HOLLANDE ET SES REINES

Pour les amateurs de jeux de cartes, de réussite comme de poker, l’idéal est de tirer un as. Mais, Obama et Merkel ayant monopolisé la carte maîtresse, restent à distribuer les roi, dame et valet (beaucoup de valets).

Conscient de ses limites, le modeste président français a toujours essayé de jouer les reines. Mais, coup sur coup, ses deux reines se sont fait la malle : après Royal, voilà qu’il vient de perdre la reine de Hollande. Malgré ses succès au Mali, le voilà bien marri (marri pour tous, quand même).

S’il songe à se consoler dans les bras d’un légionnaire, comme jadis Gainsbourg, qu’il fasse gaffe ! Dans le texte de la célèbre chanson, l’histoire du beau légionnaire est bien inquiétante :

« Il était plein de tatouages/Que j’ai jamais très bien compris,/Son cou portait: « pas vu, pas pris« 

Pas vu, pas pris ?

Ben oui, ils sont où les fameux terroristes islamistes qui tenaient le Nord Mali dans une poigne de fer ? Pas vu, pas pris.

Et leurs milliers d’armes terrifiantes, piquées dans les arsenaux de Kadhafi ? Pas vu, pas pris.

Et les otages qu’ils détenaient ? Pas vus, pas repris…

Les Français ne sont pas destinés à rester au Mali, a averti le président français.

« Il m’a aimé toute la nuit/ Mon légionnaire !/ Et me laissant à mon destin / Il est parti dans le matin ». Bon mais une fois reparti « dans quelque pays merveilleux » le légionnaire qui « sentait bon le sable chaud », que va-t-il se passer ? Les hommes d’Ansar Dine, et autres poissons froids, vont-ils sortir de leurs boîtes et revenir tranquillement prendre le thé à Tombouctou et à Gao ? Détruire ce qui restait encore des monuments et autres trésors de la culture séculaire ? D’après ce qu’on a compris, ce n’est pas l’armée malienne qui va les déranger.

Il a fallu dix ans pour dénicher Ben Laden, caché si l’on peut dire, dans une villa paisible d’une des villes les plus militarisés du Pakistan. Bonne chance pour trouver Ansar Dine dans les mers de sable du Sahel ! Son avenir baigne dans l’huile.

Une guerre, c’est toujours comme ça : ça commence par une réussite et ça se transforme en poker menteur pour finir en strip poker. A se demander pourquoi il s’en trouve encore qui s’amuse au kriegsspiel  ?

Mieux vaut prendre exemple sur Mittal. Lui ne s’est jamais contenté de rois ni de reines. Il ne s’est pas laissé bercer par ses valets. Il a sorti le joker. La carte qui supplante toutes les autres. Celle qui permet au joueur de changer les règles au fur et à mesure de la partie. Et si ça ne plaît pas à ses partenaires, c’est simple, il ramasse toutes les cartes et il s’en va jouer ailleurs. Car il s’en trouve toujours d’autres qui croient avoir un moral d’acier avant de se retrouver grillés à leur tour…

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MARK DE LUXE

Toute l’histoire de l’Allemagne au vingtième siècle peut se résumer en un mot : la chute.

Chute de l’empire après la première guerre mondiale, chute du Reich après la seconde. Chute du mur en 1989.

Des utopies immenses. Des débâcles dérisoires.

Chaque fois, quelques jours ont suffi à balayer les symboles les plus glorieux de la nation, tout ce qui a uni les Allemands ou les a écrasés. Qui se rappelle encore que l’empereur Guillaume II dirigeait la première puissance économique d’Europe en 1918 ? Et d’Hitler, dont le souvenir s’estompe parmi les jeunes générations ? Oublié aussi le spectre de cette Allemagne bis, la RDA, engloutie avec le reste du monde communiste européen.

Et maintenant, Angela ? Faudra-t-il titrer Chancelière : la chute ?

A l’issue des dernières élections régionales, son sort semble aléatoire, disent de nombreux observateurs, les mêmes qui, quelques jours plus tôt, ne donnaient par cher de la peau de son challenger social-démocrate. Certains commentateurs ont la mauvaise habitude de bâtir leurs articles sur le dernier tweet reçu. Pourquoi les résultats des élections de Basse Saxe la semaine dernière décident-ils des votes des électeurs allemands en septembre?

