LES LOUPS SONT ENTRES DANS PARIS

« Cessez de rire, charmante Elvire, cent loups sont entrés dans Paris » chantait Serge Reggiani. 

Après les Pays-Bas, qu’on croyait pays de la modération et même de l’audace politique et la Flandre, modèle de réussite économique et de culture, voilà la France prise d’assaut par une horde de personnages qui se flattent de laver plus blanc, menés par deux Le Pen pour le prix d’une (anticipant la saison des soldes), garanties blondes de la tête aux pieds et qui ont pris comme figure de proue une espèce de robot, rasé de près, fabriqué sur le modèle gendre idéal, blanc, bleu mais pas belge. Ledit personnage, Jordan Bardella, a réussi à la fois à se vanter de ses ancêtres immigrés italiens et à prôner la haine et le rejet des étrangers. 

Jamais les citoyens n’ont eu accès à autant de moyens d’information, jamais on n’a aussi bien réussi qu’aujourd’hui à leur vendre des vessies pour des lanternes. Les mensonges sur les méfaits de l’Union européenne et les fausses promesses sur le retour de la grandeur de l’empire ont mené au Brexit dont les Anglais constatent les conséquences catastrophiques. Cette expérience désastreuse n’a manifestement pas servi de signal d’alarme aux autres citoyens européens, qui se précipitent avec le même aveuglement de moutons vers les prometteurs de ces beaux jours où on ne verra plus que des blondes dans les rues.  

« Les hommes avaient perdu le goût de vivre et se foutaient de tout » chantait encore Reggiani. 

Rassemblant les nostalgiques des Pieds nickelés, des Branquignols et des bras cassés, en donnant aux franchouillards l’illusion de retrouver un pays de cocagne aussi imaginaire que le Royaume-Uni version Boris Johnson et Nigel Farage, quelque part entre le domaine rêvé d’Harry Potter et les caricatures de Punch. 

Les loups pointent le museau chez nous tandis qu’un gigantesque ours remue la queue de façon de plus en plus agressive à l’est. Décidément, le zoo européen prend des allures de jungle. Un panneau à l’entrée interdit pourtant de nourrir les animaux sauvages. 

Si, par malheur, la folle loterie déclenchée par le président Macron tournait à la foire aux boudins, notre futur Premier va devoir gérer un sacré casse-tête : que faire des milliers des Français qui vont demander l’asile politique en Belgique ? On voit déjà le Vlaams Belang se lécher les babines. Des étrangers ? Et qui parlent français ? Amaï ! A moins de les enfermer en Wallonie et de proclamer l’indépendance de la région, pour en faire une France bis comme Taïwan par rapport à la Chine communiste…

PS : la réintroduction (imaginaire) des loups en Ecosse est le thème d’un sublime roman de Charlotte Mac Conaghy « Je pleure encore la beauté du monde » récemment paru aux éditions Gaïa.

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TOP JOB

Et de se battre comme des jeunes chiots pour décrocher un « top job » … 

Pour parader à la tête du carrousel européen, c’est à qui décrochera la floche. Ursula von der Leyen est prête à enterrer le pacte vert et à s’associer à la redoutable diablesse de Meloni (la descendante du parti de Mussolini) pour sauver son beau fauteuil de présidente, avec la même absence de scrupules que le minable Eric Ciotti en France pour garder son siège en donnant le baiser de la mort aux descendants du parti de Jean-Marie Le Pen. Mais que donner en échange ? Pour vendre son âme, il faut en avoir une…

On nous avait répété qu’après la chute du Mur de Berlin, les idéologies étaient mortes. Mais à ce point… Macron avait habilement joué sur ce registre en 2017 en prétendant qu’il n’y avait plus ni droite ni gauche – mais seulement lui. Sept ans plus tard, on se rend compte des dégâts. 

Les citoyens ont envie et besoin d’un souffle et pas seulement de réformes socio-économiques. Ce qui est une des explications du succès des partis qui agitent des programmes irréalisables et catastrophiques pour leur pays mais qui donnent aux électeurs l’impression que leur monde va changer : expulsion des immigrés, haine des autres, c’est la rengaine la plus facile à susurrer pour se faire élire, Vlaams Belang, Front national, PVV, AfD, Fidesz, Fratelli d’Italia. Que la recette est simple, saperlipopette !   

