L’ARCHE DE NOE

  Le déluge dura quarante jours et quarante nuits, nous apprend la Bible. Et Noé de se plaindre ? Alors que nous, ça fait combien de semaines que le ciel nous déverse sur la tête l’eau du bain ? A entendre les bulletins météo, à contempler la montée des eaux, il serait prudent de construire au plus vite une arche pour mettre à l’abri des tempêtes les représentants des races vivantes pour que certaines survivent lorsque les eaux se retireront. Puisque la Belgique prend la tête de l’Europe pour six mois, en voilà un projet mobilisateur !

Reste l’essentiel : comment désigner les élus qui vont échapper à la destruction ? 

Dans l’Ancien Testament, Dieu demande à Noé de choisir sept couples d’animaux purs, d’oiseaux, d’animaux impurs également par couple et vogue la galère. 

Premier obstacle pour Alexandre De Croo, s’il se lance dans l’aventure, comment définir un couple ? Un homme et une femme ? Et les couples homosexuels ? Les autres, on les flanque à l’eau ? On entend d’ici les associations LGBT+… 

Pour les animaux, c’est simple, lion, souris, araignées, cheval, perdreau, mâle et femelle, on en prend deux de chaque et on les embarque. Mais pour les humains, comment faire ? Qui éliminer ? Accueillir à bord un représentant de chaque parti politique existant sur la planète ? Il y en a des centaines en Europe. Et dans le monde, on ne compte plus. Rien qu’en R.D. du Congo, il y en a 910. Ajoutez-y les conjoints. Qui pourrait construire un bateau aussi immense pour emporter tant de passagers ? Alors comment opérer la sélection ? En écartant ceux qui crient le plus ? Il ne restera pas grand monde. Si on élimine Tom Van Grieken, Marine Le Pen et Geert Wilders par exemple, leurs électeurs vont protester et ils sont bien plus nombreux que ceux que je préfèrerais sauver…

On pourrait aussi oublier les simples élus et n’embarquer que les dirigeants. Même si ce sont des dictateurs ? Poutine, Xi Jin Ping… 

Si on se limite aux chefs d’état démocratiquement élus, on embarque Tshisekedi, Erdogan, Orban ? Ainsi que Trump s’il remporte la prochaine présidentielle ? 

On pourrait aussi se contenter des représentants de Dieu, François et l’ayatollah Ali Khamenei. Mais la Bible veut qu’on ne prenne que des couples.  

Avec cette sacrée bande, elle sera chouette l’atmosphère à bord. Surtout que tous ces prétentieux n’ont pas l’habitude partager ni repas ni cabines. Connaissant leur mauvais caractère, ils vont finir par faire passer leurs voisins de table par-dessus bord. Si bien qu’à la fin de la croisière, une fois le déluge apaisé, il ne restera sur terre que les animaux qui auront contemplé en baillant les humains se détruire les uns après les autres. On aimerait contempler le monde serein qu’ils vont reconstruire une fois les humains disparus…    

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APOCALYPSE NOW !

  Dans une interview publiée dans votre quotidien favori à l’occasion de la parution de son essai « Devant l’effondrement », Yves Cochet annonçait d’une voix caverneuse la fin du monde quelque part entre 2020 et 2030. Ce qui ne nous laisse pas beaucoup de temps pour rentrer le bois du prochain hiver et faire la révision de la voiture avant le passage au contrôle technique. 

  Cochet avait été ministre dans le gouvernement Jospin, juste avant l’effondrement du patron des socialistes français puis il a assisté à l’effondrement du parti vert français, miné par des batailles d’égos entre des dirigeants plus nombreux que leurs électeurs. 

  C’est dire que l’apocalypse, il en connaît un bout. Donc, quand il prédit la fin du monde pour dans quelques mois, on l’écoute – poliment. Cochet avait déjà deviné il y a une quinzaine d’années l’explosion imminente du prix du pétrole dans son livre « Apocalypse, pétrole » (décidément, une obsession), mais là, on attend toujours. Ou alors mon garagiste a oublié de répercuter le prix du baril. 

  Scénario catastrophe donc. On se retrouve brutalement revenu au temps de l’homme des cavernes. Toutes les avancées de la civilisation ont disparu, électricité, industries, Internet, avions, trains, bagnoles, Trump, Erdogan et même les gouvernements Jambon et Di Rupo – encore que, connaissant ce dernier, il aura réussi à se recaser comme chef de la réserve de dinosaures. 

Cette vision de l’avenir explique peut-être pourquoi Trump pousse la NASA à envoyer fissa une expédition sur Mars. Certains experts pensent que la planète rouge a ressemblé à la Terre avant d’être balayée par un cataclysme qui l’a privée de son atmosphère, vidée de son eau, et de tous ceux qui trempaient leurs petits pieds dans ses canaux. 

   Bref, on reconnaît là un des « pitch » favoris des écrivains de science-fiction -dans les années cinquante, c’était généralement la conséquence d’une guerre atomique (au hasard « Malevil » de Robert Merle, « Un cantique pour Leibowitz » de Walter Miller ou « La Planète des singes » de Pierre Boulle). 

Mais l’angoisse apocalyptique remonte bien plus loin. Aux débuts de l’histoire de l’humanité. Les tornades qui ravageaient déjà la terre étaient racontées par des tas de Mr Météo bien avant notre ère : Noé dans la Bible, et auparavant, dans des récits sumériens (-1700 AC), plus tard dans l’Apocalypse de Jean de Patmos, qui clôture en feu d’artifices le Nouveau Testament. A la fin du XIX ème siècle, chez Wells, Poe, Shelley, Rosny aîné.  

  Je ne sais pas si Cauchet entrera dans la bibliothèque de l’honnête homme dans quelques siècles aux côtés de tous ces célèbres collègues mais j’ai l’impression qu’il y aura toujours des lecteurs, un canapé et une lampe de chevet (ou au moins une bougie) en 2.320. Ainsi que des écrivains qui joueront sur nos peurs !  

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