Comme l’écriront les mêmes observateurs dans quelques semaines, sur base de nouveaux sondages, les jeux ne sont pas faits. Angela dispose encore de quelques atouts dans la manche étroite de sa veste couleur prune écrasée.

Quelle que soit votre opinion politique, reconnaissez qu’elle vous a bluffés, Angela.

Et pas seulement par ses tenues vestimentaires. Remarquez, je préfère son absurde garde-robe aux déguisements tyroliens dont s’affublent certains dirigeants politiques de chez nous quand ils se rendent dans leur lieu de vacances favori, croyant faire couleur locale.

Que la fille d’un pasteur établi en Allemagne de l’est, qui a signé une thèse en chimie quantique, soit propulsée première chancelière de l’histoire laisse penser qu’elle en a encore sous la pédale, comme disait Eddy Merckx de son ami Lance Amstrong.

Une physicienne capable de prévoir le comportement des molécules sur base de la mécanique quantique doit analyser mieux que d’autres le comportement des électeurs, même ceux du Schleswig-Holstein, réputés pour leur amour de l’indépendance – c’est aussi le cas des molécules.

Angela a montré une souplesse politique qui étonne ou agace. En tout cas, elle a réussi l’exploit de battre le chancelier sortant Schröder en critiquant sa politique de flexibilité du travail, qu’elle a aussitôt mise en application. Alors, pardon, Angela, quelle Mark de luxe !

PS : paru il y a quelques mois, un roman magnifique, « Quand la Lumière décline» (éditions Les Escales) d’Eugen Ruge raconte, à travers le destin d’une famille, toute l’histoire de la RDA et d’une génération d’Allemands anti-nazis,  perdue dans l’utopie communiste.

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BONUS MALI

En ces temps de givre et de frimas, comment ne pas saluer l’initiative du Forem de faire gérer ses services informatiques par des sous-traitants établis au Maroc ?

On suppose que, toujours attentif à accomplir au mieux sa mission, le Forem aura exigé que ces emplois soient confiés à des chômeurs de chez nous. Bravo ! Envoyer nos chômeurs en Afrique, enfin une idée nouvelle, ingénieuse, pour remettre les Wallons au travail ! Et couper l’herbe sous les pieds de De Wever et compagnie. Cette fois, on peut être sûr que les nationalistes flamands resteront sans voix devant un projet aussi audacieux.

Logés quelque part entre Ouarzazate et Taroudannt, nos travailleurs épargneront non seulement de bêtes frais de chauffage, d’électricité et d’eau mais surtout toutes ces autres dépenses inutiles nées de l’ennui : alcool, lotto, casino, etc.

Cette opération est aussi un bel exemple d’application sur le terrain de cette flexibilité sociale tant réclamée par le gouvernement et le patronat : les salaires de nos Wallo-Marocains sont fixés au cours local (inutile et dangereux de créer des discriminations avec leurs nouveaux voisins) et leurs avantages sociaux alignés sur la législation du pays d’accueil. Même s’ils bénéficient de l’indexation – promesse irréfragable du premier ministre socialiste, croix de bois, croix de fer, si j’y renonce, je vais en enfer ! – celle-ci est évidemment calculée sur base du panier de produits blancs de la ménagère marocaine.

Pour sauver le nord, cap vers le sud. Tel semble être la politique du gouvernement Di Rupo. Tandis que nos chômeurs sont exfiltrés vers le Maroc, les soldats belges sont envoyés au Mali. C’est vrai qu’ils s’ennuyaient un peu, loin de leurs champs de bataille traditionnels. Il fallait bien leur trouver une occupation sinon on aurait entendu l’opposition N-VA protester une nouvelle fois en agitant son habituel mantra. L’armée ? Encore une institution fédérale inutile et coûteuse !

Certes, on aurait pu employer nos militaires en Belgique. Mais les envoyer face aux ouvriers de Ford à Genk ou de Mittal à Liège, ce n’était pas très politiquement correct. Pas plus que de les mettre au volant des bus des TEC pour remplacer les chauffeurs en état de grève permanente.

