LE JEU DES 7 ERREURS

Lors de sa réapparition, qui marque l’arrivée de l’automne et des feuilles mortes, Bart De Wever s’est adressé aux francophones, entendez aux Wallons, porteur d’une grande annonce. Pour la résumer simplement, sa proposition est de séparer le pays en deux à l’occasion de la prochaine législature. Vous avez intérêt, nous dit-il, à accepter ma main tendue. Sinon, malheur à nous, nous devrons affronter le grand méchant Vlaams Belang. Cette séparation du pays, il l’appelle le confédéralisme (tout son programme est dans la première syllabe, on l’aura compris). 

Or que veut le Vlaams Belang ? Séparer le pays en deux…  

Attendez, attendez, où est alors la différence entre la N-VA et le Vlaams Belang ? C’est comme dans le jeu des sept erreurs où on vous montre deux images semblables au premier coup d’œil mais qui contiennent de légères discordances après un examen attentif. 

Première différence, le Belang est une bande de fachos alors que la N-VA c’est un club de démocrates – très à droite. Ce qui rappelle le contraste entre Marine Le Pen et son Rassemblement National et le parti Reconquête d’Éric Zemmour et de sa nièce Marion Maréchal-Le Pen. Marine expulse les étrangers avec le sourire et un petit cadeau, Marion avec colère et sans boîte de chocolats. 

Autre différence, le Vlaams Belang danse le tango avec le répugnant leader de Schild en Vrienden, Dries Van Langenhove, alors que la N-VA n’est composée que de braves gens comme Théo Francken (qui, lorsqu’il dérape, s’empresse de s’excuser) ou Liesbeth Homans (pour qui le racisme est « un concept relatif »). 

La N-VA a souvent accusé le Belang d’être un parti « révolutionnaire », décidé à scinder unilatéralement le pays. Mais voilà qu’à son dernier congrès, en juin dernier, le VB a présenté un plan pour une indépendance progressive qui passerait par une négociation avec les Wallons. Seule façon, soi-dit en passant de ne pas se retrouver à la porte de l’Union européenne et des autres organisations internationales dont la république de Flandre aurait absolument besoin si elle larguait les amarres. De son côté, Bart De Wever avait, quelques mois plus tôt, affirmé que « l’occasion de réformer dans le légalisme est passé ». 

Pardon, mais on s’y perd avec cette rafale de déclarations contradictoires. Quand l’un des deux compères de la droite flamande veut rompre brutalement, l’autre préfère le faire avec des fleurs et quand l’autre se montre prêt à discuter, le premier se moque des lois. 

Pendant que les deux frères jumeaux mais ennemis tentent d’arracher le leadership de leur communauté, le citoyen flamand continue de se déclarer majoritairement contre l’explosion du pays, selon les sondages. 

On comprend qu’aucun des deux compères n’a choisi de poser la question par référendum.   

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ET AVEC CA, EMBALLAGE CADEAU ?

  Dans le monde politique flamand, certains ne comprennent pas que les dirigeants wallons fassent la fine bouche devant la proposition de leur ministre-président d’accorder un prêt à la Wallonie pour tamponner les ravages des inondations.

Un prêt, quelques liasses de billets, qui traînaient sous le matelas et qu’il faudra rembourser plus tard ? La proposition du gouvernement flamand est un peu misérable alors que des citoyens flamands ont montré l’exemple d’une vraie solidarité en donnant leur temps, leurs camions, leur énergie à aider immédiatement les sinistrés dans la détresse.   

Vraiment, il aurait pu faire beaucoup mieux, M. Jambon. Plus généreux, plus fort. Donner plutôt que prêter. Donner quoi ?

La Tour de l’Yser, par exemple. Qui pourrait être démontée pierre par pierre et rebâtie à la place du signal de Botrange, façon de hausser le sommet de la Belgique à 750 m au lieu des bêtes 700 mètres actuels. La tour est moche, c’est entendu, mais en cas d’inondation, quel remarquable abri pour ceux qui auront la bonne idée de s’y réfugier. De plus, ce déménagement entraînera un afflux de nouveaux touristes flamands dans les Fagnes. Tout en débarrassant Dixmude de cet encombrant tas de briques sinistres qui seront remplacées avantageusement par de rutilantes villas quatre façades.

