BOUSSOLE

Le prix Nobel de médecine a été attribué à un trio de profs de neurosciences. Ces chercheurs, dont une femme norvégienne (non ! pas suédoise !) et son mari ont découvert qu’au fond de notre cerveau se cachait un super petit GPS.

Cette information me laisse perplexe, moi qui ne suis jamais parvenu à me diriger sans faire mille détours et qui me plante en essayant d’aller de la gare de Schaerbeek à la gare du Nord (évidemment, il y a beaucoup de travaux sans parler des sens uniques). Dois-je en conclure que je ne fais pas tout à fait partie de la race humaine ?

S’il faut choisir le critère du GPS pour distinguer l’homme de la bête, les soldats du califat islamiste sont manifestement plus humains que moi car eux, ils savent où ils vont et ne se laissent pas détourner le moins du monde par les petites bombes et autres artifices que tout le monde (sauf les Turcs) y compris nos braves trouffions leur balancent du ciel. Il faut dire que celui qui programme la boussole des djihadistes vit bien au-dessus des avions et des satellites.

Et Charles Michel ? La nature l’a-t-elle doté de ce fameux GPS interne ?

Oublions que le GPS a été mis au point et continue d’être aux mains du Pentagone. Qu’une Suédoise belge, même pas blonde, soit programmée depuis Washington, cela paraît peu probable.

En revanche, pareil système intégré au fin fond du ciboulot peut se révéler drôlement utile en cas de co-voiturage, une pratique qui a certainement les faveurs d’un habitant comme lui du Brabant wallon obligé de « navetter » tous les jours vers la capitale.

Placé au volant pour une longue route – du moins, on l’espère pour lui-, en compagnie de passagers un peu agités et qui parlent les uns sur les autres et sans sous-titres, Charles Michel va devoir faire la preuve des capacités de son cerveau maintenant qu’il est face à un test grandeur nature. Ou il parvient à se jouer des tournants (bochten), des dos d’âne et autres gendarmes couchés (verkere drempels), des détours (omleiding) et des virages en épingle à cheveu (U-bocht) sans compter les voies barrées (opgelt ! werken !) surtout la nuit par des opposants prêts à tout pour lui mettre des bâtons dans les roues, voire à lui crever les pneus, ou il est comme moi : il fonce droit dans le mur même quand l’obstacle devant lui est gros comme un Bart De Wever cuvée 2010.

Le problème du co-voiturage, tous les spécialistes vous le diront, n’est pas de choisir la bonne route. Le vrai défi est de décider dans quel ordre on va déposer les passagers et quel détour on va prendre pour que chacun arrive à bon port sans perdre trop de temps. Or, avec un GPS, programmé pour ne jamais indiquer la gauche, M. Michel risque de finir par tourner en rond.

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RUMEURS

Quelle est la différence entre info et rumeur ? Depuis que l’instantané est devenu la règle dans toutes les rédactions, communiquer une nouvelle complète, décortiquée et vérifiée ne peut résulter que d’un heureux hasard. L’œil rivé à Twitter et la souris à l’assaut des pages Facebook, le journaliste doit saisir à la seconde où un petit plaisantin l’aura posté le scoop qui lui permettra de boucler sa journée. Peu importe que le lendemain, le tuyau s’avère crevé. Tout le monde l’aura oublié. Mais lui, il aura connu son bref moment de gloire.

« Cécilia, si tu reviens, j’annule tout ! » Qu’est devenu le folliculaire qui a balancé ce faux SMS ? Rédacteur en chef ? Directeur de comm’ ? Porte-parole d’un ministre ?

La confidence de la semaine en France, c’est que Jacques Chirac (comme Brigitte Bardot, il paraît qu’il bouge encore, mais ce n’est peut-être qu’une rumeur) aurait glissé à l’oreille d’un de ses derniers intimes, qui s’est empressé de le répéter à un de ses amis du « Figaro », qu’il soutenait Alain Juppé dans son combat pour recoller la droite. Quand on se souvient, que Chirac avait soutenu François Hollande lors de la dernière présidentielle, à la place de Juppé, je renoncerais immédiatement à la vie politique.

Faute de détails sur les projets que nous prépare notre futur gouvernement, la rumeur est devenue chez nous une véritable épidémie. Syndicats, policiers, chercheurs manifestent déjà contre des mesures que personne ne connaît. Prêts à descendre dans la rue pour s’opposer à des lois qui n’ont pas été votées et dont le texte n’existe même pas au brouillon. A des décisions qui n’ont pas été prises mais dont quelqu’un a murmuré que, selon un bruit de couloir, le conseiller d’un éventuel futur ministre y songerait.

