SUPERMAN 19

  Au milieu du tohu-bohu dans lequel nous entraîne à nouveau la vilaine bêbête 19, une lueur d’espoir permet de ne pas verser dans le stress et la désespérance comme tant de gens autour de nous. Ce halo d’optimisme s’appelle Donald Trump. 

  Les détestables experts qui gèrent nos vies depuis quelques mois ne parlent que des effets négatifs de la Covid, de la mort. Jamais de ses effets positifs. Or, le passage de la bêbête sur Trump montre que ces experts nous cachent le meilleur. 

  Madame Covid, dix-neuvième du nom, est capable de transformer un vieillard épuisé, qui a des difficultés respiratoires – et plus toute sa tête- en Superman. 

  Depuis son passage par l’hôpital, on ne reconnaît plus le candidat républicain à l’élection présidentielle. Mister America pète les flammes, vole au-dessus de la foule dans sa grande cape bleue, fait plus de cabrioles verbales que jamais et promet d’embrasser tous les « guys and beautiful women ». Il a rajeuni de vingt ans. 

Dommage que Trump n’a pas couru le Tour de France. Lui n’aurait pas laissé d’improbables Syldaves prendre la Grande Boucle en otage au nez et à la barbe de nos vaillants p’tits gars. 

  Ce qui fait dire à quelques mauvaises langues que si le peloton des favoris s’est montré si amorphe, c’est que Trump avait fait dérober par ses services secrets toutes les réserves de pot belge, comme il promet de le faire des vaccins contre le coronavirus. 

  La seule différence entre Trump et les autres super-héros, c’est qu’il est le seul à laisser tomber le masque. C’est même ainsi qu’on le reconnaît. Car pour le reste, il affiche les mêmes super-pouvoirs que Batman et les autres et il compte bien donner à Joe Biden le baiser mortel de la Femme-Araignée. 

  Pendant ce temps, les cimetières américains ont accueilli plus de deux cent mille morts du coronavirus. So what ? La guerre de Sécession en a laissé plus de sept cent cinquante mille sur le carreau. Elle n’a pas empêché l’économie américaine de repartir aussitôt et de plus belle. On n’est donc pas étonné d’avoir entenduTrump, dès le mois d’avril, promettre à Wall Street le retour du business as usual. A Pâques. Puis pour l’Independance Day, puis pour le Labor Day. Maintenant, ce sera pour Noël. Mais, à condition, qu’il soit élu. Car avec le président Biden, c’est sûr, ce sera moins drôle. Fini les promesses, les projets délirants, la lune et les étoiles.  

  Certes. Mais une fois la page Trump tournée, on dira, comme Louise Glück (la nouvelle prix Nobel de Littérature) dans un de ses poèmes : « Rien n’a été perdu : tout a été détruit. »

  Et on enfoncera le clou avec Emily Dickinson : « Nulle trace – nulle fiction- de ce qui hier éblouissait » (dans « Car l’adieu c’est la nuit »).

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FRANKENSTEIN, LE RETOUR.

  On ne retient généralement que la première partie de « Frankenstein », l’adaptation cinématographique du roman de Mary Shelley (sublimée par Boris Karloff) qui raconte comment un savant audacieux mais maladroit réinsuffle la vie à un cadavre mais se révèle incapable d’empêcher sa créature de s’échapper de son labo et de semer la pagaille dans les environs. 

  Or la fin de l’histoire est tout aussi passionnante. La chute du monstre sonne aussi celle de son géniteur. Furieuse des ravages causés par l’expérience du Dr Frankenstein, la population prend d’assaut sa maison et y met le feu. 

  Pourquoi cette rage ? Pour se venger des dégâts causés par la créature ? Les voyous du coin en font autant sinon pire le samedi soir. Alors, n’est-ce pas plutôt par haine de la science qu’ils s’en prennent au savant ? Un peu comme si des gilets jaunes allaient brûler l’IHU de Marseille où trône le Professeur Raoult après avoir découvert que la chloroquine n’a aucun effet ni sur le rhume ni sur les délires de Donald Trump. 

  Cette espèce de « rage citoyenne » revient à la mode depuis quelque temps, servie par les réseaux sociaux, sur lesquels la surenchère est triste hélas. Encouragée par certains beaux esprits qui voient dans le mouvement des gilets jaunes un écho aux rêves de révolution de leur jeunesse, en oubliant l’origine du mouvement : ces braves gens n’ont pas occupé les ronds-points pour refaire mai 68, lutter pour une autre démocratie ou une planète plus verte mais pour protester contre la hausse du carburant que dévorent leurs SUV. 

   La levée de boucliers contre le masque et les mesures sanitaires est aussi une excellente cause pour ceux qui cherchent à tout prix le baston. Au début de la pandémie, on a tous plus ou moins suivi les consignes des experts, avalé leurs explications, suivi leurs débats, incapables de trancher entre leurs opinions mais respectueux de leurs arguments scientifiques. Puis, les choses ont commencé à s’effilocher, on a commencé à se fatiguer des restrictions, des servitudes, de ce bout de tissu qui étouffe notre vie quotidienne. Et qui provoque à présent des réactions de plus en plus violentes. 

Il y a dans ces manifestations un mélange d’opportunistes (des populistes qui en profitent pour dénoncer le pouvoir politique en place), de crétins mais aussi de ces éternels méfiants qui, depuis la nuit des temps, s’en prennent à la science – les mêmes qui jadis brûlaient les sorcières, dénonçaient Galilée, ou affirmaient que l’homme n’a jamais mis les pieds sur la lune.

 Comme on aimerait qu’un savant fabrique enfin une machine à remonter le temps pour nous envoyer disons dans deux ans, pas plus, contempler la fin de l’histoire de la petite Covidtje…

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