Dans la foulée, la Flandre pourrait aussi refiler à la Wallonie quelques fans du pèlerinage de l’Yser, Tom Van Grieken, le capo du Vlaams Belang, et son compère Dries Van Langenhoven, le duce du mouvement Schild en Vrienden. Ça ne coûtera pas grand-chose à la Flandre, inondée sous le nombre de politicards d’extrême droite, alors que la Wallonie ne parvient pas à en faire pousser un seul – même Zemmour a renoncé à immigrer chez nous. 

Si le sacrifice est trop lourd, la Wallonie se contentera de quelques jolies cabines de plage à installer près des retenues d’eau de nos barrages et que pourront occuper les guetteurs que le gouvernement wallon va recruter pour prévenir les prochaines catastrophes (c’est la meilleure suggestion à retenir des commissions d’enquête sur les inondations).  

La Flandre pourrait aussi proposer à la Wallonie d’accueillir quelques-uns de ses nombreux et brillants artistes, Bart Moeyaert (aïe ! il vit déjà dans le Hainaut), Jan Fabre (heu, c’est un peu touchy), Peter Aspe (flûte ! cet excellent auteur policier vient de nous quitter), Tom Lanoye (on ne le fera pas quitter l’Afrique du sud), Anne Teresa De Kersmaeker (difficile, elle est citoyenne du monde, comme le magnifique poète et romancier Stefan Hertmans.) 

Reste à proposer que le port d’Ostende soit rattaché à la Wallonie, l’autoroute E 40 servant de corridor, mais le précédent de la ville libre de Dantzig entre les deux guerres ne rend pas le projet très excitant…

Et si la Wallonie et la Flandre formaient un état appelé la Belgique, ce ne serait pas une bonne idée ?

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THAT’S A JOKE

Cette fois, les climato-sceptiques doivent s’avouer vaincus : la preuve scientifique a été faite que la hausse des températures sur la planète a un effet direct sur les êtres vivants. Elle détruit leurs cerveaux. Ceux qui en doutaient encore, malgré l’état de Donald Trump, seront désormais convaincus en analysant la façon dont la ministre flamande de l’environnement, Joke Schauvliege, s’est auto-carbonisée.
Est-ce l’influence de Trump, de Bannon et consorts, des officines russes ou de la « littérature » délirante des gilets jaunes ? Voilà Madame Schauvliege devenue elle aussi éditrice de fake news. Son prénom, Joke, signifie il est vrai « plaisanterie ».
Tout cela est à la fois inquiétant mais aussi dérisoire. En effet, même sans l’amie Joke, la Belgique compte je ne sais plus combien d’autres ministres de l’environnement, issus de partis différents, élus sur des programmes politiques divergents, et qui ne parviennent à faire semblant de se concerter que le jour où la Belgique s’est définitivement ridiculisée dans les arènes internationales.
Des hommes et des femmes politiques qui ont tous des années d’expérience, une administration à leur disposition, des experts et que nous offrent-ils ? De l’ « éco-réalisme » pour citer les éléments de langage des fabricants de blabla de la N-VA. Traduction française pour les malentendants: ne nous cassez pas les pieds avec ces trucs rigolos pour hippies. Nous, on est trop sérieux pour nous préoccuper de l’avenir de la planète. Pourquoi pas de la Wallonie pendant que vous y êtes ?
Sacré coup de vieux pour toute notre classe politique. Sacrée claque aussi. Ce sont de jeunes lycéens et lycéennes qui réinventent le combat politique et nous redonnent une bonne bouffée d’oxygène. Ces ados ont compris que l’enjeu majeur de la politique est la survie de notre espèce bizarre et non la question de savoir si l’alliance avec le CD&V est plus bio qu’avec la N-VA.
Ne nous leurrons cependant pas. Il y a aussi dans notre pays des jeunes qui se battent pour la suprématie blanche (les « Schild en vrienden »). Tous ne luttent pas pour la priorité au vert.
Quant à ceux qui ont, paraît-il, harcelé la Joke d’incessants messages via leur GSM au nom de la lutte pour le climat, ils devraient d’abord apprendre les dégâts que causent à la planète la fabrication et l’utilisation des smartphones…
Apprendre… Il est sain que les lycéens prennent l’air une fois par semaine dans toutes les villes de notre pays. Mais, revenus dans leur établissement, on leur conseille de se jeter dans les cours d’histoire, de biologie et d’informatique pour rebâtir la civilisation de demain ! Surtout qu’ils ne négligent pas le grec. Leurs écrivains ont déjà tout dit. Et saluons Homère : « sur terre, il n’y a rien de plus faible que l’homme ».

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