Ce n’est donc pas pour mettre en œuvre des idées nouvelles que l’on s’arrache les top jobs dans la capitale de l’Europe. Dire qu’il y a même des candidats qui se disputent âprement pour succéder à Charles Michel ! Or, à part l’impressionnante mention sur leur carte de visite de « président » à quoi a donc servi le job de notre ex-Premier ? A tenir l’agenda des réunions des chefs d’état (vous êtes libre vendredi prochain ? Ah ! Mais le président lituanien est au baptême de son fils et le premier ministre allemand en visite en Corée. Jeudi alors ? Non, Macron fait une conférence de presse). Et à voyager interminablement tout au long de la planète pour figurer sur la photo qui sera oubliée deux jours plus tard. Que retiendra-t-on de la présidence de ce pauvre Michel, sinon le sofagate ? 

Ursula von der Leyen avait bien commencé, bien mieux que ses deux piètres prédécesseurs, mais que de renoncements à la fin pour se faire réélire… Ne parlons pas de Josep Borrell, le « haut représentant pour les affaires étrangères » qui n’a pas contribué à régler une seule des crises de son quinquennat, même la réunification de Chypre, pourtant état européen toujours déchiré par l’occupation turque. 

Top Gun sert à former des pilotes, ce qui devient utile par les temps qui courent. Mais décrocher des top jobs, à quoi ça sert s’ils ne permettent pas de sauver la planète, même pas la vie d’un seul homme ?

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VITESS’KE

  Aussitôt connue la défaite de son parti aux élections européennes, le président Macron a dissous l’Assemblée nationale et convoqué fissa des élections législatives dès la fin du mois pour remeubler le Palais-Bourbon de frais. De l’air ! De l’air ! Sauf que le frais peut s’avérer glaçant si les électeurs remettent le couvert et reproduisent le menu écœurant de dimanche dernier. Peu importe, pense le président français qui parie que rapidité et réactivité peuvent tenir lieu de programme pour sauver les meubles brinquebalants de sa majorité déjà relative. De toute façon, qui dissèque les promesses politiques ? On s’informe sur les réseaux sociaux où tout est blanc ou noir et où les engagements politiques doivent avoir moins de deux cent cinquante caractères pour être lus. 

  Vite, vite ! clament aussi les vainqueurs des élections belges. Un Bouchez survolté et un De Wever qui essaye de balayer tout ce qui peut faire obstacle à ses ambitions de diriger le pays se sont lancés dans la formation d’un gouvernement avec moteur turbo. 

On a suffisamment déploré la lenteur des précédentes négociations pour leur reprocher de constituer une équipe avant la Saint Glin-Glin. Mais, si on prend le temps de réfléchir, on se demande quel programme peut réunir le libéral belgicain unitariste et le séparatiste flamingant. Et si c’était justement l’absence de programme qui les rapprochait ? 

Une photo des deux champions dans leur beau costume sur Instagram, un faux dialogue complice sur Tik Tok, quelques jolies formules frappées au coin du bon sens, le tour est joué et les citoyens embobinés. Ils n’en demandent d’ailleurs pas plus. Ils ont compris depuis longtemps que les promesses n’engagent que ceux qui y ont cru. 

Un gouvernement d’abord et un programme le plus tard possible – juste avant la prochaine échéance électorale par exemple, voilà qui devrait satisfaire le bon peuple. Car à quoi bon négocier une interminable feuille de route comme à la formation de la Vivaldi, si c’est pour la laisser au placard ? Nos vainqueurs ont bien compris qu’à notre époque, le citoyen veut qu’on aille le plus vite possible. Dans quelle direction ? Peu importe. Pourvu qu’on y coure. N’est-on pas à la veille des jeux olympiques ?

On comprend qu’avec cet état d’esprit, les plaies majeures qui déchire l’Europe ne sont plus à l’ordre du jour. Le pire du réchauffement climatique n’arrivera que dans cinquante ans. Au dernier moment, il se trouvera bien un politicien qui promettra de le régler à tout berzingue et des citoyens prêts à le croire sur paroles. Quant à la guerre d’Ukraine, elle commence à casser les pieds. Si les Ukrainiens continuent de traîner les pieds sans parvenir à repousser les Russes, c’est sûr qu’ils vont perdre le soutien d’une partie de notre opinion publique. On ne plébiscite que ceux qui agite « vitess’ke » comme slogan.  

