VENT FRAIS

Di Rupo face à Leterme, Royal face à Sarkozy et peut-être Bayrou. Les débats comme les portraits et les émissions politiques ont la cote en ce printemps brûlant et électoral. Même le choc entre Hillary Clinton et Barack Obama, qui n’aura pourtant lieu qu’en 2008, est déjà au menu des conversations de bistrots à Bruxelles. Les citoyens reviendraient-ils à la politique ou est-ce seulement le reflet d’une mode éphémère, stars d’un jour comme hier un mannequin, une princesse, une starlette ou un sportif plus ou moins chargé (de bien des péchés) ?
A entendre leurs discours, les hommes et femmes politiques reviennent aux arguments de fond. Ils ne demandent plus seulement à leur gourou de choisir la couleur de leur chemise, la forme de leur cravate ou le look de leur paire de lunettes, longtemps considérés comme gage de leur succès – pratique qui a entraîné un dangereux rejet du politique, des abstentions record et le succès des partis d’extrême droite. Les choses changent.
Paradoxalement, le fait qu’aucun des trois candidats à l’Elysée ne convainc tout à fait est un signe de démocratie. L’électeur veut décider sur base du contenu de leurs propositions et pas seulement être entraîné par l’émotion, le « charisme », la force d’une personnalité. Le système français –détestable- avait été taillé sur mesure à la gloire du général de Gaulle, pour statufier un mythe. Seul F. Mitterand avait pu se glisser dans cet habit en cachant soigneusement ce qu’il avait fourré au fond des placards. Une nouvelle génération de politiciens arrive. Et le citoyen exige d’être entendu (Internet a accéléré le phénomène), vérifie si les promesses ont été tenues, réclame des comptes en cours de mandat. Je ne sais pas si la « démocratie participative » de S. Royal va fonctionner au cas où elle est élue ou si elle n’est qu’un gadget de marketing mais cette idée est le reflet de cette évolution.
Les scandales à répétition dans la gestion des services publics de Charleroi est aussi le miroir d’une nouvelle façon de voir la politique. « Que me reproche-t-on ? On a toujours fait comme ça ! » criait pathétique l’échevin Despiegeleer quand il a été arrêté. Il n’avait pas tort. Mais il n’a pas compris que cette méthode de gestion de la chose publique, c’est fini.
L’arrivée de Carine Russo en politique après le départ de Marc Wilmots, est un autre symbole. Après une image médiatique choisie par des dirigeants cyniques dans la collection Panini, véloce devant le goal mais incapable de s’intéresser aux débats, voilà une femme qui se présente pour exprimer une expérience de vie et la transformer en termes politiques.
Près de vingt ans après la chute du Mur, on commence peut-être à construire enfin la démocratie…

