AND THE WINNER IS…

  Nous sommes en mesure de vous révéler quelques-uns des prix qui ne seront pas attribués ce samedi soir à la cérémonie des Magritte. 

   Le prix de la plus belle séparation est attribué à Boris Johnson pour son film « Nous ne vieillirons pas ensemble ». Sans doute s’en réjouira-t-il mais qu’il fasse gaffe ! Le cinéma anglais a fait écho à la tentation des Britanniques pour l’éclatement du Royaume-Uni. Dans « Passeport pour Pimlico », ce quartier de Londres déclare son indépendance et son rattachement au duché de Bourgogne. Dans « La Souris qui rugissait », un mini duché au bord de la faillite déclare la guerre aux Etats-Unis (en pariant sur l’habitude des vainqueurs de renflouer les caisses vides du vaincu). 

Le divorce du Royaume de Sa Gracieuse Majesté avec l’Europe continentale pourrait être la première pièce qui s’envole d’un château de cartes. L’annonce d’une implosion du vénérable empire en une multitude de royaumes, comtés ou duchés indépendants. Celui du Sussex est justement disponible à qui veut. A signaler à Bart De Wever qui trouve notre royaume trop grand pour lui. Encore faut-il pour que l’orgueilleux Anversois succède au prince Harry que les autorités du Sussex estiment que Bartje remplit les qualités nécessaires pour être admis à y séjourner. 

 Donald Trump se voit récompensé pour son rôle de décomposition dans « Certains l’aiment chaud ». Son « fantastique » plan de paix entre Israéliens et Palestiniens s’appelait initialement « Noces en Galilée ». Le titre prometteur est rapidement passé à la trappe. Trump a  réussi une fois de plus à jeter des pétards dans des terres déjà ravagées par les incendies. Après l’Ukraine, la Turquie, la Corée, on ne compte plus les conflits où il a emmené la planète au bord du gouffre. Une fois l’apocalypse venue, il restera à envoyer la star diriger « La Guerre des Etoiles ». Reprenant le rôle de Dark Vador, c’est l’univers tout entier qui sera assuré de basculer du côté obscur de la Force. 

  Avec les informateurs royaux, je suis désolé de le reconnaître, on tombe dans une catégorie de films infiniment plus modestes.   

   Le fait que les deux comiques belges soient toujours à l’affiche ne répond pas à la demande des spectateurs. Pour preuve, leur numéro a changé plusieurs fois de titre, ce qui est inquiétant. Appelé d’abord « La Promesse », puis « On purge bébé », il est devenu « La Grande Illusion » même si de prolongation en prolongation, il se soit aussi rebaptisé « Huit et demi » (un film dont le réalisateur avait perdu le scénario) avant de couler. E la nave va…

  Avant d’acter bêtement qu’aucun gouvernement fédéral n’est possible dans notre pays, rappelons-nous que le plus beau film en compétition s’appelle « Nous nous sommes tant aimés »…      

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NOUS NOUS SOMMES TANT AIMES

La comédie italienne a disparu dans l’incendie du Cinema Paradiso, le beau film de G. Tornatore. Mais le cinéma italien était déjà moribond depuis plusieurs années.

Depuis que Silvio Berlusconi était devenu le plus important producteur privé de cinéma, les principaux auteurs, Fellini, Visconti, étaient partis sur la pointe des pieds en même temps que les maîtres de la comédie italienne, entraînant avec eux leurs merveilleux comédiens, Gassman, Sordi, Mastroianni, Manfredi.

Seul ou presque, Nanni Moretti a encore réussi à lancer quelques dernières fusées de détresse. L’une des plus éblouissantes, « Le Caïman » étant justement un portrait sarcastique et désespéré du bonhomme Berlusconi.

L’Italie qui se présente aux élections ce dimanche est à l’image de la décadence de son septième art qui avait été si fécond et merveilleux depuis la fin de la guerre.

Ce sont quelques-unes des plus belles images du cinéma transalpin qui nous reviennent en contemplant l’état de l’Italie et la binette de ses politiciens comme si le mal dont souffre le pays était déjà en germe depuis le début de la république.

L’électeur qui ne sait plus à quel saint se vouer, ressemble aux personnages de « la Dolce Vita » de Fellini, errant sans but, avec la gueule de bois, prêts à se jeter dans la première Fontaine de Trevi pour y retrouver Anita Ekberg et ses paillettes mais irréelle et illusoire.

« Affreux, sales et méchants », la comédie grinçante d’Ettore Scola, semble parfaitement définir la politique italienne en 2018, un bidonville habité par des hâbleurs, type Vittorio Gassman et des vendeurs de vent et d’illusions à la Alberto Sordi. Tandis que dans l’ombre de Berlusconi et de ses inquiétants alliés de la Liga, se glissent les post-fascistes des Fratelli d’Italia.

Privés de leur meilleur cinéma, les Italiens ont oublié à quoi ressemblaient les grotesques mais sinistres marionnettes qui ont conduit Mussolini au pouvoir et maintenu le régime fasciste pendant plus de vingt ans. Que la Rai reprogramme vite « La Marche sur Rome » de Dino Risi, les fascistes version grotesque et « Le Conformiste » de B. Bertolucci version dramatique et glaçante.

Il est vrai que les Italiens ont l’idéologie à géométrie variable. Ils circulent de l’une à l’autre  avec la même facilité que le personnage incarné par Sordi dans « L’art de se débrouiller » de L. Zampa, tour à tour socialiste, fasciste, communiste puis démo-chrétien et parfois le tout en même temps.

Mais la plupart d’entre eux ne sont pas cyniques et ils gardent au fond d’eux le rêve d’une société meilleure et le goût de la civilisation comme le racontait avec tant de nostalgie « Nous nous sommes tant aimés », le chef d’œuvre d’E. Scola. A revoir toutes affaires cessantes avant de regarder les résultats sortis de l’urne.

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