Dire que le nouveau gouvernement n’est pas encore formé, et qu’il ne le sera peut-être jamais. Le voilà déjà paralysé par la levée de boucliers de tous ceux qui savent mieux que lui ce qu’il va décider.

Et si c’était les négociateurs eux-mêmes qui lâchaient ces faux scoops ? Façon de faire descendre les opposants dans la rue tant que Di Rupo est toujours aux affaires. Ainsi, ils auront brûlé toutes leurs cartouches lorsque ces mesures entreront vraiment en application.

La rumeur court aussi sur le casting de nos nouveaux chefs. Privé de sa garde prétorienne, partie combattre Satan, Pieter De Crem aura du mal à forcer les portes du gouvernement. Certains parient que le CD&V pourrait ressortir Dehaene & Martens mais une autre rumeur prétend qu’ils sont morts. Allez savoir !

Le plus étonnant bobard qui circule ces jours-ci est le nom du futur premier ministre. Imaginez-vous que des blagueurs prétendent que Charles Michel serait en tête de liste. Ce qu’on essaye de nous faire avaler, tout de même !

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HOLIDAY ON ICE

De l’été 2014, on ne gardera que des images apocalyptiques, la guerre en Ukraine, le vol MH 17 abattu par les Russes ou leurs compères, le chaos au Moyen Orient, la barbarie des idolâtres autoproclamés d’Allah en Iraq, en n’oubliant pas au passage les massacres en Syrie, au Soudan, en Centrafrique et tutti quanti, le tout nappé d’une bonne couche de virus Ebola. Quel été, mes amis, quel été ! Et dire que, pendant ce temps, la principale préoccupation de nos chefs, durant des nuits entières de caucus, était de départager Marianne Thyssen et Didier Reynders pour le poste de commissaire européen chargé d’on ne savait trop quoi et peu importe.

Mais, un conflit chasse l’autre et les barbaries finissent par se confondre. Les événements les plus atroces sont rarement ceux qui surnagent dans nos souvenirs. Avec le temps, je parie que l’image qui restera de l’été 14, c’est l’ice bucket challenge, cette épidémie qui conduit des gens qu’on croyait sains et normaux à se verser un grand seau d’eau glacé sur le crâne pour éviter de donner des sous aux œuvres qui luttent contre la maladie de Charcot. On se demande qui sont vraiment les malades atteints de dégénérescence ?

Mais, je m’emballe alors que l’idée est peut-être plus subtile qu’il n’y paraît et même qu’elle pourrait inspirer nos politiques. Au bout d’interminables heures de discussions stériles, qui pourrait reprocher à Kris Peeters de vider un grand seau d’eau glacé sur la tête de Charles Michel ? Et l’idole des Bleus n’a-t-elle pas eu la même tentation en apprenant que Di Rupo lui avait piqué les copains et copines du CDH et même ses anciens affidés du FDF pour fabriquer dans son dos des gouvernements régionaux et communautaires sans lui, déjà armés pour lui faire la guerre ? Une bonne couche de glace sur la gueule, c’est drôlement plus relaxant qu’éructer contre les importuns dans les micros de la RTBF. Rien ne vaut un peu de glace pour réchauffer l’atmosphère.

De plus, l’ice bucket challenge a pour motivation d’économiser de l’argent. Ce qui est aussi la principale préoccupation de la nouvelle coalition. Plutôt que de discutailler pendant des semaines pour savoir si on va prendre les citoyens à la gorge avec de nouvelles taxes ou avec une réduction des services sociaux, le nouveau gouvernement pourrait proposer un choix simple à chacun : payer un supplément d’impôt chaque année ou accepter de se faire filmer en public pendant que le contrôleur des contributions vous renverse un grand seau d’eau glacé sur la figure. Avec le risque évidemment, vu les restrictions annoncées du budget de la sécurité sociale, que les frais pour soigner votre pneumonie ne vous soient plus remboursés. On ne fait pas d’omelette sans casser d’œufs.

