LA COULEUR DU DIABLE

Vous imaginez ce que diraient les Français si leur équipe de foot avait terminé première du classement FIFA ? Nous, on se contente de ricaner. Et on chipote. Premiers au monde ? Ouais, ouais, ouais. Alors que les Djabs n’ont rencontré ni le Brésil, ni l’Allemagne, ni l’Angleterre.  Premiers footballeurs de la planète alors que le Standard est en train de basculer en deuxième division ?

Cessez de vous rabaisser ! Pensez à ce que François Hollande, lui, aurait fait de ce challenge ? A son discours triomphant. Platini a peut-être tapé dans la caisse, le chômage a peut-être une fois de plus augmenté, les Syriens viennent peut-être chez nous en rangs serrés. Mais, attendez ! Oubliez les immigrés et Marine Le Pen et les impôts et les pauvres puisqu’on est les meilleurs au monde ! Et dans la foulée, les Français seraient dans la rue, à faire la fête, à remonter les Champs Elysées, à porter leur équipe en triomphe.

En Belgique, non. On dirait que nous sommes honteux de porter le numéro uno. Même que Charles Michel n’a pas eu un mot pour eux dans son discours sur l’état de l’union (enfin, l’union…)

Remarquez, il n’a pas eu un mot non plus pour l’environnement, pas la moindre allusion à la grande messe de décembre à Paris de son ami Hollande. Et pas un mot pour nos artistes qui portent si haut le drapeau de la Belgique. Rien sur Stromae, notre Eddy Merckx du vingt et unième siècle. Aux Etats-Unis, on s’enflamme pour « Formidable ». Pas pour « Jobs, jobs, jobs”.

Quelle formule idiote d’ailleurs, que lui a soufflé son porte-parole, son petit génie, sa tête de turc… Ne s’est-il pas aperçu que le président Hollande, toujours lui, se plante depuis le début de son quinquennat en promettant l’inversion de la courbe du chômage ? Des emplois, c’est ça le programme de Charles Michel ? Alors, il est brûlé. D’ailleurs, le bon peuple n’attend pas de ses dirigeants qu’ils leur fournissent des emplois. Il a compris depuis longtemps qu’ils n’ont pas de baguette magique. Qu’ils pratiquent l’incantation, pas l’action. Si l’état supprime des milliers de postes dans la fonction publique, qu’il efface les services publics sans état d’âme, pourquoi les patrons privés engageraient-ils à sa place ?

L’An II risque d’être difficile pour Charles Michel. Qu’il se souvienne que l’an II a été la pire période de la révolution française. Qu’il se méfie de Bart De Wever-Robespierre, qu’il songe à Danton guillotiné, à la guerre civile en Vendée. Il suffit de peu de choses, de rien, juste une étincelle, pour que la grogne se transforme en pavés.

Le gouvernement a donc intérêt, faute de mieux, à investir dans les Diables rouges. Laurette l’a compris avant lui. Sauf que le rouge fait tache tant pour Michel Uno que pour Bart 1er.   Alors,  Diables bleus ou Jaunes et Noirs ? Wachten en zien…

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CINEMA BELGE

Existe-t-il encore un cinéma belge ? Les Palmes d’or des frères Dardenne ont imposé au monde entier le cinéma wallon. Et le succès hollywoodien de Rundskop et de Loft consacré le cinéma flamand, des productions qui font courir les foules dans le nord du pays. Jan Verheyen et Erik Van Looy y sont des stars aussi célèbres que Spielberg tout en restant de parfaits inconnus à Bruxelles et à Liège.

La littérature subit le même sort. Qui connait au sud les romans flamands depuis « Le Chagrin des Belges » (le bien nommé) d’Hugo Claus (publié il y a plus de trente ans) et au nord les écrivains du sud depuis « Une paix royale » de Pierre Mertens ? Or, dans leur région, beaucoup d’écrivains sont en tête des hit-parades.

La Belgique a commencé de pourrir par la tête. Par sa culture. Magritte, Hergé ou Brel sont les derniers artistes « nationaux ». Ils sont morts depuis longtemps. Depuis, il faut être flamand ou francophone (sinon wallon).

On croyait le mouvement irréversible. C’était mal connaître l’activisme de notre gouvernement qui a compris que la seule façon de survivre aux prochaines élections était de renverser la vapeur. Les Diables rouges ont fait chanter à des foules immenses la Brabançonne dans les deux langues et ressortir ce drapeau tricolore que l’on croyait définitivement mangé des mites (et des mythes). Stromae qui peut se proclamer (comme moi) Belge de souche, n’ayant d’origine ni au nord ni au sud du pays a remis une couche de noir, jaune, rouge. Et voilà que nos services de police ont parachevé le travail. Et rétabli l’honneur du cinéma national.

Rappelons l’histoire, manifestement inspirée à nos Dupond-Dupont par le film Argo (dont le scénario racontait une histoire véridique, le sauvetage de diplomates américains en Iran au moment de la prise d’otages de l’ambassade des USA à Téhéran).

Deux pirates somaliens ont été capturés à leur arrivée à Zaventem, attirés en Belgique par la perspective de signer un contrat avec des cinéastes belges (belges, je le souligne) qui leur avaient fait miroiter une participation à un film dans lequel ils se proposaient de reconstituer leurs exploits. Les cinéastes étaient des policiers déguisés et le script, un piège.

Tenant compte des moyens dont disposent nos productions, on comprend que les Somaliens se sont laissés convaincre que la scène d’arraisonnement d’un bateau belge dans les eaux somaliennes ne pouvait être reconstitué que sur le canal de Willebroek, avec leur aide comme consultants.

Les Somaliens sont en prison et les flics-cinéastes font la fête. Reste un immense regret. Ce qui aurait pu contribuer à remettre en selle la culture belge est resté dans les cartons. Le seul film belge du XXI ème siècle n’était qu’une illusion, un leurre.

 

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