DU PASSE FAISONS TABLE RASE

 Quel événement ! En a-t-on vraiment mesuré l’importance, pris que nous étions par les balbutiements de la réforme des retraites en France qui jette les futurs vieillards en colère dans les rues et les débats chez nous sur la création de facultés de médecine dans chaque ville et village de Wallonie ? 

C’est pourtant un véritable événement dont on ne mesure pas encore les conséquences. Il a fallu la photo officielle de la rencontre entre Xi Jinping et Vladimir Poutine pour que l’on comprenne que quelque chose a vraiment changé à Moscou. La table, la célèbre table kilométrique au bout de laquelle Vladimir Vladimirovitch plaçait tous ses invités et même ses chefs militaires s’était brutalement réduite. Et pas un peu ! Il y a un an, le plateau s’étendait sur plusieurs mètres. Pour recevoir son prestigieux hôte chinois, la table a fondu comme neige au soleil. Elle ne mesure plus que quelques centimètres. 

Assis de part et d’autre du minuscule meuble, s’il avait tendu le bras, Xi aurait pu mettre son poing dans la figure de Vlad sans effort. 

Que s’est-il donc passé pour transformer ce long mur de bois qui isolait Vladimir du monde et de ses habitants en une simple table de nuit ? 

Plusieurs hypothèses sont échafaudées dans les chancelleries. Pour certains experts, c’est la preuve que la Russie commence à manquer de carburant de chauffage. Il a fallu découper la table historique et en faire du petit bois pour alimenter le feu ouvert dans le bureau du président russe. D’autres pensent que Poutine a voulu en faire un symbole de rapprochement avec la Chine. Une façon pour lui d’inviter son puissant voisin à faire chambre commune avec lui. Viens, mon loup. Entre nous, il n’y a qu’une mince planchette sur laquelle tu peux déposer tes lunettes, un verre de vodka et tes bouchons d’oreille. (N’ai pas d’inquiétude. Je ne ronfle pas.)

Certains suggèrent même que la disparition de la table-armure qui protégeait Vladimir Vladimirovitch du reste de l’humanité est le résultat d’un sabotage de facétieux opposants à la guerre. Des membres de son entourage qui savaient qu’en subtilisant sa célèbre table, le président russe se trouverait mis à nu, aussi désarmé que Samson sans sa chevelure, Attila sans son cheval, Manneken Pis sans son zizi.

Le plus vraisemblable est que Poutine a offert son meuble le plus précieux à Xi Jinping en échange d’armes. Une table (mais quelle table ! le trésor le plus précieux du Kremlin) contre cent mille obus. Xi en rit encore (ce qui lui arrive rarement). Car Poutine a vendu son âme contre un plat de lentilles. La seule promesse qu’il a reçue est que Chinois et Russes procéderont à des exercices militaires en commun. Façon d’écarter quelques milliers de soldats russes du front ukrainien. Subtile mise en œuvre du plan de paix chinois…   

www.berenboom.com

IKEA MODE D’EMPLOI

Qu’est-ce qui a poussé des milliers de Montois à se précipiter à l’ouverture d’un nouveau magasin Ikea ? Plusieurs hypothèses circulent. Selon certains, ils se sont laissés prendre par un bête canular. Un plaisantin avait prétendu que la firme suédoise avait promis une récompense d’un million d’euros au premier visiteur qui achèterait l’armoire contenant Salah Abdeslam.

Impossible, évidemment puisque l’homme le plus recherché du pays passe ses journées dans les trains de la SNCB, engagé par la ministre Galant, pour tester la rapidité du réseau à deux voies. Jusqu’ici, il a en tout cas prouvé que même un homme peut prendre les voiles en Belgique sans se faire remarquer.

Autre hypothèse : la ville de Mons a annoncé qu’Arne Quint avait accepté de couvrir tout le centre ville d’une sculpture qui symboliserait les tunnels bruxellois. Le nouvel Ikea, tout de béton frais, a paru à une population affolée le meilleur abri contre cette prolongation intempestive des élucubrations de l’artiste vedette de la « capitale culturelle de l’Europe. »

D’autres encore ont voulu démontrer par cette manifestation leur attachement à la suédoise, une vraie provocation dans la ville du président du parti socialiste où personne ne s’attendait à un tel le cri du cœur pour le MR, à la veille de la Saint Valentin. Même pas Charles Michel qui n’a pas songé à faire le déplacement. Aïe ! Une occasion ratée de se faire applaudir par une foule en délire pour un premier ministre dont l’unique boulot semble être de multiplier les communications pour s’autocélébrer le meilleur chef de gouvernement depuis la Libération.

En visitant le nouveau supermarché du meuble, il aurait au passage pu glaner quelques idées pour rafistoler son équipe, redresser Théo Francken dont les joints lâchent de plus en plus souvent, remettre sa Galant sur ses voies, expliquer à son ministre des finances les bienfaits de l’esprit de l’escalier, acheter un peu d’éclairage à quelques obscurs membres de son équipe, apprendre à sa ministre de l’énergie, Marie-Christine Marghem, l’art de bricoler une centrale nucléaire en ruines en lui redonnant un peu de couleur avec de la peinture fraîche et en éliminant les fissures avec de l’enduit et du mastic. Certes, sa durée de vie ne sera pas plus longue que celle d’une étagère Ikea mais ça donnera un moment l’illusion. Le ministre De Croo, chargé de la coopération au développement mais aussi grand prêtre du libéralisme à tous crins pourrait se réjouir qu’une entreprise qui a utilisé pendant des années, avant la chute du Mur, des travailleurs forcés dans les pays de l’est, se soient tournées vers de petites mains asiatiques pour fabriquer des produits étiquetés « made in Sweden ». Un label porteur pour un gouvernement de bric et de broc qui cherche toujours le mode d’emploi.

www.berenboom.com