CARNAVAL BRUXELLOIS

Je n’ai rien à refuser à tante Laurette et à tonton Moureaux. Puisqu’ils frétillent tant à l’idée de passer de chefs de patrouille à califeke de village, allons-y ! Scindons ! Et au diable l’avarice ! République wallonne et royaume de Bruxelles.
Une fois l’indépendance proclamée, on nous promet la fête de Berchem-Saint-Agathe à Boitsfort – en tout cas, pendant quelques jours. Avec tante Laurette et Flupke moustache en rois du carnaval. Tout un programme. Car pour le reste, une fois les lampions éteints, les lendemains ne chanteront plus autant.
On voit mal Olivier Maingain mettre un genou à terre devant le trône de Leurs Nouvelles Excellences. Et Joëlle Milquet se transformer en madame Oui pour jouer la dame de compagnie de la nouvelle reine.
Alors, de scission en scission, le royaumeke de Bruxelles deviendra vite dix-neuf royaumetjes de hameaux.
Dix-neuf que dis-je ? Haren, Neder-over-Heembeek, Laeken, Watermael reprendront à leur tour leur liberté. Et le quartier Louise tirera aussitôt sa révérence. Plus question de payer pour les bouseux de la rue Haute. Halte aux transferts nord-sud de Bruxelles !
Le roi de Saint-Josse interdira aux troupes de l’empereur de Schaerbeek de pénétrer sur son micro-territoire sans acquitter un droit de passage en monnaie locale. Le prince de Koekelberg limitera le passage vers la république flamande et le parc à caravanes de Blankenberge sans un blanc-seing du duce De Wever et un certificat linguistique réservé à ceux qui auront pu prononcer correctement au check point le célèbre « Des gilden vriend ? »
Reste que le régime de protection des minorités que Bruxelles a voulu adopter pour montrer l’exemple à la Flandre tournera vite à la cacophonie.
Comme il y a cent vingt nationalités dans l’agglomération, il faudra traduire les documents administratifs en autant de langues. Certes, grâce à la circulaire Peeters, finalement transposée en droit bruxellois, les documents ne sont envoyés dans une autre langue que sur demande. Reste que les plaques de rue auront désormais trois mètres de haut et les noms des stations de métro deviendront un vrai casse-tête.
Et que fera-t-on de tous ces bâtiments fédéraux désormais vides ? Le Palais de Justice pourra servir de centre d’accueil pour les réfugiés venus des nouvelles républiques voisines. Mais le parlement, 1’hôtel du premier ministre, la banque nationale, les palais de l’ancien roi ?
On pourra créer un musée de l’ancienne Belgique pour touristes wallons et flamands. Mais dans les autres bâtiments abandonnés ? Il faudra imaginer autre chose. Des institutions de coordination entre les nouvelles républiques qui pourraient par la suite être simplifiées, fusionnées et former somme toute un nouveau pays, un royaume par exemple.

www.berenboom.com