QUI DONC EST FLAMAND ?

chronique
A écouter les émissions de jazz contemporains, on a l’impression que les frontières du jazz ont explosé. Ce qui pose la question : qu’est-ce que le jazz ? Que faut-il pour qu’un musicien entre dans ce club très select ? Pour certains, le mot vient de l’argot « gism/jasm » qui signifie force, exaltation ou sperme. En est-il de même pour les Flamands ?
Je veux dire : quelles qualités faut-il réunir pour être flamand ? Ecartons le sperme. On n’est pas flamand par l’origine familiale; nous ne vivons pas, quoique disent certains, dans le chaudron déjanté des Balkans. Personne ne met en doute la « flamanditude » de M. Leterme ni la « wallonitude » de Laurette Onkelinck. Parler la langue ne suffit pas. Parfaits bilingues, Louis Michel et Didier Reynders ne sont pas (encore) dans la course pour la présidence du NvA ni même celle de la Flandre. Herman de Croo et Mark Eyskens, qui parlent le français le plus châtié de tous les hommes politiques belges, sont flamands, n’en déplaise à leurs détracteurs. S’il fallait classer nos excellences selon la façon dont ils s’expriment, la plupart pourrait d’ailleurs fermer boutique…
Le nom n’est pas non plus une indication : les radicaux flamands comptent sur M. Bourgeois et les Wallingants sur Van Cauwenberghe.
Reste la langue du diplôme mais rien n’empêche d’étudier dans une autre langue que celle dans laquelle on a été élevé. Et le passage d’un enseignement à l’autre devient heureusement de plus en plus à la mode.
Le droit du sol n’est pas non plus une indication à entendre les cris d’orfraie poussés par certains politiciens flamands contre la présence de « francophones » sur leur sacré territoire. Suffit-il de ne pas contester la circulaire Peeters pour être flamand ou d’exiger à tout prix de lire sa note de gaz en français plutôt qu’en chiffres arabes pour perdre cette qualité ?
Quant à notre jeunesse, elle est de plus en plus bigarrée. Un ancêtre venu d’ailleurs sera-t-il demain le seul indice pour être un vrai belge ? Même pas. Ces jeunes se retrouvent aussi obligés de se déclarer flamands ou francophones, malgré eux.
La conclusion qui s’impose est donc que nous sommes tous juifs allemands. Ce qui, soi-dit en passant, résout un certain nombre de problèmes en suspens.

Alain Berenboom
www.berenboom.com

PS : Ce billet est dédié à la mémoire de Kamiel Van Hole. Ecrivain et poète flamand, il fut un amoureux de la liberté, adversaire farouche de l’intolérance. Notamment à travers diverses aventures littéraires qui réunissaient écrivains flamands et francophones, comme « Bloum à Bruxelles » (édition Le Castor astral) et « Drôle de Plumes » (édition Moulinsart). Ou les récitals du 01.10. 2006 contre l’extrême droite.