VINTAGE

Où est le temps béni des bons et des méchants ? Celui où l’on pouvait désigner du doigt le salaud et célébrer le héros ?
Depuis la disparition de l’empire soviétique, c’est le chaos. Tout le monde joue à contre emploi. Le bon se révèle une crapule. Le mauvais, encore plus épouvantable que dans le scénario. Bush a bien tenté, mais trop tard, de revenir au confortable schéma classique, si rassurant pour tous les spectateurs, avec sa superproduction « l’Axe du Mâle ». Moi, le bon. Saddam Hussein, Ben Laden, Khamenei, les affreux, sales et méchants. Les attaques du 11 septembre semblaient lui avoir été servies comme sur un plateau (de cinéma) par ses ennemis. Malgré cet épouvantable épisode, son blockbuster s’est révélé un flop. Il a fallu s’y résoudre. Le temps du western est définitivement révolu. John Wayne est mort et il n’y a plus de duel à OK Corral.
Sur les écrans d’aujourd’hui, la star, c’est Poutine. Un personnage que jamais les scénaristes de l’âge d’or d’Hollywood n’auraient mis en vedette. Grâce à lui, la Russie est à l’URSS ce que Sergio Leone était à John Ford. Un film où il n’y a plus que des brutes et des truands. Ce n’est plus le bon qui triomphe à présent. Il a été tué dès la première bobine. C’est le plus tordu, le plus machiavélique, celui qui, dans l’ombre tire les ficelles. Après le western, la mode est revenue aux montreurs de marionnettes. Au docteur Frankenstein, dont la créature ravage tout sur son passage. Et depuis l’apparition du 3-D, hélas, la créature (Kadyrov ou Assad) est vraiment devenue un monstre. On verra ce qu’en fera Depardieu quand il reprendra le rôle.
Dans le temps, le héros sentait bon le sable chaud. Maintenant, il dégage une odeur de laboratoire. Comme tous les protagonistes sont obligés de se battre, un masque à gaz sur la figure, il est difficile de les distinguer. Pas étonnant dans ces conditions qu’ils nous donnent tous l’envie de quitter la salle en hurlant.
Heureusement, l’histoire du cinéma l’a prouvé, tous les films de genre finissent par lasser. Lorsque Poutine-Frankenstein ne fera plus recette, peut-être retrouvera-t-on le temps de la comédie musicale ? Et puisque l’automne commence, chantons sous la pluie…
PS : à vous recommander, cette magnifique photographie de notre époque, signée Marina Lewycka, « Traders, hippies et hamsters » (éditions des Deux Terres). Un portrait corrosif et tendre à la fois de l’Angleterre d’aujourd’hui qui entremêle vieux idéalistes, traders paumés, flambeurs obsédés par l’argent et la réussite et un pays (qui pourrait être le nôtre) en train de sombrer dans le vide. Un rappel salutaire que la seule façon pour qu’une société continue de vivre, c’est tout bêtement qu’elle retrouve ses convictions, qu’elle combatte pour ses valeurs.
www.berenboom.com

GLASNOST

    Allez ! Les Français déballent tout ! Les bagues et les bijoux en or qui sont dans la famille depuis deux siècles et les collections d’estampes japonaises venues d’un oncle érotomane, l’intégrale des albums Tintin dans l’édition d’origine et la 2 CV qu’on a gardée par nostalgie pour l’époque où on allait coller des affiches appelant à soutenir le « programme commun de la gauche » non par amour de Marchais-Mitterrand mais pour avoir un prétexte d’emmener sur les routes la séduisante petite brunette, si excitée par l’atmosphère des meetings, mais qu’on avait du mal à séduire.

François Hollande a donc choisi la transparence. A quoi ça sert ? A montrer qu’on crache sur les opinions politiques de ses parents mais pas sur leur héritage ? A prouver que la famille savait faire des économies quand elle votait à droite mais que, depuis que les enfants sont devenus militants de gauche, ils ne sont plus capables de gagner un euro ?

