HOLIDAY ON ICE

De l’été 2014, on ne gardera que des images apocalyptiques, la guerre en Ukraine, le vol MH 17 abattu par les Russes ou leurs compères, le chaos au Moyen Orient, la barbarie des idolâtres autoproclamés d’Allah en Iraq, en n’oubliant pas au passage les massacres en Syrie, au Soudan, en Centrafrique et tutti quanti, le tout nappé d’une bonne couche de virus Ebola. Quel été, mes amis, quel été ! Et dire que, pendant ce temps, la principale préoccupation de nos chefs, durant des nuits entières de caucus, était de départager Marianne Thyssen et Didier Reynders pour le poste de commissaire européen chargé d’on ne savait trop quoi et peu importe.

Mais, un conflit chasse l’autre et les barbaries finissent par se confondre. Les événements les plus atroces sont rarement ceux qui surnagent dans nos souvenirs. Avec le temps, je parie que l’image qui restera de l’été 14, c’est l’ice bucket challenge, cette épidémie qui conduit des gens qu’on croyait sains et normaux à se verser un grand seau d’eau glacé sur le crâne pour éviter de donner des sous aux œuvres qui luttent contre la maladie de Charcot. On se demande qui sont vraiment les malades atteints de dégénérescence ?

Mais, je m’emballe alors que l’idée est peut-être plus subtile qu’il n’y paraît et même qu’elle pourrait inspirer nos politiques. Au bout d’interminables heures de discussions stériles, qui pourrait reprocher à Kris Peeters de vider un grand seau d’eau glacé sur la tête de Charles Michel ? Et l’idole des Bleus n’a-t-elle pas eu la même tentation en apprenant que Di Rupo lui avait piqué les copains et copines du CDH et même ses anciens affidés du FDF pour fabriquer dans son dos des gouvernements régionaux et communautaires sans lui, déjà armés pour lui faire la guerre ? Une bonne couche de glace sur la gueule, c’est drôlement plus relaxant qu’éructer contre les importuns dans les micros de la RTBF. Rien ne vaut un peu de glace pour réchauffer l’atmosphère.

De plus, l’ice bucket challenge a pour motivation d’économiser de l’argent. Ce qui est aussi la principale préoccupation de la nouvelle coalition. Plutôt que de discutailler pendant des semaines pour savoir si on va prendre les citoyens à la gorge avec de nouvelles taxes ou avec une réduction des services sociaux, le nouveau gouvernement pourrait proposer un choix simple à chacun : payer un supplément d’impôt chaque année ou accepter de se faire filmer en public pendant que le contrôleur des contributions vous renverse un grand seau d’eau glacé sur la figure. Avec le risque évidemment, vu les restrictions annoncées du budget de la sécurité sociale, que les frais pour soigner votre pneumonie ne vous soient plus remboursés. On ne fait pas d’omelette sans casser d’œufs.

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RIRE AVEC BART

   Certains ont eu un haut-le-cœur devant la dernière fantaisie de l’irrésistible bourgmestre d’Anvers, construire une prison belge au Maroc pour y fourrer nos détenus marocains. Editos, réactions indignées, déclarations politiques outragées. Allez ! Vous n’avez donc pas compris ? C’était une blague !

On croyait que ce qui séparait le nord du sud, c’était la couleur des poteaux de signalisation et le nombre de pandas dans les zoos. Le sens de l’humour ne serait-il plus le même de part et d’autre de la frontière linguistique ? Ce qui fait la joie des habitants de Steenokkerzeel n’amuse donc plus à Jehay-Bodegnée ? Si le rire perd sa vertu universelle, où va le monde ?

Charlot faisait rire petits Chinois, petits Finnois ou petits Boliviens avec les mêmes pitreries. Et sans sous-titres. Comme Laurel et Hardy et même Louis de Funès. Et Tintin est traduit dans le monde entier. L’ami Bart cherche depuis longtemps à s’inscrire dans cette grande tradition. Lui qui a réussi à incarner en une même carrière d’abord Olivier Hardy puis Stan Laurel à lui tout seul n’aurait-il pas le droit d’être considéré comme le descendant de ces grands comiques du siècle dernier ?

Je pense qu’il y a un vrai malentendu. Ou que les journalistes francophones, toujours si suspicieux à l’égard des initiatives flamandes, n’aient retenu qu’une partie du sketch, le rendant incompréhensible.

Dans la version longue, Bart suggérait d’autres idées toutes aussi désopilantes. Ainsi, il proposait que la fonction de ministre soit réservée aux Belges de souche. Si survient, par exemple, un Italien d’origine, pourrait-il siéger au gouvernement ? Mais non, s’écriait-il, faites-le gouverneur de la Sicile ! (On rit).

Autre petite blague de notre potache anversois: pourquoi pas Kris Peeters comme premier ministre fédéral ? Kris Peeters ? L’homme qui a fait sa carrière grâce à l’organisation patronale flamande ultra nationaliste, lui qui est si fier d’avoir le premier appelé à une révolution « copernicienne », entendez à vider entièrement l’état central de l’essentiel de ses compétences ? Autant lui demander de présider ce qui reste de la banque pourrie de Dexia.

C’était d’ailleurs la conclusion de Bart De Wever : tout ce qui ne va pas en Belgique, ou plutôt tout ce qui le dérange, loin d’ici – comprenez loin de Flandre. Les ministres fédéraux sur l’île d’Elbe, le Standard de Liège au Congo, les journalistes du Soir en Syrie, le roi à Monaco, Didier Reynders à Macao, les syndicats en Chine, les livres sur la deuxième guerre mondiale au pilon et les Wallons aussi. On gardera juste Stromae, qui fait tant d’argent qu’on peut le faire passer pour Flamand, et Annie Cordy qui est intransportable vu la suppression de la sécurité sociale.

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