UN VOILE SUR LES FACILITES

Nous avions été un peu vite en besogne en proclamant la semaine dernière la fin des projets multiculturels. A peine sèche l’encre du journal, les assises de l’interculturalité nous rappelaient que le sens du compromis demeure la potion magique qui fait le ciment de la Belgique, ou plutôt le waterzooi, plat d’autant plus réussi que les ingrédients qui le composent ne se marient pas.
Ainsi pour le voile. La subtile suggestion des sages est de l’interdire dans la moitié des classes et de l’autoriser dans les autres. Pour les jours de fête, il y aurait un régime flottant selon les opinions de chacun. Ainsi, mari, femme et enfants partiront en vacances chacun de leur côté, selon leurs convictions. Excellent remède contre les conflits familiaux, trop souvent exacerbés au soleil dans les espaces confinés de M. Neckerman. 
Le rapport de cette docte commission pourrait aider le conciliateur (c’est toujours ainsi qu’on l’appelle ?) pour régler tous les autres problèmes du pays.
Prenez le cas des signes religieux apparents, comme on dit en politiquement correct. Le régime des facilités, qui s’est révélé un si beau succès, pourrait servir d’exemple. L’idée serait de créer des communes à facilités interculturelles. Les B.H.V. du voile. Le voile autorisé à Molenbeek (sur demande renouvelée tous les trois ans à l’administration communale) serait interdit une fois passé le canal. Avec vestiaire à la station de métro Yser.
Les vacances pourraient aussi donner lieu à un arrangement politico-religieux. Serait jour de congé payé celui où les Wallons se rendent à la mer (mais seulement à la vlaamse kust, pas op ! attestatie à l’appui). De même pour les Flamands voyageant dans les Ardennes, avec certificat du patron du camping.
Belle idée aussi des assises de proposer une politique de quota pour les minorités.
Reste à les définir. Les Roms c’est facile, ils sont chassés de partout.
Mais les Flamands, une minorité ? En Wallonie, sans doute. Faudra-t-il alors prévoir des places réservées pour leurs motorhome ? Et l’obligation pour les télés locales de retransmettre De slimste mens ter wereld ? En échange, un quota de fauteuils accueillerait les Wallons sur les plages du Coq et de Saint-Idesbald. Et à Knokke, sur cinq emplacements réservés aux 4×4, une place de parking serait attribuée aux touristes munis de frigo-box.
Pour que tout roule, dans chaque gouvernement régional, un ministre issu de l’autre communauté assurera la défense des minorités. Pourquoi pas Bart De Wever en ministre de la minorité flamande au gouvernement wallon ? Cette fois, vous verrez, il prendra ses responsabilités (et pas seulement la défense des gaufres de Liège).