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L’HOMME QUI VOULUT ETRE ROI

Quand vous pénétrerez dans l’isoloir dimanche, vous serez le roi. Un jour, une heure ou une minute selon le temps que vous passerez derrière le rideau à contempler la feuille de vote ou l’écran. Je sais, vous êtes poli, des dizaines de citoyens font la file qui ne veulent pas s’attarder dans le bureau de vote. Il y a, croient-ils, plus important à faire ce dimanche, le marché, la promenade, le poulet-compote avec la famille, le chien ou les enfants. 

Eh bien, ils ont tort tous ces impatients, pressés d’en finir et qui battent le pavé derrière vous sans enthousiasme, beaucoup par un vague sentiment d’obligation ou simplement pour éviter une amende. Alors, faites leur bien comprendre pourquoi vous vous attardez. Cet instant pendant lequel vous aurez l’impression d’être le roi ne reviendra pas avant cinq ans – si tout va bien car on ne peut exclure qu’en raison d’événements critiques, il se passera beaucoup plus de temps avant que vous ne soyez à nouveau appelés à noircir une case. En démocratie, le sûr n’est jamais certain. 

Donc, vous voilà seul face à des centaines de noms, la plupart inconnus, sous le sigle de partis dont vous n’avez jamais entendu parler. Pourquoi diable ces gens se sont-ils présentés ? Quand on a posé la question à Barack Obama, il a répondu : « J’ai décidé de me présenter à l’élection présidentielle parce que j’ai compris que je ne pourrai jamais être Bruce Springsteen » …

On vous demande de choisir des hommes et des femmes qui vont gérer votre vie sans que vous puissiez vous y opposer pendant des années, sans que vous ne puissiez jamais dire en cours de route : « Attendez ! Il y a erreur ! Vous faites juste le contraire de ce que vous m’avez promis ! » Vous ne pourrez même pas prétendre que votre cher élu a dépassé la date de péremption. 

Ceux que vous avez désignés vont vous prendre une partie de votre pognon, bloquer ou non votre rue ou votre quartier, dans le meilleur des cas verser à certains d’entre vous un peu d’argent, ils prétendront vous imposer ou non votre manière de vous habiller et discuter certaines de vos libertés. Comme l’avouait Jacques Chirac : « On fait les cadeaux avant les élections et on décide des impôts tout de suite après ». 

Donc, avant de remplir une case, songez à Lamartine :  « Ô temps ! suspends ton vol, et vous, heures propices ! Suspendez votre cours/ Laissez-nous savourer les rapides délices/ des plus beaux de nos jours ! » 

« Alors ! Vous dormez ou quoi ? Il y en a je vous jure ! »

D’accord, d’accord, je sors. Mais, quelques instants encore, je vous prie, que je puisse savourer ce moment délicieux où j’ai eu le droit d’être roi. Où j’ai pu croire que le sort de mon pays, de mon continent, dépendait de moi. 

Mais, une fois sorti du bureau, vous vous rendrez compte qu’en fait vous n’avez pas eu plus de pouvoir que le roi…

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VIEUX COUCOUS

   Venu de Madrid et en route pour Lisbonne, le président Zelensky a fait escale à Bruxelles au début de cette semaine. C’est le problème des vols low cost : la compagnie ne choisit pas la ligne la plus directe mais l’escale la moins chère. Petite compensation, l’éminent passager a été autorisé à quitter la cabine pendant quelques heures, le temps de faire un peu de shopping dans le centre de la ville et de serrer la pince d’Alexandre De Croo, qui lui offre comme à chacun de ses voyages son plus charmant sourire – pas grand-chose de plus, sorry mais on est un peu serré pour le moment – et de saluer le roi Philippe qui a suggéré de livrer à l’Ukraine l’ensemble des plantes carnivores des serres de Laeken, une arme que les Russes ne sont pas préparés à affronter. 