Tant qu’à expédier nos troupes en Afrique, pourquoi pas dans l’est du Congo pourraient penser certains esprits candides ? Ce serait irresponsable, voyons. Empêcher les soldats de se tourner les pouces est une chose. Mais les jeter en Afrique centrale, ce serait aussi mauvais pour la santé des Congolais que pour celle de nos pioupious. Les mettre au service de la France est beaucoup plus prudent. Et plus juste : l’expédition belge n’est-elle pas payée grâce aux impôts de tous ces Français que nous accueillons si tendrement chez nous ?

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BON ANNIVERSAIRE, MISS !

  On avait presqu’oublié son âge tant elle semble toujours jeunenette, vive, ravageuse. Plus folle que jamais. Mais, sous son visage, habilement fardé, quelques signes ne trompent pas. Non. Elle n’a pas cinq ans comme le prétendent ses proches, d’un air faussement innocent. Elle n’est venue au monde en 2008, ni même en 2001. Elle fête cette année ses quarante ans.

Mademoiselle La Crise est née en 1973, quelque part au Proche Orient, comme… Oui. Mais pas à Bethléem. Pas loin pourtant. Tandis qu’Israéliens, Egyptiens et quelques autres se tapaient comme d’habitude sur la figure, elle a débarqué sur terre, pendant la guerre presqu’oubliée de Kippour. Il y en a tant eu depuis dans la région, qui ont à leur tour alimenté le biberon de mademoiselle La Crise.

La naissance de La Crise, beaucoup s’en souviennent encore. Dès son premier cri, elle en a fait du bruit. Songez que la veille de l’accouchement, le baril de pétrole était à 3 $. Au moment où l’on a coupé le cordon ombilical, crac ! il a brutalement quadruplé. Et décuplé quand elle a fêté ses six ans, pendant qu’éclatait dans la salle de jeux une nouvelle guerre, cette fois entre l’Iran et l’Iraq…

A l’époque déjà, Mademoiselle laissait dans son sillage des traces difficiles à effacer, malgré les efforts de sa maman. A chacune de ses crises de nerfs – elle en était coutumière et aucun psy n’a jamais réussi à la soigner – , elle cassait ses jouets et c’est tout le quartier qui souffrait : explosion du chômage (à 5% des actifs dans les pays de l’OCDE, on annonçait la fin du monde…), diminution de la production industrielle, hausse des prix, augmentation de la dette publique, incapacité de l’Europe de négocier ensemble notamment face aux pays de l’OPEP. Voilà les dégâts que Mademoiselle a fait tout bébé encore. Quarante ans plus tard, Mademoiselle La Crise peut se vanter de rentrer toujours dans les mêmes habits. Elle n’a pas pris un gramme de graisse.

Mademoiselle La Crise. On l’appelle toujours mademoiselle, comme Coco Chanel. Comme elle, d’ailleurs, elle nous taille un de ces costumes ! Pas un jour où l’on ne parle d’elle de façon craintive, médisante, angoissée.

Mademoiselle. Car qui oserait briser son célibat, affronter ses terribles colères, quand elle casse tout sur son passage ? Berlusconi a bien tenté de l’apprivoiser. Mais les soirées bunga-bunga n’ont eu aucun effet apaisant sur elle. Sarkozy, Zapatero, tous ces hommes qui croyaient la mater, elle les a balayés.

Chaque génération imagine que La Crise vient de naître et que mademoiselle va disparaître dès que les petits jeunes auront pris la direction du ménage. Mais non, les générations passent, les dirigeants politiques trépassent tandis que Mademoiselle triomphe, plus forte, que jamais.

Puisque tous les hommes ont échoué, peut-on espérer que ce soit une femme qui parvienne enfin un de ces jours à dompter notre terrible demoiselle ?