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CORNES DE GAZELLE

Il y a quelques jours, la chancelière allemande, Angela Merkel, a signé l’acte de décès du « Multikulti », le projet de « société multiculturelle ». Une société où chaque groupe vit (ou se replie sur) sa culture mais où personne ne s’intègre vraiment. Peut-on y voir l’influence d’un sondage selon lequel plus de la moitié des Allemands ont une « mauvaise opinion » des Musulmans ?
Nous n’avons pas de leçons d’amour ni d’accueil à donner à nos voisins. Et l’intégration est chez nous aussi difficile et le restera tant qu’on ne donnera pas aux écoles primaires les moyens et les outils nécessaires. Entre temps, le Vlaams Belang surfe depuis vingt ans sur ses promesses funestes et racoleuses d’une expulsion musclée des « étrangers ». Sur le même thème, Geert Wilders a séduit les Bataves dont il tient désormais le sort du gouvernement entre ses pinces.
Les Hollandais, jadis cités en exemple de tolérance, apparaissent aujourd’hui comme une citadelle de riches bourgeois assiégés, prêts à défendre leurs privilèges au prix de leur âme.
Les jeunes d’origine marocaine n’ont pas la tête ni les habits des paysans limbourgeois de la vingt-cinquième génération ? Ils crient fort dans le tram en s’acharnant à utiliser un slang mêlant néerlandais et arabe ? Ils s’accrochent à leur double nationalité alors que la Hollande leur a généreusement fait don du passeport orange ? Ils écoutent musique et radio marocaines ? D’accord mais, cela fait-il d’eux des Hollandais pas tout à fait halal ?
Ces questions et d’autres, tout aussi candides, sont celles que pose Fouad Laroui dans son formidable livre « Des Bédouins dans le polder » (éditions Zellige). Avec un humour qui n’est pas sans rappeler celui de Nabil Ben Yadir dans son joyeux film « Les Barons ». A Molenbeek et à Rotterdam, les interrogations et les méfiances sont les mêmes.
D’une plume d’observateur (faussement) tranquille, Laroui (qui vit depuis près d’un quart de siècle à A’dam) se demande comment s’intégrer tout en n’enfouissant pas les richesses de sa culture d’origine au fond d’un placard à travers une série de portraits et de scènes vécus ou imaginaires. Ce superbe écrivain (qui a signé plusieurs romans parus chez Julliard) n’hésite pas à brocarder les travers de ceux qui, comme lui, sont venus du Maroc s’installer dans les polders mais aussi à soutenir la présidente du parti socialiste qui, avant la chancelière démo-chrétienne, proposait de rompre avec l’idéologie multiculturaliste. Laroui, qui aime profondément ses Bédouins en a assez d’être le bon Arabe dans les débats télévisés. Il est tout simplement un citoyen hollandais, écrivant en français, nourri de sa culture mais aussi de celle de l’occident, un grand écrivain aux goûts variés et cosmopolites. Donnant un livre aussi délicieux que des cornes de gazelle !

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IMAGES IDEALES DE LA BELGIQUE

Trots op België et fier de l’être
Ideaalbeelden van België

Images idéales de la Belgique

Debat/ten

woensdag 10 november 2010 – 20:15

mercredi 10 novembre 2010- 20 h 15

In het Frans en in het Nederlands met simultaanvertaling

Flagey | Studio 1,

Gratis, reserveren aanbevolen: info@deburen.eu, +32 (0)2 212 19 30

Tweede avond in het kader van het Belgisch voorzitterschap. Hoe ziet het België van uw dromen eruit? Op deze vraag antwoorden prominente Vlamingen, Franstaligen, Brusselaars én een Nederlandse. Een avond met een ernstige en een ludieke kant!

Minister van Staat Marc Eyskens, hoofdredactrice van Le Soir Béatrice Delvaux, schrijver Alain Berenboom, journalist Dirk Barrez (DeWereldMorgen) en de Nederlandse kunstcritica Elsbeth Etty, trachten in korte, evocerende toespraken het publiek te overtuigen van hun ideaalbeeld voor België. Marc Reynebeau is gastheer van dienst. Met gastoptreden van muzikale duizendpoot Daan!

avec Marc Eyskens, ancien Premier ministre, Béatrice Delvaux, rédacteur en chef du Soir, Direk Barrez, journaliste à la VRT, Elsbeth Etty, critique et Alain Berenboom, écrivain; en maître des cérémonies, Marc Reynebeau.

et l’aide musicale du groupe Daan!