Question shopping, le président ukrainien a découvert que la Belgique est la patrie de la seconde main et de la brocante. Après l’envoi des casques des militaires à la retraite ainsi que le brol qui encombre le musée de l’Armée en liquidation et qu’on ne savait où ranger, notre redoutable ministre de la Défense, Ludivine De Donder, a promis voilà des lunes le sacrifice suprême de livrer quelques-uns de nos F-16. Mais seulement lorsque nous aurons reçu nos nouveaux joujoux, des F-35 (commandés il y a six ans). 

Pourquoi ne pas livrer immédiatement ces nouveaux appareils à l’Ukraine ? Ah non ! Nos jets flambant neufs doivent protéger notre sol national. Tiens ? Je croyais naïvement que c’était justement l’Ukraine qui assurait la défense de l’Europe contre notre principal ennemi. Et à quel prix ! Contre qui allons-nous alors lancer nos avions flambant neufs ? Contre le Vlaams Belang, la seule force qui menace notre territoire ?  

Contentons-nous donc des F-16 a soupiré Zelensky. Je peux les emporter là, tout de suite ? Justement on m’attend à Zaventem. 

Désolé, a tranché Ludivine. Bien sûr, ils sont à vous. Mais il faut d’abord qu’on les retrouve et qu’on les reconstitue. On ne sait plus très bien où on les a fourrés. Depuis le temps, vous pensez. Et puis, il faut remettre les pièces en place.  Mais, ne vous en faites pas, on est des grands spécialistes du puzzle dans notre pays.

Quand ? A qui vous offre un cadeau, on ne se montre pas aussi insistant, M. Zelensky. Un peu de savoir-vivre, je vous prie. Voyons l’agenda. On a besoin de quelques appareils pour le défilé du 21 juillet, puis pour les fêtes du passage à l’an neuf, puis pour saluer la constitution du nouveau gouvernement, ce qui soi dit au passage peut prendre du temps, beaucoup de temps. Mais après, s’il reste encore quelqu’un de vivant dans votre coin, ce qui reste des F 16 est à vous. Pour le kérosène, le plus proche fournisseur, ça tombe bien, ce sont vos voisins, les Russes. On dit merci qui ?   

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IRAN LES ARMES

Tous les Iraniens ne sont pas raïssistes, loin de là. Les funérailles spectaculaires du président martyr Ebrahim Raïssi ne trompent personne même pas les pleureuses déployées le long du cortège qui auront trouvé là une occasion de se faire une petite dringuelle. 

Faute de sondage, on ne sait combien de partisans compte vraiment le régime, entre ceux qui en vivent, ceux qui en profitent ou simplement ceux qui ont peur. Mais on se dit que s’il y avait demain des élections libres (ah ! ah ! ah !) il ne resterait plus un seul membre de la nomenklatura qui dirige aujourd’hui l’empire perse. Députés, ministres, président, guide suprême de la révolution islamique, tous balayés.

Hélas, dans tout le Proche Orient, il n’y a qu’un seul état où se déroulent des élections vraiment libres, Israël, facile à sataniser. Il est vrai qu’on ne peut que se lamenter sur le choix de ses électeurs, mais ils vivent dans la peur de leurs voisins et d’au moins deux groupes terroristes effrayants. Avons-nous d’ailleurs des leçons politiques à leur donner alors que sous peu le premier parti de notre pays sera une formation d’extrême droite ?

   Nul doute que les cyniques qui dirigent l’Iran sont conscients de l’état de leur opinion publique. Et qu’ils doivent tenter cyniquement de l’aveugler par des mesures soi-disant d’apaisement, des emplâtres sur une jambe de bois susceptibles de calmer les braves gens pendant un moment, le temps de terminer la mise au point de la bombe atomique. C’est ce qu’ils ont tenté de faire en désignant à la présidence l’une ou l’autre figure étiquetée « modérée » pour l’occasion, comme Mohammad Khatami au tournant du siècle ou, plus récemment, Hassan Rohani, chantre de l’accord nucléaire avec les Occidentaux. 