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L’EUROPE EN CHANTANT

    La présidence tournante de l’Union européenne est un parfait symbole de la place de l’Europe dans notre vie. Que celui qui savait que l’Europe était dirigée depuis six mois par la république de Chypre, lève le doigt. Et que son président était communiste – le seul chef d’état communiste du continent ? Seuls les Russes l’avaient remarqué et ils n’en croyaient pas leurs yeux. Rassurons-les, Chypre n’a pas profité de son passage à la tête de l’Union pour opérer le transfert de la dépouille de Lénine – dont le Kremlin ne sait plus que faire- dans le hall de la gare du Quartier-Léopold, en échange de la momie de Gérard Depardieu. Les Chypriotes ont eu tort. Une lacune de plus dans la communication des autorités européennes. Vous imaginez ce qui se serait passé s’ils avaient acheté cet extraordinaire symbole ? Une grandiose cérémonie. Une épouvantable polémique. Au moins, les Chypriotes auraient laissé une trace de leur passage par Bruxelles. Mais non, frileux comme les autres…

Quel est le bilan de six mois d’Europe communiste ? Les prolétaires sont restés sur leur faim. Ils se pressent de plus en plus nombreux aux restos du cœur et autres lieux charitables. Et personne n’a songé à chanter l’Internationale depuis longtemps. Au contraire, les courants nationalistes n’ont jamais été aussi forts, aussi arrogants et aussi inquiétants sur tout le continent, quoiqu’en pensent certains esprits facétieux en Flandre.

Chypre repartie dans son île – restée aussi divisée que l’Europe et aussi tentée qu’elle par la dislocation -, l’arrivée des Irlandais dans le fauteuil présidentiel nous donne un peu d’espoir et nous redonne foi(e) dans l’Europe : avec eux, il n’y a peu de risque qu’elle soit mise en bière. Même si leur passage aux affaires risque de déstabiliser un peu plus encore le régime des pensions dans nos pays, du moins s’ils ont soif d’imposer aux autres Européens leur remède favori. Car, comme le disait déjà Rabelais : « Il y a plus de vieux ivrognes que de vieux médecins »…

Si les Irlandais ont beaucoup à nous apporter, question petite mousse, ils auront peut-être un peu à apprendre de certains pays continentaux question respect du droit des femmes, eux qui sont les derniers à avoir adopté une loi sur l’avortement. Une législation récente qui reste pourtant la plus restrictive d’Europe (et qu’on ne peut comparer qu’à la situation de la Pologne, condamnée il y a quelques semaines par la cour européenne des droits de l’homme).

Allez les filles ! 2013 appartient aux dames : plombières polonaises, amazones irlandaises, hockeyeuses belges, reines hollandaises ! Pussy riots de toute l’Europe, unissez-vous !

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DROIT DEVANT SOI

Après le trou noir de 2012, l’année nouvelle annonce des lendemains qui chantent, venus des étoiles. 2013 sera un bon cru s’il faut se baser sur les dernières nouvelles de la semaine : après l’appel du roi à plus de solidarité entre les Belges, le Standard a décidé de s’exiler en France. La glorieuse équipe liégeoise n’écrasera plus de sa mâle autorité la division 1. Débarrassés des Sclessinois, Anderlecht ou Zult peuvent espérer prendre enfin la tête du championnat belge. Tandis que le PSG a intérêt à s’acheter quelques champions s’il veut résister à la terrible squadra roûche. Seul le Trésor français se montre satisfait. Il pourra compenser les départs des Depardieu et autres Arnault en se vengeant sur les joueurs ex-Belges, obligés de s’établir Outre-quiévrain et d’y payer leurs impôts.

Une idée pour LVMH : sponsorisez le Standard bleu-blanc-roûche ! Façon intelligente de démontrer et de consolider le lien indéfectible entre les deux pays, un groupe français et son chef, futur Belge.

Libéré de ses bêtes festivités footballistiques, le stade de Sclessin pourrait devenir enfin le centre du monde en se reconvertissant en spatiodrome. Lieu idéal, vu sa forme audacieuse, pour accueillir les premières machines d’extra-terrestres annoncées pour très bientôt. Pas de raison de laisser ça aussi aux Flamands. Déjà qu’ils nous ont pris le jardin botanique !

On trouvera bien un peu d’argent au fond des poches du plan Marshall 2.0 afin de réaliser les quelques travaux nécessaires pour convertir le stade et surtout pour organiser la somptueuse réception de nos amis lointains, un super-cocktail comme seuls les Wallons savent le faire.

L’arrivée de nos cousins des étoiles n’aura pas seulement un effet bénéfique sur le sud de notre pays. S’ils survivent au pèkèt et au boulet sauce chasseur, les petits hommes verts (un bon signe, ça pour le sauvetage de la planète à moins que cela ne soit l’indice inquiétant d’une mauvaise digestion) vont nous aider à résoudre toutes ces misérables crises dont nous sommes manifestement incapables de nous dépatouiller.