TOUR DE MANEGE

Depuis quelques mois, nos hommes et femmes politiques donnent l’impression de s’être lancés dans un concours d’auto-scooters. On dirait que la foire du midi n’a pas fermé ses portes. Et bang ! Je te fonce par la gauche ! Et bing ! Je te fais une queue de poisson ! Et crac ! Je te fais tourner comme une toupie !
A ce petit jeu, personne ne fait le poids face à Bart De Wever. De chaque collision frontale, il sort aussi foudroyant que Hulk passant sous les rayons gamma tandis qu’Elio, Joëlle et les autres gisent groggy dans leur autos.
Quel est le gri-gri de Bart ? Une voiture blindée ? Un tank ? Un paquet de gaufres gonflées aux hormones ? On ne sait par quel tour de passe-passe, à chaque tour de manège, c’est lui qui décroche la floche. Ca ne roule plus du tout pour les francophones. On a même l’impression que leurs cerveaux commencent à partir en vrille.
Une solution pour eux consiste évidemment à quitter la Foire du midi et à construire un nouveau circuit d’auto-tamponneuses un peu plus loin, où la direction se réservera le droit d’entrée. Là, ils pourront gentiment se tamponner entre eux. Sans qu’un émule de Superman ne vienne leur abîmer le portrait.
Mais cela demande des investissements, un terrain, une nouvelle baraque, des auto-tamponneuses toutes neuves, qu’ils n’ont guère les moyens de payer. Et, dans l’état où elles sont, on voit mal les banques prendre le risque de leur prêter. De plus, elles ne goûtent guère aux jeux de hasard.
Reste alors à faire front en engageant à leur tour un héros pour affronter Super-Flamoutche.
Justement, j’en connais un, spécialiste des bagnoles et qui connaît bien la Belgique, et particulièrement la Wallonie : Bernie Ecclestone. Le patron de la F1. Le dictateur des circuits.
Il suffit que l’ami Bernie menace de déclasser Francorchamps pour que toute la classe politique se mette à trembler et s’empresse d’ouvrir son portefeuille.
N’est-ce pas le champion qu’il nous faut ? Le seul que De Wever n’osera qualifier de « nain de jardin » ? Bart contre Bernie ! Ah ! Quel match en perspective !
D’accord, Bernie ne fait pas dans la délicatesse. N’a-t-il pas déclaré l’an dernier que « Hitler était efficace » et dans une interview au Times : « Si vous observez la démocratie, elle n’a pas fait beaucoup de bien à beaucoup de pays. »
Mais au point où on est, on prend ce qu’on a. D’autant que, question pognon, Bernie est imbattable. Lui qui a réussi à vider les caisses wallonnes pourtant réputées vides, est le seul capable de convaincre les flamands de nous confier leur argent tout en leur faisant croire que c’est un bon investissement. Reste à calculer sa commission. Déclarer Francorchamps zone franche et bilingue ?

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FRIC FRAC CHEZ MA TANTE

Où va-t-on si même des employés du mont de piété se mettent à piquer dans la caisse ?
On pensait que l’usure était dans le taux. Pas du tout, elle était dans le système. Comme le ver est dans la pomme.
Personne ne sera surpris d’apprendre que ce sont les bijoux sur lesquels se seraient jetés des employés de chez ma tante (le nom pudique que l’on donnait à cette institution dans mon enfance). Depuis quinze ans, nos dirigeants politiques ont entrepris eux aussi de brader nos bijoux de famille. Peut-on reprocher à de braves fonctionnaires de prendre leurs dirigeants pour modèle ? Entreprises publiques privatisés n’importe comment, telle la poste dont le premier actionnaire étranger est rapidement reparti avec une partie du trésor. Bâtiments publics vendus à la hâte puis reloués aux administrations par l’acheteur à des prix défiant toute concurrence. Bâtiments scolaires confiés à des partenaires privés à des prix prohibitifs. Annonce d’un partenariat public-privé à l’administration de la Politique scientifique dont les établissements publics, tels les musées, seraient priés d’apporter en dot aux sponsors privés des droits d’auteur qu’ils n’ont pas. L’exemple vient de haut !
La raisons de cette politique ? Pour obéir à une directive européenne, notre déficit doit être drastiquement diminué. En mettant fictivement une partie des dépenses publiques à charge de partenaires privés, les comptes de l’état apparaissent soudain aussi sains et roses que les joues du ministre grec des finances lorsque son pays a rejoint la zone euro. Certains appellent ça du détournement. Justement ce dont on soupçonne certains employés du mont-de-piété…
Mais n’allons pas jeter le bébé avec l’eau du bain ! Et faire disparaître cette vénérable institution qui remonte à la Renaissance parce que certains de ses travailleurs sont soupçonnés d’avoir fauté.
Dans l’état où se trouve notre état, ma tante va sans doute être bientôt sollicitée par les plus hautes autorités. Sur son site, le bureau municipal de prêt défend son rôle avec vigueur : « quelques chiffres des opérations, en continuelle augmentation, du Mont-de-Piété de Bruxelles prouvent, s’il en est encore besoin, le rôle presque indispensable que joue encore de nos jours, une telle institution, dans le paysage financier. »
Pendant que les mieux élus de nos politiciens se disputent, à coup de gaufres, si les inscriptions bilingues à Bruxelles doivent être d’abord en français ou en néerlandais et dans quelle langue seront rédigées les notes de gaz et de téléphone entre Halle et Vilvorde, il faudra bien trouver vingt cinq milliards. Comment ? En bazardant ce qui reste de l’état fédéral chez ma tante. Si vous avez le cœur bleu, blanc, belge, vous pourrez racheter la baraque dans un an et un jour.