Vu la manière dont le régime traite les femmes, allant jusqu’à les tuer si un cheveu dépasse du foulard, le coup le plus spectaculaire serait de nommer une femme. Ce qu’avait fait le président tunisien Saïed en bombardant une scientifique, Najla Bouden, première ministre en 2021. Un coup qui pourrait servir d’exemple et qui devrait rassurer les dirigeants iraniens, leur montrer qu’ils n’ont rien à craindre d’une représentante de l’autre sexe qu’il est d’ailleurs facile de renvoyer à son voile (Madame Bouden a été remerciée au bout d’un an et demi). De toute façon, le règne du président Raïssi l’a montré, comme avant ceux de Rohani ou de Khatami : le président n’a pas plus voix au chapitre dans ce régime qu’un roi en Europe. Raïssi avait beaucoup plus de pouvoirs quand il jouait au boucher de Téhéran. 

Comme le dit un proverbe iranien ancien : « Le mensonge qui fait du bien vaut mieux que la vérité qui fait du mal ». Un conseil qui n’est pas seulement appliqué par les dirigeants iraniens, comme on le verra en Europe au début du mois prochain…

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LE SOLEIL A RENDEZ-VOUS AVEC LA LUNE

        Il est pas content le soleil. Pas content du tout. Il somnolait devant un bon feu tandis que ses neuf planètes tournaient tranquillos depuis plus de quatre milliards d’années. Ravi qu’il ne se passe pas grand-chose sur l’aînée, Jupiter, ni sur Saturne même si son anneau lui donnait de temps en temps le tournis. Pluton, c’était le froid absolu mais c’était loin de son foyer. Loin des yeux, loin du cœur. Celle qui l’a embêté un moment, c’est Mars, avec ses milliards de petits hommes verts qui sortaient on ne sait où, parlaient fort et n’arrêtaient pas de creuser des canaux à coup d’explosifs nuit et jour. Cette activité lui donnait tant d’insomnies qu’il a d’un coup aspiré son atmosphère. Un bon vent solaire, soutenu par une tempête du tonnerre de Dieu (comme nous l’a appris la sonde Maven de la NASA) et hop ! Fini les petits hommes verts !  

Restait la Terre, sa petite préférée. Devenu avec l’âge plus bienveillant, il a laissé d’autres petits hommes de toutes les couleurs s’agiter à leur tour. Ils se battaient sans cesse mais pas de quoi troubler son sommeil jusqu’il y a quelques siècles quand ils se sont mis à creuser eux aussi des canaux et à se taper sur la gueule avec de la mitraille. Mais ils s’étaient plus ou moins calmés ces dernières années. Il y avait bien une bombe ici, un attentat là, des coups d’état un peu sanglants mais tout ça ne durait pas. 

Or, voilà que les Russes s’obstinent depuis plus de deux ans à dévaster l’Ukraine à coups de roquettes et qu’au Proche Orient, l’armée israélienne bombarde Gaza après que le Hamas a dévasté le sud d’Israël. Pendant ce temps, le leader coréen bien-aimé-respecté envoie des jouets de plus en plus menaçants dans la flotte et que Poutine menace de s’offrir un délire atomique. 

Hé bien, non ! D’abord accommodant, le soleil a décidé de montrer les dents voyant que la situation devenait pire chaque semaine et que certains étaient prêts à faire sauter toute la planète.  

Notre bonne vieille étoile vient donc de faire lever une de ces tempêtes à décoiffer la Lune, niveau 5 disent les spécialistes (le niveau le plus élevé) et, si ça ne suffit pas, elle promet d’en remettre une couche de quoi mettre en l’air les installations électriques et faire taire internet pendant plusieurs mois. Compris ? Ils auront l’air malins tous ces petits agités quand leurs armes sophistiquées, drones, avions, canons dirigés par ordinateurs seront réduits à l’état de pistolets à eau. 

On ne perd d’ailleurs rien pour attendre. Dans quelque temps, prédisent les savants, notre cher astre solaire périra à son tour – car il est mortel comme vous et moi. Ce jour-là, paraît-il, les planètes quitteront leur axe pour aller errer dans la galaxie. Et on se dira enfin que notre agitation était bien dérisoire… 

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L’EUROPE, QUEL LEURRE ! 

 Dans un siècle, lorsque les touristes visiteront le musée de l’Europe, quels trésors verront-ils exposés ? Guidés par la voix de Charles Michel, reconstituée par IA, les visiteurs l’entendront expliquer pourquoi la première vitrine présente un bête fauteuil et un banal sofa. 