Un Martien à la tête de la Chine, cela ne nous changera sans doute pas beaucoup. Mais une jolie et séduisante Vénusienne au Kremlin, une sorte de Pussy Riot des étoiles, peut bouleverser notre vision de l’empire de l’est. Autant qu’un solide et jovial Jupitérien à la place des Saturniens qui pilotent actuellement le triste attelage européen.

Vu la façon dont tous ces braves gens ont géré l’année qui se meurt, il faut bien le renfort des habitants des autres planètes pour cesser enfin de foncer droit dans le mur. C’était déjà un de leur prédécesseur, le Petit Prince de Saint-Exupéry qui disait : « Droit devant soi on ne peut pas aller bien loin. »

Meilleurs vœux !

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CHACUN POUR SOI ET DEPARDIEU POUR TOUS

Quelle affaire cette arrivée de Depardieu en Hainaut ! D’accord, ce n’est pas seulement la beauté des femmes qui l’attire en Belgique. C’est le fric. Le sien. Comme des milliers d’autres Français qui ont choisi de voyager pour payer (légalement) moins d’impôt. Ce n’est pas bien. C’est un vilain pied-de-nez à tous ceux qui ne peuvent pas ou ne veulent pas s’expatrier. Mais de là à provoquer pareille crise de nerfs chez intellectuels et politiques de gauche… Qu’auraient-ils dit si l’homme à la Mammuth était devenu le bras droit des Le Penn ? Dieudonné et Depardieu, c’est tout de même deux dieux différents…

Il y a quelques jours, Edwy Plenel parlait dans ces colonnes de « barbarie ». Barbarie ? Eh, Edwy ! Il ne part pas en Syrie, votre Depardieu, ni à l’est du Congo ni dans le nord du Mali. Même pas en Suisse ou dans les îles exotiques comme quelques-uns des plus grands musiciens anglo-saxons. Ou à Monaco comme beaucoup des meilleurs sportifs belges. Il pose sa moto juste à quelques kilomètres de Mons où les impôts, je vous assure, sont pas piqués des vers…

Barbarie ? Faut faire attention à l’usage des mots. A force d’être banalisée, l’indignation, pour reprendre un autre mot galvaudé, devient une activité aussi révolutionnaire que faire ses courses le samedi avant Noël.

Le problème de Depardieu, c’est qu’à l’instar des grandes gueules qu’il incarne à l’écran, il n’est pas du genre discret. A la différence des autres voyageurs fiscaux. Il aime marquer son territoire quand le besoin pressant s’en fait sentir. Remarquez. On va peut-être y gagner un vrai Belge dans un pays où d’autres, à force de marquer leur territoire de plus en plus petit, vont finir par le faire disparaître. Faudrait peut-être pousser l’ami Gérard en politique. Depardieu contre De Wever. On pourrait s’amuser…

Certes, son attitude est égoïste, un mauvais exemple dans une période terrible où la solidarité devrait être plus que jamais érigée en vertu. Mais l’époque n’est-elle pas à l’égoïsme généralisé ? Chacun veut préserver le bout de son nez pour éviter qu’il ne tombe par grand froid. Il ne faut pas aller loin de chez nous pour déplorer le manque de solidarité. C’est le programme de la N-VA qui veut garder « l’argent flamand en Flandre ». Ou notre pratique quotidienne quand nous téléchargeons des films de Depardieu illégalement parce que, comme lui, on n’a pas envie de payer si on peut l’éviter. Sans nous soucier nous non plus des conséquences.

Qui renoncera cette année au foie gras, à la dinde farcie, au homard à l’Armoriquaine pour nourrir les petits Chinois qui meurent tous de faim ? Quoi ? Les Chinois ne meurent plus tous de faim ? Décidément, tout fout le camp…

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LE PERE NOEL EST UNE BISCOTTE

Les fêtes de fin d’année ne sont pas synonymes de festin pour tous. Pour qui ne peut pas ou n’aime pas ripailles et bombance, décembre est mois de souffrance.

La bûche devient bûcher et la dinde amer.

