COUPS BAS A BACKOU

   Désolons-nous une fois de plus de la myopie des observateurs internationaux et autres bonnes consciences. On a l’impression que les événements qui se déroulent à Gaza et la guerre menée par la Russie à l’Ukraine doivent occulter toutes les autres atteintes graves aux droits de l’homme, dont le catalogue des méfaits est plus long que celui de la Série Noire et souvent tout aussi anciens (elle fête 80 ans d’existence et 2.743 titres numérotés).

   Il y a des méchants qu’on dénonce à grands cris et d’autres, tout aussi affreux, dont on glisse les diableries sous le tapis. On ne sait où donner de la tête entre les exactions des militaires birmans et de leurs collègues soudanais, et les Houthis qui ont réduit leur pauvre pays, le Yemen, à une terre perdue comme le font les autres suppôts de l’Iran, le Hamas et le Hezbollah. 

 L’actualité remet en lumière une autre dictature où les atteintes aux droits de l’homme semblent timidement acceptées par les démocraties européennes, l’Azerbaïdjan. 

  L’Azerbaïdjan et l’Arménie se disputent depuis un siècle au moins la région du Haut Karabagh, peuplée en grande majorité d’Arméniens mais géographiquement une enclave dans le territoire azéri. Ce qui a conduit à plusieurs pogroms d’Arméniens par les Azéris dès la fin de la première guerre mondiale puis après l’effondrement de l’URSS. Auto-proclamée république indépendante, le Haut Karabagh a été attaqué au cours de deux guerres en 1994 et 2020 par les Azéris (avec l’aide des Turcs) puis annexé par les Azéris en septembre 2023 poussant l’essentiel de la population à fuir leurs terres et à se réfugier en Arménie (à laquelle la Russie a proposé son aide avec le résultat que l’on devine). 

Ce nettoyage ethnique et cet anschluss n’ont pas encore comblé le potentat azéri, Ilham Aliyev. Cerise sur le gâteau, il a envoyé les principaux ex-dirigeants vaincus et un certain nombre d’autres otages devant ses « tribunaux ». Ces hommes, a relevé le Parlement européen dans une résolution du 13 mars 2025, ont été soumis à des traitements inhumains et dégradants. Aussi, le Parlement a demandé la suspension du protocole de partenariat entre l’UE et l’Azerbaïdjan de 2022 dans le domaine de l’énergie et insisté pour lier tout futur accord de partenariat entre l’Union et l’Azerbaïdjan à la libération des prisonniers politiques et à une amélioration de la situation des droits de l’homme dans le pays, un sacré chantier. 

Vœux pieux évidemment car depuis la suspension des accords de fourniture d’énergie avec la Russie, l’Europe s’est jetée sur le gaz azéri dont les importations devraient doubler d’ici deux ans. 

Pour éviter de l’eau dans le gaz qui viendrait couper le robinet, les dirigeants européens et la commission préfèrent regarder ailleurs cette nouvelle persécution des Arméniens et des opposants azéris.

Songeons-y en préparant notre repas sur le réchaud à gaz ce soir…   

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SOMMEIL MONDIAL SUR LE CLIMAT

  Les politiciens du monde entier se sont retrouvés cette semaine à Bakou, sur les bords de la mer Caspienne, à discourir fièrement dans les salles du gigantesque Palais des Congrès. Un temple en béton dans lequel s’est tenu de manière absurde le concours Eurovision de la chanson il y a une dizaine d’années. L’Azerbaïdjan en Europe ? Ce sont les Ukrainiens qui doivent se gratter le crâne en se demandant pourquoi les Russes trouvent normal que les Azeris soient Européens le temps d’une chanson alors qu’ils leur interdisent de faire partie du continent dans lequel ils sont géographiquement implantés.  

  C’est vrai que le président azéri ressemble à Poutine comme deux gouttes de nitroglycérine, y compris pour son goût prononcé d’envahir le territoire convoité de ses voisins. 

   La Cop 29 attend pour conclure et décider combien de milliards de dollars seront dépensés à lutter contre le dérèglement climatique que le G 20 qui se tient au même moment de l’autre côté du globe, à Rio, débloque l’argent nécessaire ou décide d’attendre la fin du mandat de Trump avant de songer à sauver notre pauvre planète bleue. 

  On se demande en passant pourquoi les dernières COP se tiennent dans des pays dont l’activité principale est l’extraction pétrolière (l’an dernier à Dubaï), une des sources incontestées de la dégradation climatique. Il est vrai que cette fois, à Bakou, les participants ont pu se consoler en avalant du caviar à chaque repas, une des richesses de la Caspienne, par ailleurs la mer la plus polluée du monde. Ce qui explique peut-être pourquoi le caviar a la couleur du pétrole. Mais son goût est un peu plus salé.

   Les grands (et moins grands) de ce monde se sont bousculés pour se montrer sur la photo de groupe à Bakou. Rien que pour notre petit pays, 140 personnes avaient reçu ticket d’avion, chambre d’hôtel et badge. Parmi eux cinq ministres dont quatre en affaires courantes. Quatre ministres qui auront quitté leurs fonctions dans quelques semaines au plus tard pour décider de l’avenir de la planète, tout un symbole…

   Pendant que les représentants les plus huppés de la race humaine se déplaçaient en masse par avion entre le centre de l’Asie et l’Amérique du Sud pour sauver, parait-il, notre espèce de la destruction, les scientifiques annonçaient la disparition définitive d’une nouvelle race d’animal, le courlis à bec grêle. Un oiseau raffiné et élégant qui a même fréquenté nos régions – mais il y a plus d’un siècle. Le lien avec Bakou ? Le courlis se reproduisait en été dans les plaines d’Asie centrale. Or, depuis que celles-ci ont été transformées en terres agricoles et en terrains pétrolifères, l’oiseau a perdu son territoire naturel. Ce n’est pas la multiplication des politiciens belges dans la région qui va sauver leur reproduction… 

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