« Le souvenir d’une visite chez le grand chef turc. J’ai laissé le sofa à Madame van der Leyen qui était un peu fatiguée et souhaitait piquer un roupillon pendant que j’écoutais le président turc de l’époque, M. Erdogan, me raconter des salades. De toute façon, ça n’avait pas d’importance. L’Europe n’avait rien à dire en matière de politique étrangère. » 

Dans la seconde vitrine, sont pendues les photos d’un certain nombre de députés qui ont émargé au budget d’états lointains, Qatar, Maroc, Chine, Russie. Que d’argent dépensé en vain par des potentats qui s’imaginaient que leurs pauvres faisans avaient le pouvoir de vendre leur soupe à leurs collègues.   

  Dans la troisième vitrine, encore des fauteuils, 705 pour être précis, en modèle réduit. C’est le nombre de parlementaires qui siégeaient tantôt à Strasbourg, tantôt à Bruxelles, errant sur les routes tels les rois fainéants, avec cartons, assistants et secrétaires. Tout ce beau monde préparait longuement des textes qui, lorsqu’ils finissaient par être publiés, ne ressemblaient jamais à ceux qu’ils avaient votés. Car les projets étaient revus par la Commission, qui les modifiait, les édulcorait, les rendait plus compliqués, et les truffait d’exceptions pour éviter de déplaire aux uns ou aux autres. Avant que le parlement à nouveau les tricote et détricote, introduise les suggestions des lobbys qui pullulaient autour d’eux comme des colonies de moustiques. Avant de renvoyer le tout au Conseil des Ministres qui faisait de toute façon ce qu’il voulait. On lira sur les écrans accrochés au mur, des milliers de directives et de règlements qui ont ainsi été adoptés, en vingt-sept langues mais pas une seule compréhensible par les citoyens. Cent ans plus tard, soupire notre guide, on recherche encore désespérément la pierre de Rosette. 

 Et là, ce grand espace vide s’appelait l’Ukraine, c’était l’Europe et ce ne l’était pas. La Russie la tirait à elle tandis que nous nous disputions sur son sort. Finalement, on a rasé le pays, c’était plus simple, ainsi elle n’appartenait plus à personne. Nous aurions pu mettre plus d’énergie, de fonds et de célérité à la protéger et à lui donner tous les moyens de résister. Mais l’Europe n’avait rien à dire en matière de défense…

Alors que faisait ce fameux parlement ? demande un jeune visiteur. Ah ! Il a pris une série de règles en matière de dimension des poissons, notamment les directives 2019/2006 et 1224/2009.

Résultat, il n’y a plus de poissons dans nos océans…

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LA LECTURE, CE POISON

     Dans « Le Nom de la rose », Umberto Eco nouait une extravagante intrigue dans une abbaye au moyen âge où un ancien inquisiteur est chargé d’enquêter sur la mort troublante de plusieurs moines. Le tout dans l’atmosphère empoisonnée des conflits au sein de l’Eglise. A la fin, l’enquêteur découvre que les décès sont causés par le poison se trouvant dans les pages des livres que les moines tournent en s’humectant les doigts.  

Voilà que la réalité une fois encore dépasse la fiction. On vient de découvrir à la Bibliothèque royale (mais aussi à la BNF à Paris) qu’une série d’ouvrages du dix-neuvième siècle ont été somptueusement décorés avec de l’arsenic, qui donnait une magnifique couleur vert émeraude au dessin de la couverture et à la reliure. 

Peut-être que  « cold cases », des morts restées mystérieuses depuis cent ou deux cents ans et dont la police n’a jamais identifié les auteurs, pourront ainsi être résolus. Mais certains songeront plutôt à remettre le procédé sur le métier, façon subtile d’éliminer certains lecteurs encombrants. 

Ainsi, lors de visites officielles de chefs d’état qu’on aime pas trop, pourquoi ne pas leur refiler en cadeaux l’un ou l’autre de ces bouquins pourris mais très élégants d’allure ? Evidemment, le stratagème suppose que l’auguste personnage ait envie de feuilleter son beau cadeau au lieu de le fourgueur à une bibliothèque poussiéreuse de son pays. Ce qui n’est pas gagné face au règne des tablettes. Mais, si le bonhomme s’ennuie pendant le vol de retour, pourquoi ne pas espérer de sa part un moment de curiosité ?