Alain Berenboom

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AVRIL AU PORTUGAL

On apprenait mercredi dernier, coup sur coup, le transfert de Jean-Pierre Bemba de la RDC au Portugal et celui d’Anne Delvaux de la RTBF au Sénat. Comme il n’existe pas de coïncidence selon mon cousin psychiatre, j’ai tenté d’analyser objectivement le lien entre ces deux événements. Quoi de commun entre Anne Delvaux et Jean-Pierre Bemba ?
D’abord la couleur des cheveux. Attendez avant de crier à la futilité ! Convenez que ce n’est pas par caprice qu’Anne Delvaux, cette belle blonde qui faisait les délices des téléspectateurs mâles, a décidé il y a quelque temps d’assombrir sa chevelure. Comment ne pas penser que cela cachait de noirs desseins ? Imaginez en effet Bemba se teignant en blond. Kabila aurait-il eu besoin de l’exiler ? De là, à penser que Anne Delvaux a choisi de changer de couleur pour quitter son confortable fauteuil de présentatrice vedette, il n’y a qu’un pas. Cela ne prouve rien répliqueront tous ceux qui ont un faible pour les blondes.
Bon, alors, l’humanisme ? Est-ce ça leur commun dénominateur ? On n’a pas toujours célébré les qualités humanistes du principal opposant congolais. Mais, foi de Louis Michel, ses vilaines manies, c’est du passé, juré-craché. Depuis quelques mois, cet homme est devenu un démocrate respectable – grâce aux financements de la commission européenne; ajoutez deux zéros, merci.
Anne Delvaux aussi n’a pris que très récemment le chemin de la démocratie humaniste. Ce n’est que le jour de sa démission, à en croire le reportage diffusé au journal télévisé, qu’elle a découvert les locaux de l’ex-P.S.C.
Reste enfin l’exil. Anne Delvaux a été appelée en politique par un de ses anciens collègues, Jean-Pol Procureur, qui s’est fait l’avocat de Joëlle Milquet. On se rappelle qu’en d’autres temps, il fut le faux mari de la présidente du Sénat Anne-Marie Lizin. Munis de passeports trafiqués, les deux faux époux s’étaient aventurés en Algérie récupérer des enfants victimes d’un rapt parental. Jean-Pierre Bemba non plus n’a pas froid aux yeux mais il dispose d’un vrai passeport – et d’un Boeing. Mais n’est-ce pas par une sorte de rapt qu’il se retrouve aujourd’hui à Lisbonne alors que les électeurs ont voulu qu’il soit la voix de l’opposition à Kinshasa ?
Quoi qu’il en soit, la question qui les taraude tous deux doit être la même : leur avenir est-il devant ou derrière eux ?

PS : Les amoureux de l’Afrique et ceux qui ne le sont pas encore doivent voir d’urgence Si le vent soulève le sable de Marion Hänsel, âpre et magnifique odyssée d’une famille lancée sur les pistes à la recherche de l’eau entre les milices et les soldats soi-disant réguliers. Un film à recommander chaudement à Bemba, Kabila (et à Anne Delvaux !)

Alain Berenboom
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RETOURNER CASAQUE

chronique
Imaginez que, lassé du chômage et des promesses jamais tenues sur le redressement de votre région, le plan Laurel, le plan Hardy, vous quittiez votre maison, vos amis, tout ce que vous aimez pour donner un avenir à vos enfants. Direction : le Kazakhstan, ce far East qui se donne des allures de conquête de l’Ouest de jadis. C’est pas rigolo mais il y a du boulot. Vous n’avez pas grand-chose en poche : les passeurs, la nourriture ont mangé votre maigre pécule. Bien sûr vous n’avez pas de papiers, pas de visa. L’entrée au Kazakhstan par la voie légale est pratiquement impossible. Comme le dit son éternel président : « Notre pays ne peut accueillir toute la misère du monde ». Cela vous rappelle quelque chose mais en kazakh, la phrase sonne plus poétique qu’en français et en flamand. Justement le kazakh. Vous qui connaissez le français, un peu de wallon et quelques mots d’anglais grâce aux jeux vidéos de votre fils, vous vous grattez la tête. Mais vous êtes intelligent, énergique, vous voulez vous intégrer. Donc, vous parvenez à décrocher un petit boulot puis un autre. Votre femme fait les ménages des nouveaux riches. Au bout d’un an, vous vous débrouillez en kazakh. Vous avez appris à déchiffrer les caractères cyrilliques et vous comprenez même le russe, l’autre langue principale du pays. Vos enfants qui brillent à l’école se sont faits des copains avec lesquels ils fêtent Nauryz, le premier jour du mois lunaire, la grande fête chamaniste du printemps. Ils ne peuvent les accompagner lors des voyages scolaires en Russie ou en Ouzbékistan mais ils parlent mieux la langue locale que bien des Russes installés dans la région depuis l’époque stalinienne. Et voilà qu’un jour, vous recevez un ordre de quitter le territoire. Quand vous avez essayé de légaliser votre situation, vous avez découvert que le mot kafkaïen est universel. Les critères de régularisation sont obscurs. Ceux qui obtiennent un permis de séjour doivent jurer de garder le secret. Voilà sept ans que vous êtes là sur les bords de la mer Caspienne, vos à l’école, vous travaillez, décidé à terminer vos jours dans ce pays devenu le vôtre même si de temps en temps la nostalgie de votre petite ville de Wallonie vous taraude, les amis, le foot et les promenades du dimanche sur la rivière. L’office des étrangers, le ministre de l’intérieur n’en ont cure. Back to Brussels south ! Quand vous débarquez, vous avez envie de pleurer. Charleroi est devenue plus étrangère qu’Alma Ata.