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LE BON, LA BRUTE, ET LE TRUAND

 

Vous vous souvenez d’Eli Wallach ? C’était lui le Truand dans le célèbre film de Sergio Leone. A 98 ans, il vient de quitter Hollywood pour Dieu sait où, nous laissant seuls avec le Bon, Clint Eastwood, lonesome cowboy, toujours vaillant. La Brute (Lee Van Cleef) avait déjà disparu.

Des trois, c’était évidemment le Truand le plus intéressant. Le bon et la brute, faits d’une pièce, étaient plutôt ennuyeux. Faux derche, pervers malsain, burlesque, attachant et effrayant à la fois, Eli Wallach avait composé un de ces personnages hénaurme, à la Falstaff, qui illuminent l’imaginaire.

Juste le genre de type que le shérif Philippe devrait sortir de son chapeau. Le démineur idéal dans le paysage ravagé de la politique belge, ce village western où des deux côtés de la rue, chacun tire plus vite que son ombre. Mais trouver un acteur de cette trempe, un tel tempérament, c’est rare, très rare.

Dans le rôle du bon et de la brute, le choix est facile. Bart De Wever et Benoît Lutgen sont tout désignés. D’autant qu’ils peuvent jouer indifféremment l’un ou l’autre rôle, et même les deux à la fois. En Bébé Cadum ou en Joë Dalton, Bart et Benoît n’ont guère de rivaux. Mais pour tenir le premier rôle, les prétendants ne se bousculent pas. Il faut bien plus de caractère, de folie, de sournoiserie graveleuse. Être capable de jouer le roi et son fou en même temps. Seul le Truand est fait pour l’emploi de Premier, personne d’autre. Il n’y a que lui pour tenir la baraque ensemble alors que la tempête arrache toit et châssis, pour empêcher la diligence de verser pendant l’attaque des Indiens tandis que les chevaux foncent, le mors aux dents. Pour présider tranquillement le saloon au milieu des bagarres, faire le coup de feu final et enlever la belle serveuse. Qui d’autre peut promettre aux uns et aux autres la même chose et son contraire ? S’enivrer à mort tout en jurant sur les cendres de sa mère qu’il n’a jamais touché une goutte d’alcool ? Le tout sous les applaudissements du public.

Pour incarner un tel personnage, Benoît n’a pas le coffre et Bart pas assez de folie.

Elio alors ou Charles Michel ? Le problème de ce casting c’est qu’on ne voit Elio que dans le rôle du roi et Charles dans celui du fou. Ni l’un ni l’autre ne sont capables d’interpréter les deux rôles en même temps, condition essentielle pour incarner un parfait Truand. Wouter Beke est assez lisse pour se glisser dans la peau du bon, Kriss Peeters assez faux derche pour être une brute tout à fait crédible. Peter De Crem parfait dans le rôle du cadavre, tombé par hasard sous le tir croisé des deux autres. Mais un truand, non. Aucun d’eux n’a le coffre.

Une femme alors dans le rôle de Calamity Jane ? Pourquoi pas ? Saloon Belgium recherche femme désespérément.

 

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BART AU BOIS DORMANT

 

Quand ma maman me lisait « La Belle au Bois dormant », je restais toujours sur ma faim. L’histoire se terminait au moment où le prince donnait un baiser à la Belle. Elle se réveillait, ils tombaient dans les bras l’un de l’autre. Et, hop ! Rideau ! Or, je le sentais bien, après la fin, l’histoire ne faisait que commencer. Voilà comment, docteur Freud, on fabrique des générations d’enfants frustrés.

Je ne sais pas si madame De Wever racontait aussi ce beau conte à son fils, Bartje, – et quelles séquelles il en a gardé – mais, consciemment ou non, devenu grand, le voilà en train de rejouer la belle aventure de Belle au Bois dormant. Et surtout de la compléter. Sacré Bart ! Il va décomplexer les petits flamands !

Dans sa version, revue et corrigée, l’intrigue a un peu évolué. Changement d’époque oblige. La révolution sexuelle est passée par là, au lieu de se taper une princesse, prince Bart doit s’en farcir six. On espère que l’homme a du tempérament. Comme dans la version originale, elles dorment depuis que la mauvaise fée leur a lancé un sort mais certaines ont le sommeil plus agité que d’autres. Charles Michel est hyperkinétique même quand il rêve (ce qui oblige le prince à bien des contorsions avant de déposer ses lèvres sur les siennes) alors que Benoît Lutgen, lui, écrase tranquillement, offrant un corps parfaitement immobile aux baisers princiers. Pour compliquer le scénario, l’auteur a introduit des princesses jumelles que le prince doit embrasser ensemble s’il veut les glisser dans son lit. Ainsi, la jolie Wouter et son clone Kris, deux beautés pour le prix d’une. Mais qu’il faut prendre ensemble ou pas du tout. Ou Elio et Paul, aussi soudées que des sœurs siamoises.

