L’EUROPE, QUEL LEURRE ! 

 Dans un siècle, lorsque les touristes visiteront le musée de l’Europe, quels trésors verront-ils exposés ? Guidés par la voix de Charles Michel, reconstituée par IA, les visiteurs l’entendront expliquer pourquoi la première vitrine présente un bête fauteuil et un banal sofa. 

« Le souvenir d’une visite chez le grand chef turc. J’ai laissé le sofa à Madame van der Leyen qui était un peu fatiguée et souhaitait piquer un roupillon pendant que j’écoutais le président turc de l’époque, M. Erdogan, me raconter des salades. De toute façon, ça n’avait pas d’importance. L’Europe n’avait rien à dire en matière de politique étrangère. » 

Dans la seconde vitrine, sont pendues les photos d’un certain nombre de députés qui ont émargé au budget d’états lointains, Qatar, Maroc, Chine, Russie. Que d’argent dépensé en vain par des potentats qui s’imaginaient que leurs pauvres faisans avaient le pouvoir de vendre leur soupe à leurs collègues.   

  Dans la troisième vitrine, encore des fauteuils, 705 pour être précis, en modèle réduit. C’est le nombre de parlementaires qui siégeaient tantôt à Strasbourg, tantôt à Bruxelles, errant sur les routes tels les rois fainéants, avec cartons, assistants et secrétaires. Tout ce beau monde préparait longuement des textes qui, lorsqu’ils finissaient par être publiés, ne ressemblaient jamais à ceux qu’ils avaient votés. Car les projets étaient revus par la Commission, qui les modifiait, les édulcorait, les rendait plus compliqués, et les truffait d’exceptions pour éviter de déplaire aux uns ou aux autres. Avant que le parlement à nouveau les tricote et détricote, introduise les suggestions des lobbys qui pullulaient autour d’eux comme des colonies de moustiques. Avant de renvoyer le tout au Conseil des Ministres qui faisait de toute façon ce qu’il voulait. On lira sur les écrans accrochés au mur, des milliers de directives et de règlements qui ont ainsi été adoptés, en vingt-sept langues mais pas une seule compréhensible par les citoyens. Cent ans plus tard, soupire notre guide, on recherche encore désespérément la pierre de Rosette. 

 Et là, ce grand espace vide s’appelait l’Ukraine, c’était l’Europe et ce ne l’était pas. La Russie la tirait à elle tandis que nous nous disputions sur son sort. Finalement, on a rasé le pays, c’était plus simple, ainsi elle n’appartenait plus à personne. Nous aurions pu mettre plus d’énergie, de fonds et de célérité à la protéger et à lui donner tous les moyens de résister. Mais l’Europe n’avait rien à dire en matière de défense…

Alors que faisait ce fameux parlement ? demande un jeune visiteur. Ah ! Il a pris une série de règles en matière de dimension des poissons, notamment les directives 2019/2006 et 1224/2009.

Résultat, il n’y a plus de poissons dans nos océans…

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LEURRE D’ETE

 

Faute de moyens (ah ! la crise ! toujours la crise !), le ministère de l’intérieur a trouvé la recette miracle pour remplacer les policiers, qui coûtent chers, par du carton, récupéré dans les sacs jaunes. Cela s’appelle un leurre : une photo de flic grandeur nature collée sur un panneau, dont la silhouette, soigneusement découpée, donnera aux chauffards l’illusion que la maréchaussée veille sur le bord de la route, prête à châtier. A 150 km. à l’heure, bonne chance pour distinguer un vrai flic de son clone !

C’est moins intelligent qu’un radar mais tellement moins violent que les cognes des chemins de fer ou de la zone Bruxelles-Ixelles. Et sans doute plus efficace.

L’idée pourrait faire son chemin et être étendue à d’autres activités sans que le public ne se rende compte de la substitution. Ainsi, au parlement.

La désaffection de la majorité des députés aux séances publiques a largement contribué à la dégradation de le la démocratie et au désenchantement des citoyens. Quelques photos collées sur des panneaux de carton pourraient renverser la vapeur. Des marionnettes à l’effigie de nos représentants soigneusement posées sur leurs sièges lorsque les caméras se tournent vers eux et hop ! le tour est joué ! Comme les téléspectateurs ont l’habitude d’avaler tout ce qu’ils voient sur leur petit écran, ils auront l’impression que les politiciens ont entendu le message de leur désarroi et sont venus en masse accomplir leur mandat. De toute façon, comme les parlementaires sont habitués à ne pas discuter ce que leur président de parti a décidé dans son coin, personne ne verra la différence.

Le procédé du leurre pourrait aussi contribuer à sauver l’image des grandes entreprises européennes à la dérive. La fermeture des sites de Mittal et de quelques autres fleurons de nos industries lourdes a plombé les discours de la région wallonne et les rodomontades de ses ministres sur la réussite de la reconversion économique. Il suffit de remplacer la langue de bois par des panneaux de bois pour que l’illusion soit parfaite.

De loin, qu’est-ce qui ressemble le plus à un haut fourneau en activité qu’une belle photo couleurs en 3-D, grandeur nature, d’un haut-fourneau en activité ? En plus, c’est plus propre, moins polluant et moins dangereux pour la santé des travailleurs et des riverains.

Et cela contribuera même au développement de l’emploi puisqu’il faudra faire appel à des artistes pour que les clichés soient parfaits. Et à de vrais policiers (libérés par la pose de leurs leurres le long des routes) pour empêcher les curieux de s’approcher de trop près et les syndicalistes, toujours réticents devant la modernité, de manifester.

L’heure du leurre a sonné. Tu veux ma photo ?

 

 

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