DARWIN SUPER STAR

 

L’imagination de la nature m’a toujours fasciné. Les couleurs folles des oiseaux tropicaux, l’arc en ciel des caméléons, la capacité de certains insectes de changer en quelques secondes leur robe noire en un habit tacheté ou en une longue traîne rouge selon les feuilles ou les fleurs qu’ils butinent. Dans le monde animal, les mutations explosent comme des feux d’artifice. Oh ! La belle bleue ! Oh ! La belle rouge !

Certains esprits superficiels croient que l’homme n’a pas cette faculté. Certes, la mutation ne s’opère pas de la même façon chez tous les membres d’une même espèce. Mais une étude récente montre que chez les homo sapiens sapiens, l’aptitude à changer de peau est substantielle à leur développement. Les plus évolués des mammifères sont à chercher du côté de l’homo politicus. De tous les êtres humains, c’est celui qui montre le plus de talent à varier de couleur en un tournemain. Chez certains exemplaires peu avancés, ce changement physique est facile à repérer. Lorsqu’il se contredit, la peau de son visage rougit ou elle se couvre de plaques. Chez d’autres, le nez s’allonge exagérément – le syndrome de Pinocchio. Les homo politicus sur lesquels ces phénomènes sont aussi faciles à observer ne font pas long feu. Car ils seront incapables de s’adapter aux modifications profondes de leur milieu.

En revanche, chez d’autres, la transformation est si totale qu’elle passe inaperçue. Ce sont les mutants les plus accomplis. Ceux qui vaincront les autres, selon la dure loi de Darwin. Prenons un exemple. Bart De Wever. D’après certains chercheurs, ses aïeux flirtaient pendant la deuxième guerre mondiale avec la couleur noire, tirant parfois sur le vert bouteille, couleur dominante à l’époque. Quand le vert bouteille a été balayé, Bart s’est mis au noir et jaune, nouvelle couleur à la mode. Et dans quelques semaines, il sera capable sans rougir de se mettre au bleu ou au rose indifféremment pourvu que cette nouvelle couleur lui assure le trône couvert d’or d’empereur des animaux.

Guy Verhofstadt a lui aussi réussi sa mutation, un spectacle qui laisse aussi ébloui que celui d’un paon faisant la roue. En passant du bleu le plus profond au vert vif sans paraître le moins du monde incommodé. Et Elio ? Lui qui faisait campagne lors des précédentes élections sur le thème : le bleu ? Jamais ! Aussitôt élu, il s’est empressé de mélanger beaucoup de bleu et un peu de rouge, tout en ménageant l’orange et en neutralisant le vert. Quel peintre aurait pu égaler une telle performance ?

C’est ça qui est angoissant quand on va voter, choisir la couleur d’un bulletin et s’apercevoir qu’il change de teinte dès qu’on l’a glissé dans l’urne.

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LES CAHIERS AU FEU ET ELIO AU MILIEU !

   Pourquoi la popularité du Premier ministre est-elle en chute libre dans les sondages, se lamentent ses amis, après seulement un an de pouvoir ? N’a-t-il pas réussi à sortir le pays de sa pire crise politique depuis la question royale ? A boucler l’impossible scission de BHV qui empoisonnait les relations entre les communautés depuis cinquante sans que personne ne descende dans les rues ? A réformer le chômage, les pensions ? A serrer la ceinture du budget fédéral c’est-à-dire à piquer dans notre portefeuille un montant inédit de près de vingt milliards sans trop de grogne ? Et même à mieux parler flamand que Michel Daerden ? Est-ce ainsi qu’on accueille Hercule au retour de ses grands travaux ?

Ben oui. En ces temps de banqueroute de la Grèce, mieux vaut ne pas invoquer ses héros même antiques. Vu ce que les Grecs ont fait du pognon européen, les autres membres de l’union en ont marre de se laisser manger l’Hellène sur le dos.

Mais surtout, Elio souffre d’un mal qui frappe tout le personnel politique, de François Hollande à Sarkozy et Berlusconi, et qui a même failli emporter Obama. Quoi qu’ils fassent, les gens ne croient plus à leurs dirigeants. Ils ont trop dit et pas agi. Et même s’ils tentent de mettre maintenant la main à la pâte, c’est trop tard. On a l’impression qu’ils font du sur place, qu’ils remuent du vent, pédalent dans la choucroute. Tout juste bons à fêter la centenaire de la commune. Mais pas à donner du travail à ses petits-enfants. Ni de l’espoir à leurs enfants.

Que les hommes et femmes politiques ne nous prennent pas pour des ingrats. Ils sont les premiers responsables de leur désamour. Depuis le début de la crise, ils ont tant répété qu’ils ne sont responsables de rien, qu’on a fini par les croire. C’est la faute à l’Europe, aux banques, aux Chinois, aux multinationales, à M. Mittal, à l’euro, aux Wallons, aux Flamands, au père Fouettard, à saint Nicolas, aux Incas et à leur fichu calendrier !

En présentant il y a quelques jours leur manifeste pour l’Europe, Guy Verhofstadt et Daniel Cohn-Bendit (duo improbable sinon absurde) ont suscité un enthousiasme insolite pour un show politique. Qu’ont donc soutenu de si sensationnel les deux compères bleu-vert au point de chauffer la salle comme une baraque à frites? Qu’il est temps que les hommes politiques reprennent la barre, abandonnent leur tentation de ne plus gérer que leur région, leur village, pour s’atteler à un projet qui réunisse tout le continent et le transforme.

Au moment même où Maurice Lippens confessait qu’il n’a jamais eu les compétences pour gérer une banque, il était rafraîchissant d’en entendre d’autres qui veulent enfin bousculer les imposteurs, les ternes, les timides et les médiocres. L’imagination au pouvoir…

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