Ce billet est dédié à une famille kazakh de Blankenberge installé depuis plus de sept ans en Belgique que le ministre de l’intérieur a décidé de renvoyer malgré une décision du tribunal de Bruges.

Alain Berenboom
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L’HOROSCOPE EUROPEEN CONTINUE…

chronique
Lion :Allemagne. C’est pour mater vos envies d’être le roi des bêtes (et méchants) que l’Europe a été créée. Maintenant, on ne sait plus très bien si vous êtes lion ou si devenu vierge. Depuis que vous avez épousé votre sœur, votre enclos est à nouveau au centre de la ferme. Votre dresseur est une femme à poigne qui mène l’exploitation au doigt et à l’œil. Si elle est venue de l’autre côté du rideau de fer, elle n’a pas l’air de se laisser contaminer par le spectre de la dame de fer.

Balance : Tchéquie. A l’heure où les frères allemands décidaient de se marier, vous avez choisi de vous séparer de votre conjoint slovaque. Cela nous a fait de la peine. On vous appréciait marchant bras dessus, bras dessous. Havel est tchèque, Dubcek slovaque ; le contraire aurait paru aussi magnifique. Votre divorce nous a tous attristés. C’est pourquoi on vous a invités à entrer ensemble dans la famille. On compte maintenant sur votre sens de la folie et de la dérision pour donner un sens à notre avenir. Puisse Mercure et Venus vous inspirer !

Scorpion : Roumanie. Décidément, vous n’avez pas de chance. A l’heure où la plupart de vos voisins rejoignaient la famille, vous traîniez encore loin derrière avec vos camarades bulgares. Finalement, quand vous avez passé la porte, vous avez été accueilli avec des grognements. Trop de clichés vous collaient comme des casseroles : le long règne ubuesque de Ceausescu, une succession de dirigeants plus habiles dans la manipulation et le mensonge que dans la gouvernance, les enfants vendus, la corruption et le château de Dracula. On oublie trop souvent que vos enfants s’appellent aussi Ionesco, Enescu ou la sublime gymnaste Nadia Comanesci. Et que c’est cela le supplément d’âme que vous apportez à la famille.

Sagittaire :Finlande. Grâce à vous (et à vos copains lituaniens et hongrois), l’Europe découvre qu’une partie de la famille parle une langue mystérieuse. Vos écrivains sont excentriques (Arto Paasilinna), votre cinéma étrange et peu compréhensible. C’est peut-être parce que l’Europe a perdu le goût du mystère qu’elle est devenue si ennuyeuse. Et si demain, le finnois devenait la langue unique de l’empire ? Ca nous obligerait à nous poser des questions ; c’est très sain, ça !

Capricorne : Danemark. On dit des capricornes qu’ils ont une vision pessimiste de l’univers et particulièrement de la nature humaine, qu’ils devraient avoir un sentiment plus léger de la vie et réserver une part plus grande à la fantaisie et à la joie de vivre. On ajoute qu’ils ont la critique facile et acerbe et une grande difficulté à faire confiance aux autres. Vous retrouvez-vous dans ce portrait, amis danois ? La question n’est pas provocation de ma part : ne le dites à personne mais, comme vous, je suis capricorne !

