APOCALYPSE NOW

Chaque semaine, on se dit que le pire est derrière nous et la semaine suivante est pire encore. A peine se manifeste un signe d’espoir que crac ! une nouvelle tuile nous tombe sur la tête. Mais que fait donc le scénariste de cet épouvantable feuilleton ? A-t-il oublié qu’une des règles de tout raconteur d’histoires est d’alterner les scènes de drame et les moments de respiration, un sourire entre deux morts ? Sans oublier l’happy end. Mais l’actualité ressemble désormais à un « Derrick », glauque, désespéré, sans suspens – et sans pétrole. On a l’impression d’être condamné à vivre en Allemagne de l’est jusqu’à la fin des temps sans même un mur derrière lequel rêver que le paradis est à portée de la main.
Tenez, à peine était-on débarrassé d’Yves Leterme que l’on nous annonce que la N.-V.A. caracole en tête des sondages. Vous imaginez la prochaine législature ? Bart De Wever en premier ministre. Avec Modrikamen aux Finances, Jean-Marie Dedecker à la Justice et Michel Daerden à la Santé publique ou pire, aux Pensions. Il ne nous restera plus qu’à nous réfugier en Grèce.
En Grèce où l’euro est en train de transformer la monnaie unique européenne en drachme national.
Comme si nos malheurs politico-économiques ne suffisaient pas à attirer l’attention des spectateurs et leurs larmes, le scénariste a imaginé de faire aussi gronder les éléments. Sous l’influence de cette mode redoutable des effets spéciaux. Avec un volcan dont les déjections paralysent la planète. Les réserves pétrolières du golfe du Mexique qui explosent et dévastent les côtes du sud des Etats-Unis. Le gaz qui se répand à Liège. La terre qui tremble au Chili ou à Haïti. Ne manque plus que la scission de B.H.V. pour que les humains rendent définitivement les armes et s’effacent de la planète comme jadis les dinosaures.
Heureusement, quelques signes permettent d’espérer que le printemps finira par émerger de ce chaos. En juin, le roi se rend au Congo. Y a-t-il une image plus rassurante, une meilleure preuve de l’existence de la Belgique que celle-là ? Albert à Kinshasa, c’est le retour de Bwana Kitoko, de Tintin arpentant le monde pour sauver nos amis et terrasser les mauvais. L’image du temps béni des boîtes de biscuits Delacre et de l’odeur du chocolat Côte d’or sur les quais de la gare du Midi.
Le seul problème c’est que notre fichue constitution a prévu que le roi ne peut jamais se déplacer sans une cohorte de ministres. Et quinze jours après les élections, qui c’est qui écrira le discours royal ? Bart De Wever ? Michel Daerden? Mischa Modrikamen? Ce jour-là, on rêve d’un bon gros nuage de poussières…

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