Imaginez le repas de fête chez les De Wever. Pendant que les enfants s’empiffrent de chocolat autrichien et que sa femme boit la sauce du plat à la petite cuillère, le nouveau maïeur de la métropole du Nord croque ses biscottes au jambon maigre. Même pas une côte de porc, juste son jambon. Vraiment, le porc d’Anvers n’a pas la pèche cette année.

Quelle misère ! Quand tout lui sourit en politique, Bart doit faire ceinture pour garder la peau sur les os. Mais, quelle idée stupide de faire de sa cure d’amaigrissement un cocktail électoral ! Ah ! Il a bonne mine maintenant ou plutôt mauvaise, en surgissant sec comme un hareng saur au milieu des pubs et des émissions télé où la bonne bouffe s’étale en couches appétissantes et joyeuses comme dans tous les étalages qui accompagnent son chemin de croix entre sa maison et l’hôtel communal.

A force de brandir sa maigreur comme preuve de sa force, s’il grossit, son corps électoral perdra aussitôt du poids. Alors qu’à l’époque où il jouait les victimes, il pouvait se consoler en enfilant tout ce qui passait de bon à sa portée, frites, saucisson, gaufres à la crème. Maintenant, cinq kilos en plus c’est cinq cents électeurs en moins.

Qu’il se méfie de ses fausses formes fluettes ! Dans une région qui a gardé pour modèle Breughel, Rubens et Lamme Goedzak, il va finir pas avoir l’air si calviniste que les Flamands vont l’envoyer en Hollande, c’est-à-dire au diable !

C’est une erreur de croire que la diète sied à la crise, qu’il serait indécent pour un dirigeant de se montrer gourmand parce que le PIB stagne. Au contraire, en pleine déprime, le bon vivant est rassurant. On se dit inconsciemment que s’il a trouvé les sous pour se remplir la panse, il nous filera la recette. C’est le secret de la longévité de Berlusconi d’avoir fait croire aux Italiens qu’en le mettant aux affaires, ils goûteront aux mêmes plaisirs que lui. Et la force de Dehaene d’abandonner une banque en déroute la tête haute parce qu’il a le ventre plein. Qui s’inquiète des petites affaires du rondouillard Albert Frère alors qu’on tremble devant les initiatives du trop squelettique Mittal ?

Dans une époque sans utopie, il faut inventer de nouvelles fables pour que l’on ait envie de survivre à la fin du calendrier maya. L’abondance comme nouvelle f’oie ?

Les dirigeants européens devraient y songer, eux qui se montrent si incapables de nous faire rêver. A condition qu’Herman Van Rompuy, songe à se rempailler sérieusement sinon personne ne le croira capable de réussir la multiplication des pains.

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LES CAHIERS AU FEU ET ELIO AU MILIEU !

   Pourquoi la popularité du Premier ministre est-elle en chute libre dans les sondages, se lamentent ses amis, après seulement un an de pouvoir ? N’a-t-il pas réussi à sortir le pays de sa pire crise politique depuis la question royale ? A boucler l’impossible scission de BHV qui empoisonnait les relations entre les communautés depuis cinquante sans que personne ne descende dans les rues ? A réformer le chômage, les pensions ? A serrer la ceinture du budget fédéral c’est-à-dire à piquer dans notre portefeuille un montant inédit de près de vingt milliards sans trop de grogne ? Et même à mieux parler flamand que Michel Daerden ? Est-ce ainsi qu’on accueille Hercule au retour de ses grands travaux ?

Ben oui. En ces temps de banqueroute de la Grèce, mieux vaut ne pas invoquer ses héros même antiques. Vu ce que les Grecs ont fait du pognon européen, les autres membres de l’union en ont marre de se laisser manger l’Hellène sur le dos.

Mais surtout, Elio souffre d’un mal qui frappe tout le personnel politique, de François Hollande à Sarkozy et Berlusconi, et qui a même failli emporter Obama. Quoi qu’ils fassent, les gens ne croient plus à leurs dirigeants. Ils ont trop dit et pas agi. Et même s’ils tentent de mettre maintenant la main à la pâte, c’est trop tard. On a l’impression qu’ils font du sur place, qu’ils remuent du vent, pédalent dans la choucroute. Tout juste bons à fêter la centenaire de la commune. Mais pas à donner du travail à ses petits-enfants. Ni de l’espoir à leurs enfants.