Alain Berenboom
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HOROSCOPE EUROPEEN

chronique

POISSON (France)

La rencontre entre Pluton et Venus se passe plutôt mal depuis que Mars vient se mêler de leurs affaires. Méfiez-vous de l’inattendu. Sous ses allures respectables de brave paysan, Mars reste le symbole de la guerre. Il pourrait causer bien du souci à votre couple si vous n’y prenez garde. Un conseil : détournez l’attention par un tour de passe-passe car la séduction de Mars peut vous être fatale.

BELIER (Grande-Bretagne)

Le départ annoncé de Mercure, le petit messager aux pieds agiles, donne des ailes à son frère, le sombre Uranus. Depuis le temps qu’il piaffait pour diriger les affaires ! Mais l’arrivée d’Uranus laisse perplexe. Le reste de la famille européenne attend de voir si Uranus s’intéressera plus que Mercure à leurs intérêts communs. Et, au fond de l’Olympe, de l’autre côté de l’océan, Jupiter ne sait plus à quel saint se vouer pour apporter ses messages, ce que faisait si bien Mercure, toujours prévenant et souriant.

TAUREAU (Pologne)

Deux planètes jumelles tournant l’une autour de l’autre dans une valse folle ne font guère avancer le système. Votre grise mine à tous les deux ne rendent pas votre domaine très accueillant. Pas plus que vos co-locataires, des néo-fascistes peu ragoûtants. D’ailleurs, beaucoup de membres de votre famille préfèrent choisir l’exil, même s’ils ne sont pas toujours accueillis par de belles paroles : le « plombier polonais » est devenu synonyme de repoussoir. Il est temps d’ouvrir les fenêtres sinon vous risquez d’étouffer ce qui reste de la famille !

GEMEAUX (Belgique)

Les deux frères qui vivent en vous semblent se donner le mot pour être désagréables l’un envers l’autre. Ils connaissent à nouveau une période de surchauffe. L’un accuse l’autre d’arrogance ; l’autre réplique que son frère vit à ses dépens. Jusqu’ici leurs querelles n’ont pas empêché le reste de la famille européenne de séjourner dans votre maison mais si votre bagarre débouche sur la rupture, c’est toute la famille qui va partir ailleurs. Prenez-y garde !

CANCER (Luxembourg)

Vous vivez des vices cachés du reste de la famille, accueillant l’argent noir de l’un, blanchissant celui de l’autre. La famille tolère vos manières depuis longtemps mais votre refuge est menacé par une aspiration au grand nettoyage. Connaissant votre habileté à jouer avec les uns et les autres, vous trouverez certainement de nouvelles formules pour reconvertir votre abri.

VIERGE ( Italie)

A côté de votre prédécesseur, vous jouez magnifiquement les vierges. Pourtant, quand on voit le nombre de fiancées que vous avez mises dans votre lit, qui vous ont aidé à arracher les clés de la maison, on se dit que la conception de la virginité a beaucoup évolué en Europe, même dans la ville du Saint-Siège.
(A suivre)

Alain Berenboom
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CHAUD DEVANT

