FAITES UN MUR, PAS LA GUERRE

   Un mur ? Voilà la bête solution proposée par la Pologne pour fermer sa frontière avec la Biélorussie et empêcher des immigrés fuyant l’Iraq et la Syrie de pénétrer sur son territoire sacré. « Faites un mur, pas la guerre », le slogan est vraiment simpliste mais il touche facilement les citoyens européens effrayés par cette « vague migratoire ». Protégé par ce rempart, on n’entendra plus parler de cette horde qu’on craint de voir déferler sur nous ! Beaucoup protestent en oubliant que les Polonais ne sont pas les premiers Européens à construire un bastion contre les étrangers. Il y a déjà une redoutable barrière à Ceuta, la ville espagnole située sur la côte africaine, pour empêcher de passer du Maroc en Espagne. Un ensemble de clôtures et de barbelés construits avec l’aide financière de l’Union européenne depuis 2001. Au pied de laquelle on compte plusieurs morts, abattus par les forces de sécurité. Les autres candidats à l’exil ? Eh bien, ils sont passés évidemment. Au-dessus, en-dessous, sur le côté…

  Si un mur avait séparé la France de l’Algérie, la famille de Zemmour aurait-elle traversé la Méditerranée ? S’il y en avait eu un entre l’Allemagne et l’Autriche en 1913, Hitler serait-il resté dans son pays pour finir comme un obscur barbouilleur ? 

   Savez-vous que la préfecture de Paris a construit il y a quelques semaines un mur entre Pantin et Paris ? Façon, prétend sans rire le préfet de Paris, d’éviter l’arrivée de vendeurs de drogues venus de Seine St Denis dans la capitale ! 

   Grâce au mur, rêvent ses constructeurs, on ne voit plus ce qui se passe de l’autre côté. On n’entend plus rien, sinon un vague murmure. Méfiez-vous des murmures. Dans un de ses « poèmes barbares » Leconte de Lisles écrivait : « J’entends un immense murmure/Pareil aux hurlements de la mer ou des loups ». 

   Si l’Europe n’est plus capable d’accueillir ceux qui sont chassés par la dictature, la répression, les malheurs, que reste-t-il des valeurs sur base desquelles elle prétend s’être bâtie ? On semble oublier combien d’immigrés ont fait la grandeur de notre civilisation, de nos pays, comme le rappelle cette semaine avec un clin d’œil Joséphine Baker, tellement plus française que bien de soi-disant Français « de souche ». Pendant que les Français la portent solennellement au Panthéon, ils laissent mourir en mer des candidats à l’exil partis vers la Grande-Bretagne, trop contents d’en être débarrassés. Avec l’approbation de notre ministre de l’Intérieur. 

Une idée pour redorer le blason de ce pauvre Rudi Vervoort. Ne pourrait-il charger les chauffeurs Uber, qui se tournent les pouces, de recueillir et de promener au chaud les malheureux étrangers qui errent sans logis dans les rues de Bruxelles ou crèvent de froid devant le Petit-Château ?  

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