Et l’étape suivante, c’est quoi ? Hollande va-t-il obliger ses ministres les mieux nantis à partager leurs biens avec les pauvres secrétaires d’état ou les camarades sans le sou ?

Qu’est-ce que la publication de ces listes de mariage va apporter aux Français ? Savoir que tel ou tel ministre a un compte en banque bien garni et une somptueuse maison de campagne sur la Loire ne fera progresser ni la situation ni le moral des Français. Sauf à investir la fortune de ses ministres dans la reprise des hauts fourneaux de Mittal, de la raffinerie Petroplus et des usines de pneus Goodyear, on ne voit pas très bien à quoi sert la déclaration de patrimoine imposée par M. Hollande aux siens.

Le président français ferait mieux de réviser son cours d’histoire.

Lorsqu’il est arrivé à la tête de l’U.R.S.S., M. Gorbatchev, a lancé un programme de réforme de l’état soviétique, résumé en deux slogans, glasnost (transparence) et perestroïka (restructuration). Résultat : la deuxième puissance mondiale s’effondrait ou plutôt s’évaporait sans laisser de traces. Et s’en allait en morceaux.

Hollande devrait se souvenir des effets redoutables de la transparence avant que l’histoire ne mette une tache blanche dans le petit Larousse à la rubrique présidents de la V ème république entre son successeur et son prédécesseur. Son successeur ? Ils risquent d’être nombreux si la France se retrouve dépecée comme l’Union soviétique d’après la glasnost, avec une république de Flandre au Nord, une Vendée rattachée au Saint-Siège, un Pays basque au sud et une Corse libre au large de la ville-état de Marseille, où le maire, Gérard Depardieu, précurseur de cette France multiple et à géométrie variable, accueillera à bras ouverts ses amis russes, orphelins depuis la chute de Chypre.

www.berenboom.com

 

L’EUROPE EN CHANTANT

    La présidence tournante de l’Union européenne est un parfait symbole de la place de l’Europe dans notre vie. Que celui qui savait que l’Europe était dirigée depuis six mois par la république de Chypre, lève le doigt. Et que son président était communiste – le seul chef d’état communiste du continent ? Seuls les Russes l’avaient remarqué et ils n’en croyaient pas leurs yeux. Rassurons-les, Chypre n’a pas profité de son passage à la tête de l’Union pour opérer le transfert de la dépouille de Lénine – dont le Kremlin ne sait plus que faire- dans le hall de la gare du Quartier-Léopold, en échange de la momie de Gérard Depardieu. Les Chypriotes ont eu tort. Une lacune de plus dans la communication des autorités européennes. Vous imaginez ce qui se serait passé s’ils avaient acheté cet extraordinaire symbole ? Une grandiose cérémonie. Une épouvantable polémique. Au moins, les Chypriotes auraient laissé une trace de leur passage par Bruxelles. Mais non, frileux comme les autres…

Quel est le bilan de six mois d’Europe communiste ? Les prolétaires sont restés sur leur faim. Ils se pressent de plus en plus nombreux aux restos du cœur et autres lieux charitables. Et personne n’a songé à chanter l’Internationale depuis longtemps. Au contraire, les courants nationalistes n’ont jamais été aussi forts, aussi arrogants et aussi inquiétants sur tout le continent, quoiqu’en pensent certains esprits facétieux en Flandre.