Que les hommes et femmes politiques ne nous prennent pas pour des ingrats. Ils sont les premiers responsables de leur désamour. Depuis le début de la crise, ils ont tant répété qu’ils ne sont responsables de rien, qu’on a fini par les croire. C’est la faute à l’Europe, aux banques, aux Chinois, aux multinationales, à M. Mittal, à l’euro, aux Wallons, aux Flamands, au père Fouettard, à saint Nicolas, aux Incas et à leur fichu calendrier !

En présentant il y a quelques jours leur manifeste pour l’Europe, Guy Verhofstadt et Daniel Cohn-Bendit (duo improbable sinon absurde) ont suscité un enthousiasme insolite pour un show politique. Qu’ont donc soutenu de si sensationnel les deux compères bleu-vert au point de chauffer la salle comme une baraque à frites? Qu’il est temps que les hommes politiques reprennent la barre, abandonnent leur tentation de ne plus gérer que leur région, leur village, pour s’atteler à un projet qui réunisse tout le continent et le transforme.

Au moment même où Maurice Lippens confessait qu’il n’a jamais eu les compétences pour gérer une banque, il était rafraîchissant d’en entendre d’autres qui veulent enfin bousculer les imposteurs, les ternes, les timides et les médiocres. L’imagination au pouvoir…

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LA POLITIQUE DU PIS

Il paraît que jadis un ministre dirigeait en même temps la culture et l’agriculture. On ricanait à ce sujet mais, à voir l’état de la paysannerie aujourd’hui, ce ministère des deux misères était moins absurde qu’on ne le disait : artistes et agriculteurs sont aussi mal lotis en cette période de crise et de désertion des autorités publiques. Même si ce qui pend aux cimaises de certains vendeurs d’art contemporain peut donner l’impression que le prix du laid n’a pas autant baissé dans les galeries que dans les campagnes.

Avec un lait payé 27 centimes, comment les agriculteurs vont-ils sauver leurs vaches ? Qu’ils ne comptent plus sur les autorités européennes. La politique agricole commune représente plus du tiers du budget européen mais, depuis que les dirigeants des états membres ont décidé qu’il fallait moins d’Europe pour avoir plus d’électeurs, la survie des vaches ne viendra pas du Berlaymont. Le caprice des Dieux (surnom du parlement européen) n’est plus un bon fromage pour les paysans…

Plutôt que d’essayer de traire la vache à lait européenne, définitivement à sec, on conseille aux agriculteurs d’imiter le monde culturel, lui aussi abandonné, pour se lancer dans la chasse aux sponsors.

Les cibles ne manquent pas. On pourrait par exemple suggérer à la SNCB d’acheter et d’entretenir des troupeaux entiers le long des voies ferrées. Ainsi, les voyageurs, fort déboussolés ces temps-ci par la disparition progressive de tous les repères et les signes qui ont bercé notre vie sociale, seraient rassurés par la stabilité des sociétés de chemins de fer en contemplant des milliers de vaches qui comme par le passé regardent passer les trains.

La Fondation Magritte pourrait aussi parrainer quelques vaches en hommage à la « période vache », l’une des plus créatives et impertinentes du peintre. Elle ferait défiler les bêtes, portant une belle robe peinte du slogan « ceci n’est pas un agriculteur ».

Et la police ? Puisqu’elle s’efforce sans grand succès jusqu’ici de soigner un peu son image, elle serait bien inspirée de verser les contraventions pour outrage à agent à un fonds de soutien aux paysans, chaque fois qu’un quidam est verbalisé pour avoir crié « mort aux vaches ! »

Le cinéma belge enfin peut être appelé à contribution. Le western revenant à la mode, on imagine combien pourrait rapporter à nos pauvres paysans la location de milliers d’animaux que de nouveaux cow-boys bien de chez nous mèneraient en cinémascope de Wallonie en Flandre, échappant de peu aux attaques des Indiens perchés à leur passage sur les hauteurs de Bruxelles. Grâce à la présence de nos stars dans les convois, quelques superbes bleu, blanc, belge, on peut parier que l’on parlera bientôt d’une école du western waterzooi. Réconciliant à nouveau culture et agriculture.

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