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LE PLAN Y

La situation est moins désespérée qu’on le dit. Le plan A s’étant révélé trop gros pour l’estomac de monsieur De Wever, le plan B trop petit pour les citoyens sensés et tous les autres plans des « enfantillages » selon monsieur Bracke (qui porte bien son nom), reste le plan Y. Avec un Y comme dans Leterme.
Le premier ministre que le monde nous envie va une fois de plus jouer les pompiers.
D’accord, en éteignant le feu, il risque d’inonder ce que le brasier a épargné. Mais on ne fait pas d’omelette sans casser d’œufs (à moins que ce ne soit le contraire ?)
Bref, après avoir coulé son parti aux dernières élections, douché ses partenaires lors des discussions sur la réforme de l’état et fait la courte échelle aux nationalistes flamands, Yves Leterme va sauver le pays. Pin, pon ! Pin, pon !
Mais cette fois, prudence, on va juste lui demander de ne pas faire de vagues. Le rôle lui va comme un gant. Depuis qu’il préside un gouvernement qui ne gouverne pas, qu’on ne voit pas et qu’on n’entend pas, il est impeccable. Leterme, c’est le genre de champions que jouer en public tétanise. Mais qui se révèle une star dans l’ombre. Le joueur de tennis qui ne réussit ses balles que devant des tribunes vides quand la nuit est tombée et qu’il n’y a pas de lune. Le ténor de salles de bains, portes et lumières fermées.
De plus, regardez-le. Heu-reux ! Voir son bon visage souriant nous change agréablement de ces politiciens fourbus, livides, qui discutent, enfermés depuis trois mois et qui ressemblent de plus en plus aux mineurs chiliens, coincés au fond de leurs galeries.
Eh bien, respirez, messieurs-dames, Leterme est là avec ses bonbonnes d’oxygène et sa grande échelle. Il va vous tirer d’affaire, vite fait. Vous extraire un à un de votre geôle. C’est qu’il est capable de tout, super-Yves ! Même de faire remonter celui dont on aurait parié qu’avec son tour de taille, il ne passerait jamais.
Celui-là, ne le laisserait-on pas au fond du trou ? murmure quelqu’un au-dessus de mon épaule. Non ! Le pompier c’est comme le médecin. Il ne fait pas le tri entre bons et méchants. Il sauve un point c’est tout.
D’ailleurs, seules les mauvaises langues prétendent que Bart De Wever est gros. Ce ne sont pas les gaufres qui ont gonflé sa bedaine pendant ses tête-à-tête avec Elio et les autres. C’est la ceinture de bombes qu’il porte autour de la taille.
Leterme démineur ? Qui d’autre depuis que Dehaene a pris sa retraite après que sa dernière bombe a fait pschitt ?
En espérant qu’Y ne soit pas trop maladroit lorsqu’il neutralisera les explosifs. Au nom du principe de précaution, je suggère d’évacuer tous les Belges à l’étranger et de laisser le démineur et le terroriste seuls. Le temps qu’ils nous sauvent ou que ça leur pète à la gueule.

