelles, errant sur les routes tels les rois fainéants, avec cartons, assistants et secrétaires. Tout ce beau monde préparait longuement des textes qui, lorsqu’ils finissaient par être publiés, ne ressemblaient jamais à ceux qu’ils avaient votés. Car les projets étaient revus par la Commission, qui les modifiait, les édulcorait, les rendait plus compliqués, et les truffait d’exceptions pour éviter de déplaire aux uns ou aux autres. Avant que le parlement à nouveau les tricote et détricote, introduise les suggestions des lobbys qui pullulaient autour d’eux comme des colonies de moustiques. Avant de renvoyer le tout au Conseil des Ministres qui faisait de toute façon ce qu’il voulait. On lira sur les écrans accrochés au mur, des milliers de directives et de règlements qui ont ainsi été adoptés, en vingt-sept langues mais pas une seule compréhensible par les citoyens. Cent ans plus tard, soupire notre guide, on recherche encore désespérément la pierre de Rosette. 

 Et là, ce grand espace vide s’appelait l’Ukraine, c’était l’Europe et ce ne l’était pas. La Russie la tirait à elle tandis que nous nous disputions sur son sort. Finalement, on a rasé le pays, c’était plus simple, ainsi elle n’appartenait plus à personne. Nous aurions pu mettre plus d’énergie, de fonds et de célérité à la protéger et à lui donner tous les moyens de résister. Mais l’Europe n’avait rien à dire en matière de défense…

Alors que faisait ce fameux parlement ? demande un jeune visiteur. Ah ! Il a pris une série de règles en matière de dimension des poissons, notamment les directives 2019/2006 et 1224/2009.

Résultat, il n’y a plus de poissons dans nos océans…

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LA LECTURE, CE POISON

     Dans « Le Nom de la rose », Umberto Eco nouait une extravagante intrigue dans une abbaye au moyen âge où un ancien inquisiteur est chargé d’enquêter sur la mort troublante de plusieurs moines. Le tout dans l’atmosphère empoisonnée des conflits au sein de l’Eglise. A la fin, l’enquêteur découvre que les décès sont causés par le poison se trouvant dans les pages des livres que les moines tournent en s’humectant les doigts.  

Voilà que la réalité une fois encore dépasse la fiction. On vient de découvrir à la Bibliothèque royale (mais aussi à la BNF à Paris) qu’une série d’ouvrages du dix-neuvième siècle ont été somptueusement décorés avec de l’arsenic, qui donnait une magnifique couleur vert émeraude au dessin de la couverture et à la reliure. 

Peut-être que  « cold cases », des morts restées mystérieuses depuis cent ou deux cents ans et dont la police n’a jamais identifié les auteurs, pourront ainsi être résolus. Mais certains songeront plutôt à remettre le procédé sur le métier, façon subtile d’éliminer certains lecteurs encombrants. 

Ainsi, lors de visites officielles de chefs d’état qu’on aime pas trop, pourquoi ne pas leur refiler en cadeaux l’un ou l’autre de ces bouquins pourris mais très élégants d’allure ? Evidemment, le stratagème suppose que l’auguste personnage ait envie de feuilleter son beau cadeau au lieu de le fourgueur à une bibliothèque poussiéreuse de son pays. Ce qui n’est pas gagné face au règne des tablettes. Mais, si le bonhomme s’ennuie pendant le vol de retour, pourquoi ne pas espérer de sa part un moment de curiosité ?

On pourrait même se montrer ‘pro-actif’ comme on dit maintenant et se servir de ce bon vieux procédé lors de l’échange d’un de ces traités qu’on est tenu, dans le cadre des relations internationales, de signer avec des représentants d’états peu recommandables. Une pincée d’arsenic pour rehausser l’aspect du document, le faire blinquer, avant de le remettre en toute pompe (mais avec des gants) à l’excellence. Et le tour est joué !

Même un chef d’état aussi hermétiquement barricadé que le président Poutine que personne ne peut approcher risque de se laisser prendre. S’il souffre d’insomnies (et comment n’en souffrirait-il pas ?) et qu’il prend au milieu de la nuit un de ces livres ramenés jadis d’un voyage en Europe où il était si bien reçu…

Plusieurs de nos plus fines lames politiques ont sorti des livres ces dernières semaines. L’un d’eux aura-t-il songé à offrir un tiré à part de son œuvre avec reliure vert émeraude à un de ses adversaires détestés ? 