chronique
Vous l’avez entendu comme moi : il paraît que la planète se réchauffe. C’est à cause des échéances électorales. On n’aurait plus d’élections que la Terre tournerait tranquillement entre les quatre saisons. Mais qui souhaite un régime aussi glacé ? C’est chouette les élections : le seul moment où l’on peut rêver à quoi ressemblerait notre vie si les politiciens tenaient leurs promesses. Donc, promis, demain la Terre sera sauvée si nous votons dans le bon sens.
En France, Ségolène Royal promet de mettre en pratique le programme de Nicolas Hulot (car elle tient plus encore à TF1 qu’à la Hollande). En Belgique, le PS se documente à toute vitesse sur la question : comment faire entrer les petits oiseaux dans le plan Marshall ? Même que Dédé Flahaut, comme toujours le premier sur la balle, a mobilisé la Force aérienne pour voir le film de Al Gore, Bible désormais des hommes politiques belges. C’est vrai qu’il y a de belles images, de la musique taraboumboum comme dans les westerns et surtout qu’on comprend le texte. Ce qui change agréablement des rapports de l’ONU, des ONG ou encore des Ecolos qui, ayant déjà sacrifié quelques forêts pour imprimer leur méga-programme, ont renoncé, dans un geste éthique, à imprimer sa traduction dans une langue compréhensible. Pour ne pas être en reste, Didier Reynders profite lui aussi de la vague verte pour augmenter sournoisement les impôts : des éco-taxes, ce ne sont pas des taxes qui étranglent les contribuables mais un cadeau des citoyens à la planète.
C’est à l’heure où l’écologie devient le mainstream que les écologistes semblent avoir perdu la pêche. Etrange paradoxe. Même le magazine Elle s’y met. Entre des pages de pubs pour des sacs en crocos et des rivières de diamants (des produits naturels) et une fille nue en couverture (pour protester sans doute contre le travail des enfants qui permet à l’industrie textile « française » d’accumuler les profits), le numéro de la semaine nous présente les stars convertis à la cause écologique : Di Caprio ne jure que par la Prius de Toyota ; même qu’il a acheté 4 véhicules pour sa famille ! Quant à la somptueuse Darryl Hannah –un modèle pour le réchauffement naturel des mâles-, elle ne roule plus qu’à l’huile de friture. Bien sûr, je sens la fritte quand je descends de voiture, reconnaît-elle mais sauver la planète mérite un tel sacrifice. Puisque le plan Marshall est à la recherche d’idées nouvelles, en voilà une à notre portée : transformer toutes nos stations d’essence en fritkot. L’énergie belge pour sauver la planète, ça vaut bien tous les discours. Avec mayonnaise ou pickles ?

Alain Berenboom
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Mieux vaut être pauvre …

chronique
Il fait bon être pauvre ces temps-ci. En voyant les somptueuses images du film de Pascale Ferran, quel mâle n’a eu une pensée envieuse pour le pauvre garde-chasse de madame Chatterley ? Un pauvre comblé par les émois de sa superbe patronne – une pauvre petite fille riche qui aime les bois, l’eau pure, et les hommes, les vrais.
A propos d’écologie et de nature, d’autres pauvres ont aussi été à l’honneur au congrès du P.S. ce week-end : les automobilistes pauvres. Annonce inattendue du président, le parti s’opposera désormais au projet de taxe frappant les véhicules polluants. Les voitures sales, a-t-il expliqué sans rire, sont le propre des pauvres. Pas question que les vilains capitalistes de l’industrie automobile se fassent des sous en vendant aux moins nantis des voitures moins polluantes avec la complicité sournoise du ministre des Finances ! Qu’on leur laisse leur tas de ferraille ! Pour un peu, M. Di Rupo aurait expliqué qu’agir ainsi est un acte culturel : les vieilles bagnoles devraient être inscrites au patrimoine de l’humanité avec toutes les grandes figures du patrimoine wallon, le carnaval de Binche, les habitations sociales de Charleroi et le sénateur Onkelinkx.
Comme Henri Simons, frais transfuge d’Ecolo, était dans la salle, le président du P.S.s’est empressé de souligner que son combat en faveur du CO2 des pauvres n’ébranlait en rien sa volonté de combattre la pollution par tous les moyens. Ainsi, le circuit de Francorchamps offrira des auto-collants gratuits vantant les mérites des énergies renouvelables aux bolides qui s’aligneront au prochain grand prix. Le texte des auto-collants risquant d’être difficile à déchiffrer vu la vitesse des véhicules, Henri Simons a annoncé qu’il offrira gratuitement aux spectateurs sa superbe collection de lunettes aux montures vertes. Ainsi, il ne sera plus dit que les pauvres n’ont que leurs yeux pour pleurer.
Vis-à-vis des Flamands, la stratégie de M. Di Rupo est hasardeuse. Avec le plan Marshall, il s’était donné l’image d’un homme politique encourageant les jeunes entrepreneurs dynamiques, les industries performantes, les winners enrichis de demain. Un programme qui avait tout pour plaire à l’élite du Nord. Mais espérer devenir premier ministre après avoir fait campagne sur le thème « laissez aux pauvres de Wallonie le droit de rester pauvres », ce sera difficile. Beaucoup plus difficile. Restera en cas d’échec à se consoler en revoyant « La Traversée de Paris » (le beau film que Claude Autant-Lara avait tiré d’une nouvelle de Marcel Aymé) pour cette scène célèbre où Jean Gabin clame : « Salauds de pauvres ! »

