LA PLUIE FAIT DES CLAQUETTES

  Jadis, les vieux grognons disaient des jeunes troublions « il leur faudrait une bonne guerre ! » 

  Maintenant, alors que le feu brûle un peu partout sur la planète, on a envie de crier aux excités de tous poils et de toutes religions : « Il leur faudrait une bonne drache ! »

   Au lieu de gémir d’un mois de mai pourri, de terrasses ouvertes aux quatre vents, où il est interdit de se protéger même derrière du plexi, consolez-vous en regardant ce qui se passe dans les régions où le soleil tape dur sur le crâne et où la météo est uniformément bleue, Palestine et Israël, Arabie saoudite et Yémen, Birmanie, Afghanistan, j’en passe et des meilleures destinations exotiques… 

   Et saluez la drache et le vent en songeant qu’il est difficile d’envoyer des missiles sur son voisin quand on est obligé de s’accrocher des deux mains à son parapluie ou courir pour se mettre à l’abri…

   De là à conclure que le réchauffement climatique a aussi un effet néfaste sur les relations entre des états jusqu’ici en paix, il n’y a qu’un pas. Songez aux conséquences politique périlleuses qu’il y aurait pour des nations froides et pluvieuses, donc paisibles, de se transformer en fournaises. Vive la drache ! Voilà un argument supplémentaire qui justifie que l’on se batte pour le climat. Certains écologistes devraient y songer, revenir à leurs fondamentaux et lutter pour la préservation de la planète plutôt que se lancer dans des surenchères électorales et se battre pour que les femmes restent voilées dans les administrations publiques (racontez ça aux femmes iraniennes ou arabes, vous verrez comme ça leur fera plaisir) ou pour faire l’apologie d’organisations terroristes au Proche Orient.

   A ce propos, revenons au ciel… On a l’impression quand il est couvert que les dieux se préoccupent moins de ce qui se passe chez nous quand des voiles épais de nuages leur obscurcissent la vue. Et on s’en réjouit ! 

« Un petit coin de parapluie contre un coin de paradis » chantait jadis Georges Brassens. Aïe ! Cette proposition indécente, me souffle-t-on, n’est plus politiquement correcte… 

Vaux mieux ne pas parler du Proche Orient, ni des relations hommes-femmes. La vie devient difficile pour les chroniqueurs même s’ils ont cru choisir un sujet neutre et de saison, la pluie !  

PS : la pluie est le moment idéal pour plonger dans les livres oubliés de votre bibliothèque rêvée. Question pluie, Graham Greene en connaissait un rayon, lui qui nous entraînait dans des pays tropicaux où la drache est chaude et moite (lire notamment « La Saison des Pluies »). Ajoutez-y « L’inondation » de Zamiatine. Et pour vous sécher, rien ne vaut « L’amour en saison sèche » de Shelby Foote, récemment réédité. 

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PETIT MANUEL DE SAVOIR (SUR) VIVRE…

 à l’attention de ceux qui ne partent pas. 

  Cette année, on ne voyage pas. Ou alors juste dans un rayon de dix kilomètres. Tels ces habitants d’Ecaussinnes, partis (en voiture) s’installer dans le camping d’Ecaussinnes… Pour la douche, ils font l’aller-retour entre leur maison et leur lieu de vacances – ils préfèrent leur salle de bains. Ou comment profiter du meilleur de sa maison et de vacances idéales en même temps. Même Macron n’y a pas pensé. 

   Des vacances immobiles ? Une prolongation du confinement ? Pourquoi pas ? Il y a des nostalgiques du confinement qui évoquent avec regret le calme, le soleil brûlant, le ciel sans avions, les rues sans autos, le boulot sans boulot, les collègues qu’on ne doit plus côtoyer que sur écran – ce qui permet de lire impunément un polar pendant les réunions.  

   Cette année, se risquer au loin c’est masque, thermomètre, peur de l’autre et de l’air conditionné, surveillance, distance et, avec un peu de malchance, quinze jours dans une chambre d’hôtel avec interdiction de la quitter. Dans ce genre d’hôtel, autant vous prévenir, la fenêtre donne rarement sur la mer. 

   Tandis que des vacances sur le balcon, dans le jardin ou le parc des environs, avec un livre, n’est-ce pas ça la liberté ?

   Surtout que les écrivains vous emmèneront plus haut que Ryanair, plus loin que Neckermann. Et ils vous offriront plus d’oxygène que le service des soins intensifs d’Iris sud. 

  Au hasard des découvertes récentes, « Les Patriotes » de Sana Krasikov, qui vous emmène dans le sillage d’une jeune Américaine, partie dans les années trente rejoindre la nouvelle Russie en train de se construire. Toute la tragédie de l’époque stalinienne retracée d’une plume alerte, drôle, enlevée.  

  « Un garçon sur le pas de la porte » où Anne Tyler bouscule, mine de rien, le quotidien en contant les aventures drolatiques d’un tranquille habitant de Baltimore.

  Deux rééditions récentes aussi à mettre sur la pile : « Le transport de AH » de G. Steiner. L’un des seuls romans du brillant intellectuel cosmopolite (mort en février) raconte sur le ton d’une aventure le désarroi des membres d’une expédition chargée de retrouver Hitler réfugié en Amérique latine. Et « L’amour en saison sèche », le vrai « grand roman américain » signé Shelby Foote. 

Rayon polar, « La Vénus de Botticelli Creek » de Keith Mc Cafferty, excellente plongée dans les grands espaces du Montana (encore de l’oxygène !)  A compléter par deux magnifiques thrillers belges de Barbara Abel (« Et les vivants autour ») et de Paul Colize (« Toute la violence des Hommes », qui réveille de façon surprenante les fantômes du conflit serbo-croate à travers les tags de Bruxelles).

 Joyeuses non-vacances !

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