Babel Brussel

chronique
Même les Israéliens l’ont compris : le plan de paix avec les Palestiniens conduira à la partition de Jérusalem. L’est aux Palestiniens, la ville nouvelle aux Israéliens. Seul problème de la division de Bruxelles entre le nouvel état flamand et la Belgique française, le tracé de la frontière dans la capitale. A Jérusalem, c’est simple, il y a une ville arabe et une ville juive. Même New York pourrait rendre un quartier à l’Italie, un autre à la Russie. Mais à Bruxelles, comment procéder ? Les Flamands ne se contenteront pas de la rue Antoine Dansaert, qui n’aurait aucune liaison avec la Flandre si le reste de Bruxelles devenait la capitale des francophones. Obliger les navetteurs flamands à entrer chaque matin dans Brussel par le canal de Willebroeck sera difficile à imposer. Le parcours ne semble poétique qu’à ceux qui confondent les environs du Petit Château avec le Grand Canal à Venise.
De plus, avec le nombre de ministres du futur gouvernement flamand (un vieux vice belge), la rue Dansaert sera vite saturée, sauf à installer ces excellences dans les cuisines des restos branchés du coin.
Une autre solution serait de remonter dans l’Histoire et de séparer Bruxelles selon les communes qui parlaient brussel vloms et celles qui causaient sur le brussellois. Malheureusement, la ligne de partage entre les deux dialectes est aussi oubliée que l’histoire de la lutte homérique entre le Daring et l’Union saint gilloise.
Découper Bruxelles alors selon les cinémas ? L’UGC aux fransquillons et Kinépolis aux Flamands ? Nous perdrions l’Atomium, symbole de l’entrée de la Belgique dans la modernité, qui deviendrait l’emblème de la Flandre, nous laissant Manneken Pis, maigre consolation. De toute façon comme les spectateurs privilégient les films américains, allez distinguer entre Flamands et francophones selon les écrans !
La Flandre des winners proposera peut-être de découper Bruxelles en se souciant plutôt de l’activité économique : à la Flandre, les rues dans lesquelles se trouvent des agences de la Kredietbank. Prétexte pour grignoter la capitale en traçant des couloirs pour relier les quartiers KB entre eux. Cette solution, on en conviendra, est aussi ridicule que celle qui consiste à instaurer un cordon entre Boitsfort et Braine l’Alleud. Oublions aussi la solution de type université de Louvain : les numéros pairs aux Flamands et les impairs aux francophones.
Alors, inextricable ? Pas tout à fait. A une question épineuse, une réponse audacieuse. Voici ce que je propose : débarrassons-nous une fois pour toute de ces francophones et de ces flamands ! Expulsons-les de Bruxelles pour laisser la ville aux étrangers. A ceux qui aiment notre belle capitale et qui ne la soumettent pas à ces marchandages misérables.

Alain Berenboom
www.berenboom.com