RETOUR VERS LE FUTUR

Cette semaine, le monde du cinéma célèbre l’anniversaire de la sortie de « Retour vers le Futur » de Robert Zemeckis. D’accord, ce n’est pas « 2001, l’Odyssée de l’Espace » (un film un peu surfait) mais son mélange de rigolade, de nostalgie et de kitsch apporte à ce film, beaucoup moins prétentieux que le SF de Kubrick, une pérennité que personne n’imaginait lors de sa sortie. Et surtout, le ressort de son intrigue reste des plus excitants. Le mérite en revient à H.G. Wells et à sa « Machine à remonter le temps » (un roman indémodable, paru en 1895).

Ici, un ado, Marty Mc Fly, remonte vingt ans en arrière où il se rend compte qu’avant de repartir vers son époque, il doit réparer toutes les complications que son arrivée a provoquées pour éviter d’être effacé de l’Histoire.

En nos temps troublés, où la planète est malade de ses guerres interminables, de ses violences, de sa pollution, où la crise inscrit « no future » sur le front des nouvelles générations, la tentation est grande de se plonger vers le passé, vingt ans en arrière comme Marty, pour voir sur place comment prolonger cette « belle époque » et éviter qu’elle conduise aux dérapages de la nôtre.

1995, la « belle époque », vraiment ?

A l’est de l’Europe, l’Ukraine est tranquille. Mais la Bosnie est à feu et à sang. Il faut le massacre de Srebrenica pour que les Occidentaux sortent enfin de leur léthargie et obligent les parties à arrêter cette abominable guerre civile. Une guerre dont la folie est évoquée cette année-là par le cinéaste serbo-bosniaque E. Kusturica dans « Underground »

En France, à peine éteints les lampions fêtant l’élection à la présidence de Jacques Chirac,  une vague d’attentats islamistes (inaugurée par celui du RER Saint-Michel) entraîne la suspension des accords de Schengen. Pendant ce temps, le nouveau président décide de reprendre les essais nucléaires…

En Afrique, on ne connaît pas encore ces joyeux drilles de Boko-Haram. Mais on compte le million de morts du génocide au Rwanda qui vient de se terminer, en attendant les premières inculpations du TPR.

Au Japon, pas de tsunami cette année-là mais des attaques terroristes au gaz sarin dans le métro de Tokyo commis par la secte Aum (racontées avec émotion par Murakami dans son livre intitulé, coïncidence, « Underground »).

Je préfère vous éviter le pire de l’actualité de cette année-là : l’entrée en fonction du gouvernement Dehaene-Di Rupo, qui eut à gérer aussi mal qu’il soit possible l’affaire Dutroux (Julie et Melissa ont été enlevés en juin) et la crise de la dioxine.

Si Marty remontait en 1995 pour recoller les morceaux de l’Histoire et éviter les drames à venir, il ne saurait où donner de la tête ! « C’était mieux avant », oublions ce slogan qui fait le succès de tous ceux qui veulent effacer notre mémoire.

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ALLO, QUOI ?

Ce n’est pas pour me vanter mais j’ai toujours détesté le téléphone. Aujourd’hui, je sais pourquoi. Je suis abonné chez Base. Encore raté ! Jamais, une créature blonde, l’air glacial à la Kim Novak, le casque sur les oreilles, n’a écouté une seule de mes conversations, n’a enregistré le moindre de mes murmures, n’a rapporté à ses chefs la plus infime syllabe susurrée à mon comptable, à ma maman ou à la STIB. Appuyer sur 1. Appuyer sur 2. Taper étoile.

Même les femmes ont des grandes oreilles, contrairement à ce qu’écrit Haruki Murakami qui, de roman en roman, les décrit avec de délicieuses et minuscules coquillettes de chat. Mais les chats surveillent-ils les conversations transatlantiques ? Pas sur Base, en tout cas. Hélas !

Je découvre, mais un peu tard, que j’aurais dû choisir Belgacom, faire confiance à M. Didier Bellens. Un patron de service public dont le salaire est resté inconnu même des plus fins limiers de la CIA ne peut être tout à fait mauvais.

Si j’étais entré dans le club Belgacom, j’aurais moi aussi été un VIP. J’aurais passé un coup de fil à l’ambassadeur de Syrie en Iran, au frère de Ben Laden aux Etats-Unis ou même au patron de Tecteo juste pour ressentir ce doux frisson à l’idée que toutes les grandes oreilles du monde sont brusquement tournées vers moi et suspendues à mes lèvres. Waw ! La minute de gloire dont nous rêvons tous à croire Andy Warhol.

J’aurais pu être en direct avec la blonde glaciale et lui raconter des choses plaisantes qu’elle aurait notées religieusement en pinçant ses lèvres peintes avant d’aller fièrement porter son petit carnet dans le bureau ovale.

Cette histoire d’écoutes mystérieuses des lignes de Belgacom m’a aussi permis de trouver la réponse à une question que je me posais depuis longtemps. Qui sont ces types que l’on croise dans la rue des types, l’air hyper-sérieux, l’oreille collée à leur GSM, un pli profond creusant leur front, parler en regardant autour d’eux d’un air hostile tandis que leur interlocuteur leur livre manifestement une info top secret ? Des petits hommes verts déguisés en Terriens venus régler le sort de la planète ? Avec mon bête GSM qui ne sert qu’à téléphoner, impossible de vérifier sur-le-champ si la planète bleue tourne toujours autour du Soleil. Je dois attendre de lire Le Soir du lendemain. Mais je comprends mieux le comportement de ces bizarres correspondants. La prochaine fois, j’observerai la forme de leurs oreilles. C’est à leur taille, d’après ce que j’ai compris, qu’on reconnaît un abonné belge de souche de Belgacom. Brusquement, le doute me saisit. Et, si moi aussi ? Non, ne m’obligez pas à allez vérifier devant mon miroir. Je vous jure que je suis abonné à Base.

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