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RIRE

L’événement de la semaine, c’était la manifestation contre l’austérité organisée par les syndicats européens. Des dizaines de milliers de travailleurs venus de toute l’Europe, colorés et joyeux, manifestement heureux de manifester. Pour une journée de détente en attendant l’augmentation des impôts, la diminution des pensions et des salaires. Seuls ne riaient pas ceux qui bêtement tentaient de gagner leurs bureaux ou leurs entreprises. Ainsi que des opposants qualifiés d’ « anarchistes » à qui les forces de l’ordre ont refusé le droit de crier. Ils ne connaissaient pas le mot de passe, le code d’accès, apparemment réservé aux seuls manifestants officiels. Mieux vaut en rire mais il est difficile de se moquer d’une manifestation syndicale. Et de la politique d’austérité qui, comme le mot l’indique est interdite aux humoristes. Nietzche pourtant disait « le rire nous rend libre des malheurs du monde ». Il est vrai qu’il est devenu fou peu après.
A propos d’humoristes, un débat à propos de Dieudonné à l’ULB a donné lieu à une belle foire d’empoigne. « L’humoriste » Dieudonné. Ceux qui le défendent se croient toujours obligés d’ajouter cet adjectif comme si ça faisait plus sérieux !
Mais n’essayez pas de vous moquer de ce type. Ses fans, tous aussi austères que des moines tibétains en lévitation, ont la même réaction face aux critiques que les islamistes devant les caricatures de Mahomet. Peu leur importe que les « sketches » de Dieudonné ont fait l’objet de condamnations pour antisémitisme et diffamation. Et qu’il ne fasse plus rire personne, même pas son copain Jean-Marie Le Pen. Le problème, c’est que ses adversaires non plus n’ont pas l’air très drôle. Pourquoi diable prennent-ils ce triste sire tellement au sérieux ? Bref, quel spectacle : de part et d’autre des gens qui se tapent sur la gueule à propos de l’humour. Les batailles de tartes à la crème de Laurel et Hardy avaient une autre allure.
On ne peut plus rire de rien. Le dernier qui a essayé de se moquer du prophète (enfin de ce prophète-là) n’a eu la vie sauve que grâce à la salle de bains blindée qu’il avait fait installer dans son appartement. Où on va, là ?
C’est peut-être l’automne. Les sanglots longs des violons de l’automne bercent mon cœur d’une langueur monotone. C’est Verlaine, hélas. Pas Alphonse Allais…
Restent heureusement nos hommes et nos femmes politiques, jamais en panne d’une plaisanterie. Quand Bart De Wever fatigue et que Karel De Gucht ne se laisse plus aller à une bonne blague congolaise, c’est Rachida Dati qui a l’amabilité de prendre le relais. Confondre inflation et fellation, même le président de la NVA n’aurait pas osé. Faut dire qu’il est prêt à rire de tout sauf de la langue.