Seigneur ! Où est l’innocence des temps anciens ? Maintenant, c’est tournante et trio d’enfer…

Jadis, un baiser et c’était dans la poche. La princesse se donnait au beau prince. Après, c’était bonheur, enfants mignons et musique sirupeuse made by Disney. Ca, c’est la légende. Dans la réalité, avec six fiancées sur les bras, c’est une autre paire de manches ! De loin, vous enviez prince Bart, vous croyez que six femmes dans un harem, c’est stupre, plaisir et fornication. Pas du tout ! C’est jalousie, violence et crêpage de chignons. Et, le pire, c’est la répartition des tâches ménagères. Un vrai sac de nœuds ! Laurette refuse de faire la vaisselle, Wouter de torcher les lardons. En comparaison, la réforme de l’état est aussi facile à mettre en place que pour un premier ministre chanter l’hymne national. Avec toutes ses princesses sur le dos, je ne vous dis pas dans quel état sera prince Bart dans quelques mois. Je vous parie qu’il n’aura qu’une seule envie, supplier la méchante fée de faire retomber ses belles dans un sommeil éternel et lui, jeter sa couronne aux orties !

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RENTREE SCOLAIRE OU RENTREE POLAIRE ?

Il y a quelque chose de rassurant dans le retour des embouteillages du matin (et du midi et du soir) : l’impression que la vie continue comme avant, paisible et immobile, que tout le monde ou presque peut toujours se payer une auto, un chapeau et le carburant, et que tout roule : feux rouges, commerce, flics, pub, internet et enseignes au néon. Bref, que la crise n’existe pas. On ne tire pas dans les rues, on ne brûle pas les bagnoles. On a l’eau, le gaz et l’électricité, sans coupures, les écoles sont ouvertes. Tout va bien. Dormez ou plutôt roulez, braves gens. La crise ? Quelle crise ?

A se demander même si les énormes chantiers qui ont bloqué une grande partie des routes et des villes durant l’été n’ont pas été décidés juste pour éviter aux citoyens le vertige, la peur du vide devant une trop grande fluidité. On grogne quand la circulation est à l’arrêt mais si l’on se retrouvait seul devant un grand boulevard entièrement dégagé, quelle panique à bord !

Dans la file qui avance au pas, on s’accroche à son volant en se disant, ouf ! On n’est ni à Tripoli, ni à Damas ou à Athènes, ni à Fukushima ou aux Etats-Unis étouffant dans les bras de la fougueuse Irène. Même pas à Londres qui s’enflamme ni dans l’Espagne qui se fissure. Tout juste à Bruxelles, au milieu d’un gigantesque embouteillage. Quelle chance on a !

Mais tout ça n’est qu’apparence. On a beau prendre des précautions pour masquer la réalité et farder les comédiens qui nous dirigent. Insensiblement, le changement s’annonce au bout de la rue. D’abord, on va finir par nous annoncer que tout a un terme, même les affaires courantes, puis l’indexation automatique des salaires, le chômage pépère, les francophones campant en citadelle dans la périphérie et la vie de cocagne.

Tout s’en va. En quelques jours, on a perdu Kadhafi et Joëlle Milquet. C’est un signe. Remarquez que, depuis un an, on a gagné de nouveaux chefs, Bart De Wever, Wouter Beke et Charles Michel. Du sang neuf pour les défis qui nous attendent ?

Avec Bart De Wever, la Flandre n’a plus rien à craindre des centrales nucléaires pourries de l’empire levant : si le nuage atomique se profile à l’horizon, d’un coup de gueule, il le repoussera sur la Wallonie. Wouter Beke devra apprendre de ses aînés l’art magique de la contorsion s’il veut figurer parmi les artistes du Cirque Belgique.

Quant à Charles Michel, il a attendu que sa barbe soit aussi longue que celle de Paul Magnette pour passer aux choses sérieuses : négocier avec Didier Reynders et Olivier Maingain.

Je me demande si le sort de Kadhafi n’est pas plus enviable. Et même celui de Joëlle Milquet…

 

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