Hélas, l’idée de tuer ainsi en silence risque de faire long feu car la lecture est en chute libre. On se consolera en rappelant que certains affirment qu’elle empoisonne la jeunesse. 

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L’AMERICAIN  SANS  FRITES

   Quand Donald Trump parle de Joe Biden, on a l’impression qu’il est prêt à le dévorer tout cru comme si c’était un (vieux) hamburger. Or, voilà qu’on apprend que le mal est dans les gènes. Du Biden, on en mange à chaque génération. Le président américain vient de révéler que son oncle, Ambrose, qui combattait sur le front oriental pendant la dernière guerre, a été dévoré par des anthropophages papous qui voulaient se payer un américain mais sans frites. Ce que conteste soi dit en passant le président de la Papouasie. Pour lui, c’est pas vu, papou…   

Pourtant, quoi de surprenant ? Les cas d’anthropophagie sont innombrables dans l’Histoire au sens propre et plus encore au sens figuré. 

Ils ont inspiré de la bonne littérature, comme le superbe « Pourquoi j’ai mangé mon père » de Roy Lewis (qui se passe à l’époque préhistorique). Et aussi d’innombrables films dont le délicieux (en tout cas cuit à point) « Qu’il était bon mon petit Français » de Nelson Pereira dos Santos. Sans oublier « Le silence des agneaux ».

Plus récemment, les survivants d’une catastrophe aérienne dans les Andes ont réussi à survivre en faisant un barbecue avec les passagers qui n’avaient pas survécu au crash. L’un d’eux, le docteur Canessa a raconté son premier repas humain dans un livre (« Je devais survivre »). « Je ne pourrais jamais oublier cette première incision » écrit-il. Le plus piquant de l’affaire c’est qu’à son retour à la civilisation, il est devenu chirurgien. Jusqu’ici, personne n’a songé vérifier ce qu’il fait des organes retirés pendant ses opérations …    

Des pulsions cannibales, on en ressent tous. Elles peuvent révéler la profondeur d’un lien affectif – dévorer l’être aimé. Comme on peut croquer ses adversaires pour se nourrir, en guise de représailles mais surtout pour acquérir sa force. Ce qui se produit souvent en politique.

Quand il recevait Angela Merkel qui avait peur des chiens, Poutine faisait entrer dans la pièce son grand Labrador noir, façon de lui faire entendre qu’il était prêt à dévorer l’Europe. On a vu l’effet…

Pourquoi les débatteurs politiques montrent-ils si souvent les dents, pensez-vous ? Parce qu’ils sont prêts à arracher le nez ou l’oreille de leurs interlocuteurs. A mordre jusqu’au sang aussi cruellement qu’un jeune chiot. « Je lui mangerais les entrailles » s’écria Danton en apprenant que Robespierre conspirait à le faire arrêter. Quant aux dieux grecs, ils sont nombreux à bouffer leurs enfants pour les empêcher de prendre le pouvoir, Zeus, Cronos ont eu peur de se faire détrôner par la nouvelle génération. 

Peut-être que Louis Michel ou Herman De Croo auraient bien fait de se rappeler la mythologie. Retenant leurs réflexes anthropophages, ils ont été mis sur la touche par ceux qu’ils ont nourris et élevés… Bon appétit si vous passez à table. 

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LIRE OU ELIRE ROUSSEAU ?

« Il est inutile de rappeler le passé quand les souvenirs ne peuvent rien pour le présent ». 

Cette réflexion de Charles Dickens (dans « David Copperfield ») sert manifestement de mantra au parcours spectaculaire, parfois barnumesque, du leader des socialistes flamands Conner Rousseau. Qui annonce son retour en politique après une démission dans la honte il y a à peine cinq mois. 

