ONE FOR MY BABY

   Comment fêter la première Saint Valentin sous Covid ? 

    Au resto, au cinoche, au ski, sur les bords de la Méditerranée, en remontant le Nil, en descendant le Zambèze, en visitant le Louvre, en organisant un bal masqué où seule la bouche restera découverte, en invitant les potes à un apéro sur les échafaudages du Palais de Justice, en s’offrant une place au premier rang du prochain concert de Lous and The Yakuza ? Non, non et non. « Streng verboten » comme braillait l’officier allemand en énonçant une à une toutes les activités interdites dans le camp de prisonniers qui accueillait Jean Gabin, Carette et les autres dans « La grande Illusion ». 

Quoique… 

 Dans une belle lettre écrite à la plume sur du papier épais, pourquoi ne pas vous engager à offrir à votre amoureux-amoureuse tous ces plaisirs dès que vous aurez décroché tous les deux le précieux sésame qui ouvrira les portes du « monde d’après », le certificat de vaccination qui va désormais accompagner nos vies, aussi sûrement que votre tatouage intime ou la photo de votre maman qui ne quitte jamais votre portefeuille ? 

   Déjà les messages entre amoureux prennent un tour inhabituel : « chéri, je ne veux que toi dans ma bulle ! » 

   En attendant, quelques trucs pour faire la fiesta en toute légalité : passez la soirée à monter et à descendre serrés l’un contre l’autre dans un ascenseur (choisir de préférence un immeuble-tour), faire du kayak (l’amour méthode Sophie Wilmès), déboucher des bouteilles de champagne sur le balcon (attention, les policiers très énervés ces derniers temps risquent de répliquer à balles réelles), faire le tour de la terre dans une fusée d’Elon Musk, manger du homard au fond de la mer (la Covid déteste l’eau salée), vous lancer dans une « activité sportive outdoor, sans contact, dans des infrastructures extérieures dans une zone définie de minimum 10 m2 par participant, sans entraîneur actif » (Désolé, la traduction de cette faveur octroyée généreusement aux amoureux par la Ministre Glatigny n’est pas jointe.)   

    Vous pouvez aussi louer un théâtre et réciter sur scène pour, votre invitée du jour, seule dans la salle, « Les Méfaits du tabac » de Tchekhov ou « Le Journal d’un Fou » de Gogol (les monologues russes sont Dieu merci redevenus à la mode depuis le succès de Spoutnik V). «Les Monologues du Vagin » ? Vous pouvez tenter le coup mais c’est du poker… 

Mais le mieux pour séduire votre belle spectatrice est d’écrire vous-même votre monologue. Allez-y carrément, glissez-y tous les sous-entendus que vous rêvez de lui susurrer à l’oreille, aucun critique ne sera en coulisses pour démolir vos efforts ! 

   PS : One for my baby (and one more for the road) a été composée par H. Arlen et J. Mercer. Interprétée par Sinatra, c’est magnifique ; par Ella, c’est sublime!  

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LES POLITICHIENS ABOIENT, LE CORONA PASSE …

  Dans sa tumultueuse conférence de presse consacrée au “déconfinement” la Grande Sophie nous a plongés dans un brouillard londonien directement inspiré de « La Marque jaune ». (Bravo ! Elle a de bonnes lectures !) Un effet de l’heure avancée ? De sept heures de discussion avec les ministres-présidents divers et variés qui parlent au moins trois langues différentes et sans sous-titres ? 

Essayez donc de comprendre le déconfinement en trois phases et demi dont la première se divise en deux mais qui n’en était qu’une pendant que la quatrième ne serait précisée que dès que la troisième aurait été confirmée, le numéro était savoureux. Bravo ! Mais, pourquoi la Grande Sophie a-t-elle le droit de donner son show en live tandis qu’Alex Vizorek a dû annuler son spectacle, ainsi que tous les autres théâtres du pays ?   

En s’efforçant de voir clair dans ce bazar, les commentateurs ont loupé une phrase essentielle de la Première: « Tout ce qui n’est pas autorisé n’est pas permis » a-t-elle glissé au passage comme une évidence. Balayant ainsi, en quelques mots faussement banals, une règle essentielle de notre démocratie : « Tout ce qui n’est pas interdit est autorisé ». Juste le contraire de son affirmation. 

On est surpris qu’aucun groupe politique d’opposition, pourtant si prompt à rappeler aux citoyens qu’il est toujours vivant, n’a relevé ce monstre juridique. 

Ils ont d’autres chats à fouetter ? Depuis qu’on a appris que le deuxième meilleur ami de l’homme est sensible au virus, c’est vrai qu’il faut y prendre garde.

Les principes constitutionnels n’ont de toute façon plus beaucoup d’avenir dans le monde d’après. Avec les applications de flicage sur votre santé, les plus absurdes prévisions d’Orwell sont dépassées. Elles resteront anonymes, vous promet-on. Mais pas pour tout le monde. Si votre téléphone fait « tilt », trois médecins masqués et cagoulés débarquent chez vous et vous emmènent comme un poisson congelé. 

Aujourd’hui, c’est le corona que l’on va tester. Et demain ? Votre état mental ? Le nombre d’heures que vous passez à revoir « Les Feux de l’Amour » ? 

C’est pour d’aussi généreux motifs que certaines universités envisagent un logiciel « anti-triche ». Pour vérifier, si vous êtes étudiant en médecine, que le Dr André, dissimulé sous votre chaise, n’est pas en train de souffler les réponses. Ou que les filles qui font la fête dans votre kot et qu’on aperçoit dans le fond de l’image respectent bien la distance sociale.

Les politichiens aboient, le corona passe…

Méfiez-vous tout de même. C’est Orwell encore qui a écrit: “Le discours politique est destiné à donner aux mensonges l’accent de la vérité, à rendre le meurtre respectable et à donner l’apparence de la solidarité à un simple courant d’air.”

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