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DIVINE IDYLLE

Depuis trois semaines, je suis malade. Obsédé par une chansonnette insipide, « Divine Idylle», entendue un dimanche matin à la radio juste avant la messe.
Comprenez-moi bien, docteur. Je suis tout aussi indifférent à la plastique de Vanessa Paradis, à son côté poupée triste qu’à sa voix pastille Valda. Rien chez elle ne me fait vibrer. C’est la Inge Vervotte de la chanson française. Pourtant, depuis ce dimanche maudit, je ne passe plus un jour, plus une heure sans siffloter entre mes dents cette stupide Idylle.
Avant de vous consulter, j’ai essayé de me guérir moi-même. J’ai d’abord écouté Léo Ferré en boucle, certain qu’il me ferait oublier Vanessa dont il a les mêmes dents, un peu écartées à l’avant. Mais «Jolie môme » m’a ramené à l’enfer de Paradis. J’ai tenté alors de soigner le mal par le mal et sorti mon vieux coffret Brel mais aux premières notes des « Flamingants » j’ai compris qu’il était temps de changer de disque, d’époque et de valeurs.
Voyant mon état, un ami m’a conseillé la musique planante. Au bout d’une demi-heure, je me suis endormi en rêvant de « Divine Idylle » accompagné à la cithare.
Le jazz, le rock, le punk, le house, je m’en suis mis plein les oreilles. J’ai emprunté le MP 3 de mon petit voisin pour que la musique – ou le bruit- me pénètre directement dans le cerveau. Rien à faire. J’avais beau me noyer sous les décibels, le filet de voix de la Vanessa revenait aussitôt. J’ai même acheté un CD de Carla Bruni pensant qu’une voix insipide chasserait l’autre. Pensez-vous ! Carla était si inaudible que je me suis mis à chanter ma scie pour combler le vide. J’ai fini par allumer la télé. Comme tous les jours depuis qu’ils vivent ensemble, Elio et Bart se grimaçaient devant les photographes. Et là, j’ai soudain compris le message que me répétait mon cerveau.
Dans l’espoir docile/tes ailes fragiles/Je te devine/divine idylle.
Evidemment ! C’était la voix de Bart que j’entendais dans la bouche de Vanessa. Débarrassé de sa langue de bois, Bart parlait du fond de son cœur, de ses vrais désirs.
Il suffirait d’un petit rien, peut-être de dix kilos de moins et l’affaire était bouclée
, répondait Elio avec maladresse car ça c’est du Reggiani.
Mon âme idéale/ A la larme fatale/Ma folie, mon envie, ma lubie, mon idylle, reprenait Bart, guéri de ses sarcasmes.
Sous ses airs provocateurs, ses « Vlaanderen boven ! » (pardon, Raymond van het Groenewoud !), Bart tournait la page de son passé. Citant Mitterand (« on change, c’est tout ! »).il abandonnait ses larmes de crocodile sur la tombe de son VNV de grand-père et sur celles du négationniste Karl Dillen, président fondateur du Vlaams Blok. Il aspirait à un avenir nouveau.
Je rêve idylle/Divine idylle/Mon homme idéal.
Allez, Elio, c’est toi !

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GRAND PARDON

On a cru longtemps que le clonetje de Nicolas Sarkozy en Belgique s’appelait Didjé Reynders. Mais, depuis que son ami Nicolas a coulé à pic dans les sondages, le grand bleu a pris prudemment ses distances avec lui. Et on découvre avec surprise que le président français a trouvé un nouvel émule dans notre pays, inattendu, monseigneur Léonard.
Depuis le ravalement de façade du parti de Joëlle Milquet et l’oubli de la référence chrétienne au fronton de sa petite mais coquette boutique, l’archevêque de Malines-Bruxelles ne savait plus à quel sein se vouer. Il a choisi celui de Sarkozy.
Oui, rappelez-vous ce que proclamait le petit Nicolas : jamais je ne demanderai pardon. Pour rien ! Quoi que je fasse ou qu’ait fait la France en métropole ou en Afrique. La pénitence, c’est fi-ni !
L’évêque de Cloyne, secrétaire de trois papes, s’était publiquement repenti de la gestion des faits de pédophilie dans son diocèse irlandais et il avait renoncé à sa charge. Le pape Jean Paul 2 a demandé pardon pour bien des méfaits de l’église, l’Inquisition, l’antisémitisme et beaucoup d’autres dont on ne savait pas qu’elle en était responsable. Même Benoit XVI a présenté ses excuses pour les crimes pédophiles lors d’une messe sur la place Saint Pierre en juin dernier – avant que le scandale belge ne soit connu.
Avec monseigneur Léonard, changement de cap, révolution copernicienne. L’église de Belgique fait sécession – c’est à la mode chez nous. La politique de Rome n’est plus en odeur de sainteté à Bruxelles-Malines. Désormais, c’est Sarkozy le guide suprême. La pénitence, c’est fin-ni !
Le président français a compris que demander pardon, c’est reconnaître une faute, transformer le statut de plaignant en celui de victime. Avec pour conséquence l’obligation de les indemniser. L’église américaine en sait quelque chose qui, paraît-il, n’aurait plus que ses yeux pour pleurer vu le nombre de pédophiles qui hantaient ses rangs.
Certes, l’église belge est plus à l’aise : tant que le pays n’est pas scindé, elle dépend du contribuable. Mais il faudra un gros effort de communication pour que le citoyen considère comme un devoir civique de couvrir par ses impôts (ou une contribution spéciale de crise ?) les dommages et intérêts dus aux victimes des curés pédophiles alors qu’un chèque de vingt cinq milliards va arriver à échéance un de ces jours et que plus personne ne semble avoir envie de gérer les affaires de notre état.
Reste à l’église à revenir à ses origines : la religion juive fête aujourd’hui le jour du grand pardon (Yom Kippour), on efface toutes les fautes de l’année précédente et on repart à zéro. Mais cela suppose hélas qu’on éprouve une sincère repentance, c’est-a-dire qu’on avoue ses mauvaises actions et qu’on les regrette.