Alain Berenboom
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ODE A UNE CREATURE DE RÊVE QUI A 50 ANS

chronique
Que retient-on d’un homme après sa mort ? Une image, une phrase, guère plus. Newton, une pomme. Cambronne, un mot. Henri IV, une poule. Louis XVI, une tête. Arena, une douche. Attila, un steak. Les copains de Maurice Papon ont bien retenu la leçon. Pas bête le coup de la Légion d’honneur. Tant que la presse s’interroge, on l’enterre avec ou sans son hochet ? – comme un écho à la question qui empêche le capitaine Haddock de dormir : la barbe, au-dessus ou en-dessous des draps ? – elle ne revient plus sur son passé, les innocents envoyés à la mort pendant qu’il servait Vichy et les Nazis ou durant la guerre d’Algérie. Un jour, assez vite, on se dira : Papon ? C’est pas le type décoré pour avoir débarrassé la France de quelques étrangers ? Décoré de la légion d’horreur.
Mais, j’ai tort de regretter que les souvenirs s’estompent. Les peuples qui ne parviennent pas à faire le deuil sont aveuglés par la vendetta, paralysés par la douleur de plaies jamais refermées, ivres de vengeance sanglante : en Irak, au Sri-Lanka, en Palestine, entre l’Inde et le Pakistan. A vouloir punir les injustices du passé, on ne parvient qu’à détruire le présent.
La réconciliation des anciens pays ennemis de l’Europe, n’est-ce pas la plus belle réussite du traité de Rome dont on célèbre le cinquantième anniversaire ces jours-ci ? Imaginons à quoi ressembleraient nos régions si les Français, les Polonais ou les Hollandais décidaient de se venger des exactions allemandes ? Les Français des invasions britanniques ? Les Tchèques de nos lâchetés à Munich ? Les Allemands, les Espagnols et les Italiens des crimes de Napoléon ? Les hommes de Neandertal des fanfaronnades des homo sapiens ? Les supporters du Daring de la survie de l’Union saint-gilloise ?
Les errements économiques des responsables européens, leur pusillanimité sur le plan international, l’errance des pouvoirs flottant entre trop d’institutions, le ridicule d’un parlement sans pouvoirs, la gabegie, le quotidien de la –mauvaise-gestion de l’Europe a fait oublier l’audace et la réussite du projet des pères fondateurs, fonder un ensemble politique composé de peuples antagonistes sur des valeurs de paix, de démocratie, sur l’épanouissement économique. Un beau programme, une vraie respiration dans une Histoire faite de guerres et de tourments. Alors, pourquoi l’Europe a-t-elle l’air si triste et si désespéré ? Pourquoi cet anniversaire n’intéresse personne ? Pourquoi ne crie-t-on pas sur tous les toits que l’Europe a réussi cet invraisemblable pari : vivre avec les cicatrices du passé sans ruminer la vengeance. Les cicatrices, c’est drôlement sexy, non ?

Alain Berenboom
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En mars, en mai, …

actualite

Alain Berenboom participe à la Nocturne du texte à la Foire du Livre de Bruxelles le 1er mars à 20h00, où il lit un extrait d’un de ses romans.

Alain Berenboom est l’invité du « Coup de Midi » à la Bibliothèque des Riche-Claires 24 rue des Riches-Claires à Bruxelles (Bourse) le vendredi 11 mai à 12 h 30 où il est interrogé par Jacques De Decker, à propos de son roman « Le Goût amer de l’Amérique » (entrée gratuite).