Le passé s’efface en effet. Et de plus en plus vite. Pourquoi Rousseau se rappellerait-il que le plus grand guitariste de jazz était un gitan (né en Belgique de surcroît), Django Reinhardt ? Pour contrer les racistes du Vlaams Belang et tenter d’attirer leurs électeurs, il est plus fructueux (pense-t-il) de cracher son mépris sur le peuple tzigane que de commencer ses meetings en interprétant « Nuages » ou le « Requiem à mes frères tsiganes » que Django a composé pendant la guerre pour rendre hommage à son peuple décimé par les Allemands. 

Conner Rousseau a aussi raison d’oublier les faits d’arme du parti socialiste, ô il y a si longtemps, et particulièrement de son plus illustre représentant, Emile Vandervelde. Non seulement parce qu’il a écrit les bases du parti (dans la charte de Quaregnon) mais surtout parce qu’il est l’auteur de la loi dite anti-alcoolique du 29 août 1919 (qui n’a été abolie que le 1er janvier 1984 grâce aux pressions insistantes du capitaine Haddock, président d’honneur de la Ligue antialcoolique des marins).

 Vandervelde a voulu combattre les ravages de l’alcool dans la classe ouvrière. Il n’a pas imaginé qu’elle ravagerait plus encore le président de son propre parti. Propre ? Lui qui déclarait qu’en roulant dans Molenbeek, il ne se sent pas en Belgique. Peut-être pensait-il, bloqué dans les embouteillages de la rue du cinéma ou de la rue Mahatma Gandhi, à cette phrase de cet autre Rousseau (Jean-Jacques) « Qui croit devoir fermer les yeux sur quelque chose se voit bientôt forcé de les fermer sur tout. » 

Mais il vaut mieux se battre pour améliorer le sort d’une population ou les services publics d’une commune, ses écoles, la formation des immigrés, que de cracher sur leur sort. Dans son dernier roman « On m’appelle Demon Copperhead » (chez Albin Michel, prix Pulitzer), Barbara Kingsolver, inspiré par Dickens, raconte dans une fresque magnifique le sort d’un garçon, un péquenot, un quart monde comme disaient jadis les socialistes, méprisé par la société, parce qu’il fait partie des plus démunis.  

Une lecture salutaire pour Rousseau (Conner). Mais ne rêvons pas. Le bad boy va revenir à ce qu’il adore, jouer avec les réseaux sociaux, prouver qu’il est le plus hype des politiciens, faire le clown dans des émissions de variétés, inspiré ici encore par Rousseau (Jean-Jacques) qui écrivait : « Chacun met son être dans le paraître ».       

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POUPEES RUSSES

Les complotistes affirment que les Russes sont parmi nous. Les anti-complotistes aussi. Qui a raison ? Les Russes ! 

Jouant avec les règles de la démocratie comme les enfants le font avec le Monopoly, ils achètent, vendent, envoient à la case prison et déversent leur argent sur les terrains les plus rentables, c’est-à-dire ceux où les démocraties sont le plus fragile. 

La démocratie américaine a déjà failli couler à la suite des manœuvres et vilenies des services russes pour empêcher l’élection de Hillary Clinton et favoriser celle de Donald Trump en 2016. Ces ingérences russes ont fini par être avouées par Evgueni Prigojine en 2022 – en un temps où il flirtait chaud devant avec son mentor, Vladimir Poutine. Le président américain sortant, Barack Obama avait lui aussi dénoncé le rôle des cyber-activistes russes dans la campagne de 2016 pour mener Trump au pouvoir. 

On peut s’attendre à ce que la course de 2024 soit à nouveau bénie par les popes de Moscou (ils ont des popes en stock), aidée par les services russes et financée par l’argent de quelques sociétés écrans pour contourner les sanctions (le guide du roublard donne de nombreuses clés pour exporter les roubles au nez et à la barbe des eurocrates). 

L’argent, c’est le carburant qui facilite toutes les actions des Russes. Il alimente particulièrement les caisses de plusieurs partis d’extrême droite en Europe, les poissons pilote (ou plutôt les piranhas) préférés utilisés par la Russie pour démolir les Européens. Les services tchèques viennent de dénoncer l’un des leaders de l’AfD allemande, M. Bystron (n°2 sur la liste européenne) en l’accusant d’être financé par la Russie, comme l’a été Marine Le Pen il y a quelques années. On peut reconnaître à Poutine qu’il se sert des blondes comme des hommes blancs, sans discrimination.   