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CARNAVAL BRUXELLOIS

Je n’ai rien à refuser à tante Laurette et à tonton Moureaux. Puisqu’ils frétillent tant à l’idée de passer de chefs de patrouille à califeke de village, allons-y ! Scindons ! Et au diable l’avarice ! République wallonne et royaume de Bruxelles.
Une fois l’indépendance proclamée, on nous promet la fête de Berchem-Saint-Agathe à Boitsfort – en tout cas, pendant quelques jours. Avec tante Laurette et Flupke moustache en rois du carnaval. Tout un programme. Car pour le reste, une fois les lampions éteints, les lendemains ne chanteront plus autant.
On voit mal Olivier Maingain mettre un genou à terre devant le trône de Leurs Nouvelles Excellences. Et Joëlle Milquet se transformer en madame Oui pour jouer la dame de compagnie de la nouvelle reine.
Alors, de scission en scission, le royaumeke de Bruxelles deviendra vite dix-neuf royaumetjes de hameaux.
Dix-neuf que dis-je ? Haren, Neder-over-Heembeek, Laeken, Watermael reprendront à leur tour leur liberté. Et le quartier Louise tirera aussitôt sa révérence. Plus question de payer pour les bouseux de la rue Haute. Halte aux transferts nord-sud de Bruxelles !
Le roi de Saint-Josse interdira aux troupes de l’empereur de Schaerbeek de pénétrer sur son micro-territoire sans acquitter un droit de passage en monnaie locale. Le prince de Koekelberg limitera le passage vers la république flamande et le parc à caravanes de Blankenberge sans un blanc-seing du duce De Wever et un certificat linguistique réservé à ceux qui auront pu prononcer correctement au check point le célèbre « Des gilden vriend ? »
Reste que le régime de protection des minorités que Bruxelles a voulu adopter pour montrer l’exemple à la Flandre tournera vite à la cacophonie.
Comme il y a cent vingt nationalités dans l’agglomération, il faudra traduire les documents administratifs en autant de langues. Certes, grâce à la circulaire Peeters, finalement transposée en droit bruxellois, les documents ne sont envoyés dans une autre langue que sur demande. Reste que les plaques de rue auront désormais trois mètres de haut et les noms des stations de métro deviendront un vrai casse-tête.
Et que fera-t-on de tous ces bâtiments fédéraux désormais vides ? Le Palais de Justice pourra servir de centre d’accueil pour les réfugiés venus des nouvelles républiques voisines. Mais le parlement, 1’hôtel du premier ministre, la banque nationale, les palais de l’ancien roi ?
On pourra créer un musée de l’ancienne Belgique pour touristes wallons et flamands. Mais dans les autres bâtiments abandonnés ? Il faudra imaginer autre chose. Des institutions de coordination entre les nouvelles républiques qui pourraient par la suite être simplifiées, fusionnées et former somme toute un nouveau pays, un royaume par exemple.

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