On pourrait même se montrer ‘pro-actif’ comme on dit maintenant et se servir de ce bon vieux procédé lors de l’échange d’un de ces traités qu’on est tenu, dans le cadre des relations internationales, de signer avec des représentants d’états peu recommandables. Une pincée d’arsenic pour rehausser l’aspect du document, le faire blinquer, avant de le remettre en toute pompe (mais avec des gants) à l’excellence. Et le tour est joué !

Même un chef d’état aussi hermétiquement barricadé que le président Poutine que personne ne peut approcher risque de se laisser prendre. S’il souffre d’insomnies (et comment n’en souffrirait-il pas ?) et qu’il prend au milieu de la nuit un de ces livres ramenés jadis d’un voyage en Europe où il était si bien reçu…

Plusieurs de nos plus fines lames politiques ont sorti des livres ces dernières semaines. L’un d’eux aura-t-il songé à offrir un tiré à part de son œuvre avec reliure vert émeraude à un de ses adversaires détestés ? 

Hélas, l’idée de tuer ainsi en silence risque de faire long feu car la lecture est en chute libre. On se consolera en rappelant que certains affirment qu’elle empoisonne la jeunesse. 

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L’AMERICAIN  SANS  FRITES

   Quand Donald Trump parle de Joe Biden, on a l’impression qu’il est prêt à le dévorer tout cru comme si c’était un (vieux) hamburger. Or, voilà qu’on apprend que le mal est dans les gènes. Du Biden, on en mange à chaque génération. Le président américain vient de révéler que son oncle, Ambrose, qui combattait sur le front oriental pendant la dernière guerre, a été dévoré par des anthropophages papous qui voulaient se payer un américain mais sans frites. Ce que conteste soi dit en passant le président de la Papouasie. Pour lui, c’est pas vu, papou…   

Pourtant, quoi de surprenant ? Les cas d’anthropophagie sont innombrables dans l’Histoire au sens propre et plus encore au sens figuré. 

Ils ont inspiré de la bonne littérature, comme le superbe « Pourquoi j’ai mangé mon père » de Roy Lewis (qui se passe à l’époque préhistorique). Et aussi d’innombrables films dont le délicieux (en tout cas cuit à point) « Qu’il était bon mon petit Français » de Nelson Pereira dos Santos. Sans oublier « Le silence des agneaux ».

Plus récemment, les survivants d’une catastrophe aérienne dans les Andes ont réussi à survivre en faisant un barbecue avec les passagers qui n’avaient pas survécu au crash. L’un d’eux, le docteur Canessa a raconté son premier repas humain dans un livre (« Je devais survivre »). « Je ne pourrais jamais oublier cette première incision » écrit-il. Le plus piquant de l’affaire c’est qu’à son retour à la civilisation, il est devenu chirurgien. Jusqu’ici, personne n’a songé vérifier ce qu’il fait des organes retirés pendant ses opérations …    

Des pulsions cannibales, on en ressent tous. Elles peuvent révéler la profondeur d’un lien affectif – dévorer l’être aimé. Comme on peut croquer ses adversaires pour se nourrir, en guise de représailles mais surtout pour acquérir sa force. Ce qui se produit souvent en politique.

Quand il recevait Angela Merkel qui avait peur des chiens, Poutine faisait entrer dans la pièce son grand Labrador noir, façon de lui faire entendre qu’il était prêt à dévorer l’Europe. On a vu l’effet…

Pourquoi les débatteurs politiques montrent-ils si souvent les dents, pensez-vous ? Parce qu’ils sont prêts à arracher le nez ou l’oreille de leurs interlocuteurs. A mordre jusqu’au sang aussi cruellement qu’un jeune chiot. « Je lui mangerais les entrailles » s’écria Danton en apprenant que Robespierre conspirait à le faire arrêter. Quant aux dieux grecs, ils sont nombreux à bouffer leurs enfants pour les empêcher de prendre le pouvoir, Zeus, Cronos ont eu peur de se faire détrôner par la nouvelle génération. 

Peut-être que Louis Michel ou Herman De Croo auraient bien fait de se rappeler la mythologie. Retenant leurs réflexes anthropophages, ils ont été mis sur la touche par ceux qu’ils ont nourris et élevés… Bon appétit si vous passez à table. 

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