Le Russiagate a maintenant contaminé le Parlement européen constate-t-on à quelques semaines de son renouvellement. 

En sa qualité de président du conseil de l’Union, Alexander De Croo a reconnu que plusieurs parlementaires sentent dangereusement la vodka dans l’enceinte du Caprice des Dieux. Des députés appartenant à l’extrême droite française et allemande, d’après la députée Nathalie Loiseau (du groupe Renew). On connait également depuis des années les liens qu’entretient la Ligue de l’Italien Matteo Salvini (vice-président du conseil des ministres) avec les services russes – ce qui fait l’affaire de sa redoutable concurrente, la première ministre Giorgia Meloni, plus rusée et moins pro-russe. 

Il ne faut jamais oublier que Poutine est une I.A. fabriquée jadis par le KGB et qu’à l’intérieur du président russe, il y a autant de petits Poutine qu’il y a de matriochkas dans une grande poupée russe.  

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QUAND ON JOUE CONTRE LA MONTRE…

   « Le temps, c’est de l’argent ». Prenant cette bonne vieille sentence au pied de la lettre, la présidente du Pérou, Dina Bolluarte se retrouve sonnée par le gong. Plus d’un tiers de ses ministres ont démissionné et la polémique risque de l’emporter à son tour. La cause de cette affaire qui ébranle une fois de plus la fragile démocratie andine ? Une montre Rolex. Ou plutôt toute une bête collection de ces tocantes hors de prix que collectionne la présidente, plutôt que des bagues de cigares cubains ou des vieux timbres belges, qui lui auraient permis de gouverner en paix. Perquisitions, instruction pénale, sa montre s’est transformée en monstre. Sa Rolex démontre ses prévarications, dit-on à Lima. Sous l’horloge, son or ! Le temps, c’est de l’argent ! Si la polémique continue, la présidente risque de couler dans le lac Titicaca. Ce qui présente un seul petit avantage : de vérifier au passage si sa tocante est vraiment waterproof.  

« A cinquante ans, si on a pas une Rolex, on a raté sa vie » s’écriait Jacques Séguéla, le publicitaire qui a fabriqué la victoire de Mitterrand avant de devenir le meilleur copain de Sarkozy. Prenant ce conseil au pied de la lettre, Madame Bolluarte n’a pas compris que l’époque a changé. Et qu’on ne montre plus ses montres. Autre temps, autres mœurs, prévenait déjà Pindare.  

La présidente du Pérou aurait mieux fait d’écouter d’autres voix en France que celles d’un fils de pub, qui l’auraient mieux mise en garde. Léo Ferré : « avec le temps, tout s’en va » ou Rastignac : « la vie humaine se compose de deux parties : on tue le temps et le temps vous tue ».

Mais, quelle idée aussi d’acheter une Rolex … Faut-il manquer de goût ! Puis de l’exhiber devant les photographes ! Croyait-elle qu’il vaut mieux faire envie que pitié ?

Est-ce qu’on pardonne plus facilement à un homme qu’à une femme de jouer avec le bling-bling ? Alors que Dina Bolluarte sent sa dernière heure sonner, Donald Trump fait assaut de mauvais goût jusqu’à l’écœurement pour récupérer les clés de la Maison Blanche. Ce qui éblouit sur les hauteurs des tours de Manhattan fait horreur sur les hauteurs des Andes… 

Les montres n’ont jamais été à la mode au Pérou. Rappelez-vous des derniers Incas réfugiés dans « Le Temple du Soleil ». Ils possédaient plein d’or mais pas la moindre horloge, ce qui a permis à Tintin de faire croire qu’il commandait au soleil de disparaître alors qu’il connaissait tout simplement l’heure exacte de l’éclipse. 

Une éclipse qui semble éliminer un à un tous les dirigeants de ce pays, l’un des plus pauvres d’Amérique latine. Trois d’entre eux sont déjà derrière les barreaux. Et pour l’actuelle présidente, il est moins une… 

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