OTAN EN EMPORTE LE VENT

  A quoi tient l’OTAN ? Le président Macron, qui montre de temps en temps une dangereuse attirance pour les formules choc (qui lui explosent ensuite à la figure), constatait il y a cinq mois à peine que l’Organisation était « en état de mort cérébrale ». Cinq mois… un siècle ! Aujourd’hui, c’est Marine Le Pen qui dénonce avec véhémence l’Alliance atlantique (Georges Marchais doit se retourner dans sa tombe) et Emmanuel Macron qui défend son renforcement et son refinancement (tout en plaidant « en même temps » pour le développement d’une défense européenne). 

  Au début de cette noire décennie, les pires sujets qui agitaient l’Europe il y a un siècle occupent tous les esprits : les épidémies, le nationalisme et la guerre. Retour vers le futur ! Alors qu’on avait cru innocemment que le dérèglement climatique serait le vrai combat de ce siècle et qu’il unirait les nations. Encore raté ! Le seul réchauffement qui intéresse en ce moment est celui provoqué par les canons et les bombes. 

Inutile de souligner que les engins déployés dans la guerre d’Ukraine vont faire exploser tous les indicateurs de CO2. Heureusement pour la planète qu’il y en a un certain nombre qui ont été rapidement détruits ou coulés. 

L’armée russe n’a pas impressionné même Vladimir Poutine mais sa puissance finit par écraser tout sur son passage, même s’il faut y mettre le prix et entraîner d’énormes sacrifices même pour la population russe pour de nombreuses années. Quatre-vingts ans de communisme l’ont habituée, il est vrai, aux pénuries, à la misère et à l’autocratie. Mais, la Russie a un avantage sur l’OTAN : de quelque république ou région de la Fédération qu’ils viennent les soldats obéissent à un seul chef et à une seule stratégie. Tandis que la puissance de l’OTAN repose sur un délicat équilibre entre ses membres. Un puzzle aléatoire de corps d’armée nationaux qui obéissent en grande partie à leurs gouvernements. Enlevez une pièce maîtresse du jeu et le château de cartes risque de s’effondrer. 

Or, Marine Le Pen a inscrit à son programme le départ du commandement intégré de l’OTAN, l’arrêt des coopérations militaires et industrielles avec l’Allemagne et un rapprochement avec la Russie. Si quelqu’un a accès à l’agenda de Vladimir Vladimirovitch, merci de vérifier si sa soirée du dimanche 24 avril a bien été réservée, aller-retour Moscou-Paris et participation à un petit vin d’honneur pour l’entrée de la fifille à l’Elysée. 

Comment l’Europe se défendra-t-elle si la France quitte à la fois l’Union et l’OTAN ? 

On prétend que les chats ont sept vies. Et au-delà, qu’arrive-t-il aux petites bêtes ? Les chats de Marine Le Pen paraissent en effet les avoir toutes épuisées…

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LA PISTE AUX ETOILES

José Manuel Barroso vient de faire ses adieux à un parlement européen plus vide qu’un terminus des TEC un jour de grève. En le voyant une dernière fois remuer sa bouche, ses bras et beaucoup d’air, je trouvais qu’il me rappelait furieusement le Monsieur Loyal qui présentait le spectacle dans les petits cirques de mon enfance. Essayant désespérément de faire croire que les deux lions miteux qui erraient l’oreille basse sur la piste étaient de redoutables bêtes sauvages à peine débarquées de la savane pour effrayer les petits enfants comme moi. Quand l’équilibriste était vraiment trop maladroit – ou trop saoul- il lançait l’orchestre badaboum ! et racontait des histoires, façon de détourner notre attention. Et il s’empressait de faire évacuer les clowns qui n’avaient fait rire personne pour laisser la place au dresseur de puces savantes.

Comme Mr Loyal, Barroso a passé en revue avec tambour et trompettes, les dix années de sa présidence. Quel talent pour faire passer ses misérables échecs pour de brillantes réussites. Et on applaudit !

Dix années ravageuses pour l’emploi. Le social n’étant pas ou si peu de la compétence de l’Union, on suppose que c’est pour ça qu’il n’a pas prononcé le mot chômage. Ce sera pour les artistes de la nouvelle distribution. En piste, Marianne Thyssen !

La crise ? Ah ! Groz katastroff mais c’est la faute aux Américains. Au suivant !

Le réchauffement climatique ? C’est la faute aux Chinois. Au suivant !

La montée des nationalismes et des néo-fascistes pendant ses deux mandats ? Que me reprochez-vous là ? En Suisse et en Norvège aussi, la peste brune est de retour… Pas non plus le problème de l’Europe.

L’effondrement de l’appétit pour un destin européen commun ? Le rejet par les jeunes de l’Europe ? Barroso ne s’en était même pas rendu compte. Là-haut sur son estrade, tout près de l’orchestre, Mr Loyal n’entend pas les cris du public.

Faut ajouter que sa troupe a largement puisé ses éclopés, bras cassés et autres vieux rescapés dans d’autres cirques en faillite. Le clown blanc, Herman Van Rompuy n’a pas réussi à dérider l’assistance une seule fois. Et l’auguste, la pourtant joyeuse Catherine Ashton, n’a fait rire que Vladimir Poutine, ce qui est idiot, vu qu’il n’a pas payé son ticket.

L’Europe voulait du souffle. Elle a eu une baudruche. Son erreur a sans doute été de moisir avec de vieilles attractions au lieu de mettre l’imagination au pouvoir. Plutôt que de s’inspirer de vieux cirques malades, il aurait dû regarder le cirque Plume pour se réinventer dans la légèreté, le musée Guggenheim de Bilbao pour redonner des ailes aux villes endormies…

Et si c’était les choses inutiles qui allaient sauver l’Europe ? La seule chose que les autres continents nous envient.

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