Chypre repartie dans son île – restée aussi divisée que l’Europe et aussi tentée qu’elle par la dislocation -, l’arrivée des Irlandais dans le fauteuil présidentiel nous donne un peu d’espoir et nous redonne foi(e) dans l’Europe : avec eux, il n’y a peu de risque qu’elle soit mise en bière. Même si leur passage aux affaires risque de déstabiliser un peu plus encore le régime des pensions dans nos pays, du moins s’ils ont soif d’imposer aux autres Européens leur remède favori. Car, comme le disait déjà Rabelais : « Il y a plus de vieux ivrognes que de vieux médecins »…

Si les Irlandais ont beaucoup à nous apporter, question petite mousse, ils auront peut-être un peu à apprendre de certains pays continentaux question respect du droit des femmes, eux qui sont les derniers à avoir adopté une loi sur l’avortement. Une législation récente qui reste pourtant la plus restrictive d’Europe (et qu’on ne peut comparer qu’à la situation de la Pologne, condamnée il y a quelques semaines par la cour européenne des droits de l’homme).

Allez les filles ! 2013 appartient aux dames : plombières polonaises, amazones irlandaises, hockeyeuses belges, reines hollandaises ! Pussy riots de toute l’Europe, unissez-vous !

www.berenboom.com

CHACUN POUR SOI ET DEPARDIEU POUR TOUS

Quelle affaire cette arrivée de Depardieu en Hainaut ! D’accord, ce n’est pas seulement la beauté des femmes qui l’attire en Belgique. C’est le fric. Le sien. Comme des milliers d’autres Français qui ont choisi de voyager pour payer (légalement) moins d’impôt. Ce n’est pas bien. C’est un vilain pied-de-nez à tous ceux qui ne peuvent pas ou ne veulent pas s’expatrier. Mais de là à provoquer pareille crise de nerfs chez intellectuels et politiques de gauche… Qu’auraient-ils dit si l’homme à la Mammuth était devenu le bras droit des Le Penn ? Dieudonné et Depardieu, c’est tout de même deux dieux différents…

Il y a quelques jours, Edwy Plenel parlait dans ces colonnes de « barbarie ». Barbarie ? Eh, Edwy ! Il ne part pas en Syrie, votre Depardieu, ni à l’est du Congo ni dans le nord du Mali. Même pas en Suisse ou dans les îles exotiques comme quelques-uns des plus grands musiciens anglo-saxons. Ou à Monaco comme beaucoup des meilleurs sportifs belges. Il pose sa moto juste à quelques kilomètres de Mons où les impôts, je vous assure, sont pas piqués des vers…

Barbarie ? Faut faire attention à l’usage des mots. A force d’être banalisée, l’indignation, pour reprendre un autre mot galvaudé, devient une activité aussi révolutionnaire que faire ses courses le samedi avant Noël.

Le problème de Depardieu, c’est qu’à l’instar des grandes gueules qu’il incarne à l’écran, il n’est pas du genre discret. A la différence des autres voyageurs fiscaux. Il aime marquer son territoire quand le besoin pressant s’en fait sentir. Remarquez. On va peut-être y gagner un vrai Belge dans un pays où d’autres, à force de marquer leur territoire de plus en plus petit, vont finir par le faire disparaître. Faudrait peut-être pousser l’ami Gérard en politique. Depardieu contre De Wever. On pourrait s’amuser…

Certes, son attitude est égoïste, un mauvais exemple dans une période terrible où la solidarité devrait être plus que jamais érigée en vertu. Mais l’époque n’est-elle pas à l’égoïsme généralisé ? Chacun veut préserver le bout de son nez pour éviter qu’il ne tombe par grand froid. Il ne faut pas aller loin de chez nous pour déplorer le manque de solidarité. C’est le programme de la N-VA qui veut garder « l’argent flamand en Flandre ». Ou notre pratique quotidienne quand nous téléchargeons des films de Depardieu illégalement parce que, comme lui, on n’a pas envie de payer si on peut l’éviter. Sans nous soucier nous non plus des conséquences.

Qui renoncera cette année au foie gras, à la dinde farcie, au homard à l’Armoriquaine pour nourrir les petits Chinois qui meurent tous de faim ? Quoi ? Les Chinois ne meurent plus tous de faim ? Décidément, tout fout le camp…

www.berenboom.com